Une visite éclair de 24 heures ce jeudi 14 avril dans l’entre-deux tours de l’élection présidentielle. Jean Castex est arrivé à La Réunion ce matin. Il a déambulé dans les rues de Saint-Denis puis de Saint-Pierre.
Une opération séduction pour convaincre les 40% d’électeurs réunionnais qui ont voté pour le candidat de la France Insoumise au premier tour. Jean-Luc Mélenchon est arrivé en tête dans 21 des 24 communes de l’île, devant Marine Le Pen, 24,73% des voix et Emmanuel Macron, 18,04 %. Dimanche 24 avril, le président sortant sera face à la candidate d’extrême droite pour le second tour de la présidentielle. Jean Castex s’adresse aussi aux 300 000 abstentionnistes de l’île.
Retrouvez ici l’entretien qu’il a accordé à Réunion La 1ère :
Question : Au premier tour, 18 % des voix pour Emmanuel Macron en troisième position à La Réunion. Avant ce résultat, un sondage SAGIS pour Réunion La 1ère indiquait qu’Emmanuel Macron était le candidat qui rassemblait le plus de "mauvaises opinions" dans l’île derrière Eric Zemmour. Comprenez-vous ce rejet et cette défiance ?
Réponse : "Je l’ai vu dans les urnes et c’est pour ça que je suis là. Pour parler du programme d’Emmanuel Macron. Une élection sert à départager les candidats, à inviter à la réflexion par rapport au programme de Mme Le Pen. Je viens d’abord faire un travail d’écoute avec beaucoup de déambulations, de rencontres avec des acteurs sociaux professionnels, et des habitants de La Réunion".
A La Réunion, le sujet du RSA préoccupe les bénéficiaires. Savez-vous combien ils sont dans l’île ? Et comprenez-vous leur inquiétude quand ils lisent qu’ils devront travailler pour toucher le RSA ?
"Il a 260 000 bénéficiaires à La Réunion. (…) Ce que nous voulons faire est dans leur intérêt. Nous avons commencé à agir pour eux. Jusqu’en 2019, le conseil Départemental (et donc les Réunionnais) supportait la charge de l’allocation du RSA. Nous l’avons recentralisé. Cela permet au Conseil Départemental, chaque année, grâce à l’Etat et au gouvernement, de consacrer à l’insertion plus de cinq millions d’euros pour amener ces personnes vers l’emploi et l’activité. A ce dispositif, nous allons ajouter les moyens du service public de l’emploi.
L’idée est de sortir du RSA pour retrouver une activité. La baisse du chômage le permet, une baisse de 24 % en 2017 et 16 % aujourd’hui. Cela aussi est à mettre au crédit d’Emmanuel Macron.
Nous voulons faire un traitement individualisé des allocataires du RSA dans le cadre d’un accompagnement personnalisé pour les ramener à une activité. Les 15h à 20h (de travail, ndlr) sont de l’accompagnement, de la formation, du savoir-être, de l’aide à la mobilité. (…) Le système ne sera pas généralisé, mais adapté en fonction des situations des personnes. (…)
Je prends l’exemple du Contrat d’Engagement Jeune qui s’adresse aux jeunes de moins de 25 ans qui ne touchent pas le RSA. Ce contrat se déploie déjà à La Réunion depuis le 1er mars, sur les mêmes bases que celles qui font peur (pour le RSA, ndrl). Et ça marche très bien ! Il y a déjà plusieurs centaines de contrats signés".
Marine Le Pen propose un âge de départ à la retraite à 62 voire 60 ans. Emmanuel Macron veut le porter à 65 ou 64 ans. Le choix risque-t-il pas d’être vite fait pour ceux qui ont beaucoup travaillé ?
"Et pourquoi pas 50 ans ? Allons-y ! Quel est l’enjeu ? Il est que l’on puisse payer ces retraites et nous avons même l’ambition de les améliorer. Nous voudrions porter le minimum retraite à 1 100 euros. Nous voudrions mieux prendre en charge la dépendance. Cela à un coût et nous proposons pour cela de prolonger progressivement l’âge de départ à la retraite en fonction de notre espérance de vie.
Ce que dit Emmanuel Macron est du sérieux. Le reste c’est prendre les gens pour des imbéciles. Dire que l’on va maintenir, voire abaisser l’âge de la retraite, ça ne marche pas, on ne pourra pas les payer.
En revanche, les carrières longues, les métiers pénibles et présentant des difficultés (…) seront soumis à la concertation et devront être pris en compte.
Tout le monde peut le comprendre. Tous les pays le font. L’enjeu est de sauver notre système de retraites, et l’améliorer.
Avec Marine Le Pen, nous pourrons partir un peu plus tôt, mais très vite avec des pensions qui baissent. Nous ne le voulons pas".
A La Réunion, une grande partie de la population vit sous le seuil de pauvreté. L’inquiétude sur la pénurie de produits, comme l’huile, s’ajoute aujourd’hui à l’inquiétude sur le pouvoir d’achat. Le comprenez-vous ?
"Le pouvoir d’achat inquiète nos concitoyens partout. Nous voyons que l’inflation est un peu moins élevée en France que dans les pays qui nous entourent, mais ça monte.
Nous avons déjà pris des mesures. 158 000 Réunionnais ont touché le chèque énergie de 100 euros. 277 000 Réunionnais ont touché l’indemnité inflation de 100 euros. La remise de 15 euros sur le gazole et l’essence marche aussi. Le candidat Macron l’a dit : tous ces systèmes seront prolongés, y compris le bouclier tarifaire.
L’indexation des retraites interviendra dès le milieu de l’année et non au 1er janvier 2023. Et nous étudions un dispositif de chèque alimentaire pour faire face aux produits de premières nécessités pour les personnes les plus en difficultés".
30% des Réunionnais ne sont pas vaccinés. Ça va être compliqué de leur dire de voter pour un candidat qui a déclaré qu’il voulait "les emmerder jusqu’au bout"…
"Je suis intimement convaincu que la vaccination est utile pour les sauver et protéger les autres. Pour gagner des voix, je devrais devant vous changer l’opinion du gouvernement sur la vaccination ? C’est non !
La vaccination s’est développée à La Réunion, certes moins qu’ailleurs. L’épidémie est contenue, c’est le point central. Je veux dire aux Réunionnais que mon gouvernement, sous l’autorité d’Emmanuel Macron et avec les autorités locales, à plutôt bien géré cette crise et a protégé les Réunionnais".
Au premier tour, 40 % des électeurs réunionnais ont voté Jean-Luc Mélenchon. Que dites-vous aux électeurs de gauche qui disent "qu’ils ne veulent plus faire barrage" ?
"Marine Le Pen qui essaie de s’adoucir et mettre un écran de fumée est le contraire des valeurs que porte cette île magnifique. C’est contraire à son Histoire.
J’aime La Réunion et je serais très malheureux que Marine Le Pen sorte en tête ici. Je dis aux Réunionnais qu’Emmanuel Macron est le mieux placé pour répondre à leurs préoccupations avec les autorités locales. Le choix du cœur et de la raison est celui d’Emmanuel Macron".