L'exploitation du navire devait s'achever en 2019. Dix ans, plus tôt, des experts avaient exigé des réparations et son remplacement à court terme. En juillet 2020, l'expert du bureau Véritas notait que la coque était pourrie. Fin août, le Sir-Gaëtan coulait emportant quatre marins.
Le rapport de Burness Corlett – Three Quays (Southampton) Ltd (BCTQ) – concernant le naufrage du remorqueur Sir-Gaëtan, le 31 août 2020, au large de Poudre-d'Or vient d'être publié par L'Express de Maurice, il est accablant. Le remorqueur ne devait plus être en service depuis 2019. Pourtant, le soir de l'accident, dans une mer difficile, le bateau tractait une barge remplie de fioul lourd et d'huile moteur. Le bilan est de trois morts et un disparu (Ndlr : quatre morts).
Dès le lendemain de la tragédie, Jean-Yves Chavrimootoo, syndicaliste de la Mauritius Ports Authority-Maritime and other Staff Union (MPA-MAO- SU), dénonçait la vétusté du navire et la gestion catastrophique de la capitainerie du port : "Nous avions, au lendemain du drame, porté des accusations graves et surtout explicites à l’encontre du Port Master et de son adjoint. Nous maintenons ces accusations", a-t-il encore écrit, jeudi, dans un communiqué.
"Une coque pourrie"
En 2009, une mission d'inspection britannique soulignait dans ses conclusions que 8 des 13 embarcations contrôlées sont en très mauvais état. L'un de des bateaux concerné par cette observation était le Sir-Gaëtan. Ils soulignaient que des réparations majeures étaient indispensables pour le conserver, en service, jusqu'en 2019.
Un mois, avant son intervention fatidique, le remorqueur avait été étudié par le marine surveyor, Johnny Lam-Kai-Leung, l’un des assesseurs du comité d'enquête sur le naufrage du MV Wakashio. L'expert avait dressé une liste importante de réparations à effectuer en urgence, une partie de la coque étant pourrie : "par la corrosion and wastage of ship side between frames F31/ F32 – F37/38. To crop and re- place by insert", écrit le rédacteur de l'article.
Des erreurs et des économies
C'est vrai qu'en 2020, les catastrophes se sont enchaînées à Maurice, mais tous ces incidents ne sont pas dus à la fatalité. La fortune de mer du MV Wakashio sur la côte Sud-Est de l'île sœur fin juillet 2020, comme la tragédie du remorqueur Sir-Gaëtan sont les conséquences d'erreurs humaines.
Le vraquier japonais a fini sa course sur la barrière de corail de la Pointe-d'Esny où il s'est brisé en deux. Depuis, le capitaine du navire est en détention, mais est-il l'unique responsable de cette situation ? Les conditions de mer, des décisions tardives, la crise covid-19 expliquent en partie cet accident, mais faut-il occulter que l'équipage naviguait depuis un an, sans pouvoir accoster et quitter le bord ? Combien de navires tournent autour de la planète et attendent l'autorisation pour s'amarrer à un quai ? Pour les armateurs, il est moins coûteux de laisser ces cargos errer sur les océans que de les immobiliser à quai.