Dans son t-shirt jaune du Safthon, la souriante Sabrina Dijoux est le visage du Safthon lancé cette semaine contre les dangers de l'alcoolisation foetale. La jeune femme, en fauteuil roulant, n'a jamais pu marcher, à cause du syndrome d'alcoolisation foetale (SAF) dont elle est porteuse.
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Si aujourd'hui Sabrina souhaite diffuser largement le message, c'est que le SAF a laissé son empreinte sur toute sa vie. "Pour ma mère et moi c'est trop tard, mais pas pour les autres", dit-elle pour justifier son engagement dans la cause.
Un coma éthylique au moment de l'accouchement
Il y a 36 ans, Sabrina est née prématurément, d'une mère qui, au moment de l'accouchement, était en coma éthylique.
"Ma mère a eu une très grande souffrance quelques heures avant d'accoucher, et pour supporter cette douleur elle a été obligée de s'alcooliser. Ce soir-là, c'est une bouteille entière qui est partie, d'où son coma éthylique. Je suis venue au monde quasiment tout de suite après"
Sabrina, porteuse du SAF
Un handicap depuis la naissance
Nul ne savait si ce bébé allait survivre. Mais Sabrina, déjà pleine de ressources, a su surmonter cette première immense difficulté pour poursuivre son chemin, jamais aisé. Les premiers mois de sa vie sont marqués par des problèmes cardiaques.
Plus tard, elle ne tient pas assise, ni ne marche. Les médecins, désemparés, ne savent pas quelle solution trouver, et au fil du temps, la situation empire : c'est son tronc et sa tête qui ne tiennent plus.
Des troubles au quotidien
Au-delà du fait que Sabrina n'a jamais pu marcher de sa vie, le syndrome d'alcoolisation foetale engendre chez elle d'autres troubles au quotidien : manque de coordination, difficultés à se repérer dans l'espace et donc à se déplacer, mais aussi difficultés cognitives. "Par exemple, j'arrive à gérer mes papiers administratifs, mais c'est très fatiguant", explique la résiliente trentenaire, qui jusqu'à l'âge de 26 ans, a été prise en charge par la fondation Père Favron. "Heureusement qu'ils étaient là, parce que je crois que sans eux, je ne serais pas devant vous", lâche-t-elle.
"La meilleure version de moi-même"
Aujourd'hui, elle tient à remercier toutes les équipes médicales, éducateurs, instituteurs, qui lui ont permis de devenir "la meilleure version de moi-même".
"La vie me permet d'être moi-même, de me dépasser tous les jours, et d'aider les autres, parce que maintenant, c'est ça mon but".
Sabrina, porteuse du SAF
L'écriture d'un livre comme exutoire
De la colère, elle en a ressenti pendant son adolescence. Elle a alors pu évoquer l'alcoolisme brièvement avec sa mère, aujourd'hui décédée. Cette colère a au fil du temps laissé place à la compréhension et à l'apaisement, notamment pendant l'écriture de son livre, "Une fille debout", paru l'an dernier. Une rédaction qui fut un véritable "exutoire, un outil de pardon" dit-elle.
"Sur le moment je n'avais pas compris pourquoi elle avait fait ça. Mais c'est en écrivant mon livre que j'ai compris les choses et que j'ai appris à m'apaiser et pardonner à mes parents, qui ne sont plus là"
Sabrina, porteuse du SAF
#JeSuisSabrina
La campagne du Safthon qui vient d'être lancée portera le hashtag #JeSuisSabrina. Cette dernière prendra activement part aux actions de ce mois. "Si je m'engage autant dans SAF France, c'est parce que c'est ce que je suis moi, c'est mon identité, c'est la partie de moi que j'ai cherchée pendant des années et que j'ai trouvée", explique-t-elle.
La campagne qui a débuté ce 9 août 2023, avec 193 actions au programme jusqu'à la fin septembre, est primordiale, dit la jeune femme, "parce qu'en 2023 le SAF ne devrait plus exister car c'est quelque chose qu'on peut éviter".
"Sentir son coeur battre, c'est déjà beaucoup"
Parler, témoigner, lever les tabous, expliquer les conséquences de l'alcoolisation pendant la grossesse, et rallier le maximum de monde à la cause... : des actions essentielles pour que des enfants à naître ne débutent pas leur vie avec un handicap évitable. "Le SAF est lourd, très très lourd, pour les parents, pour les enfants", insiste Sabrina Dijoux. Son rêve aujourd'hui : "vivre tout simplement, sentir son coeur battre alors qu'il n'était pas censé battre, c'est déjà beaucoup".