Petit coléoptère des ruches : les apiculteurs réclament un changement de stratégie des services de l'Etat

Piège installé dans un essaim sauvage à Saint-Philippe, avec suspicion de petit coléoptère
Les apiculteurs de La Réunion n'en ont pas fini du petit coléoptère : la présence de l'insecte, détecté pour la première fois depuis juillet dernier, a causé la perte de plusieurs de leurs ruches, à titre préventif. Ils dénoncent les méthodes mises en place par les services de l'Etat pour lutter contre cette infestation.

La semaine dernière, le petit coléoptère, insecte nuisible, était à nouveau repéré dans un rucher de Saint-Philippe, déjà touché en 2022 par cet insecte ravageur. La découverte avait alors entraîné la destruction systématique des ruches concernées. 

Regardez le reportage de Réunion La 1ère : 

Qu'on cesse de brûler systématiquement leurs ruches dès qu'on soupçonne la présence du petit coléoptère, la demande réitérée des apiculteurs

SI les apiculteurs de l'île ne conteste pas la présence du petit coléoptère à La Réunion, ils regrettent les méthodes des services de l'Etat. D'autant que le ravageur serait aussi présent dans les essaims sauvages des forêts ou dans les colonies non-déclarées, qui eux ne subissent aucun contrôle. 

Le petit coléoptère présent dans les essaims sauvages

Pour prouver leurs dires, les apiculteurs de Saint-Philippe ont mené un test : ils ont installé des pièges dans un essaim sauvage de la forêt de Saint-Philippe, en présence d'un huissier. Résultat : là aussi, le petit coléoptère serait présent. Aucun intérêt donc de brûler leurs ruches, si à quelques pas de là, dans la nature, l'insecte est présent sans qu'il y ait de mesure de lutte. 

"Ces essaims sauvages, il y en a tous les 100 mètres"

Jean-Noël Bénard, apiculteur qui a subi des destructions selon les mesures sanitaires en vigueur, assure avoir alerté la DAAF de la présence de ces essaims sauvages dans la forêt, tout près de ses propres ruchers. "Des essaims comme ça, à Saint-Philippe il y en a tous les 100 mètres. Il faut que la DAAF change son protocole et arrête de détruire nos abeilles à nous, ça ne sert à rien, ce n'est pas justifié", clame-t-il. 

"L'Etat s'est concentré sur les apiculteurs en règle : ça a été pratiquement du harcèlement pour contrôler leurs ruches, alors qu'à quelques dizaines de mètres des colonies dans le milieu naturel, on ne va pas y jeter un oeil", ne décolère pas François Payet, président du syndicat des apiculteurs de La Réunion. 

Vivre avec le petit coléoptère 

Bernard Savreux a lui aussi fait les frais d'une destruction après constat de la présence du petit coléoptère, il y a quelques mois. "On m'a brûlé un rucher, mais je devrais être indemnisé. Mais le problème c'est que mes 600 autres ruches sont bloquées depuis deux mois, je ne les ai pas visitées depuis deux mois. Les essaims travaillent de moins en moins, ils sont de moins en moins forts", s'inquiète-t-il. 

Pour ce dernier comme pour beaucoup d'autres, la solution est d'apprendre à faire avec la présence de ce petit coléoptère, et d'aider les abeilles à y être plus résistante. "J'affirme et je confirme que nous apiculteurs, si on adapte nos méthodes pour aider nos abeilles, on parviendra à réduire l'activité du petit coléoptère, et il n'y aura aucune conséquence sur le miel", martèle Bernard Savreux. 

Une abeille péi plus résistante 

D'autant qu'à La Réunion, comme le soulignent plusieurs apiculteurs, les abeilles seraient plus résistantes au petit coléoptère que celles d'Europe. En cause : l'origine africaine de l'abeille présente sur l'île. "Notre abeille fait partie de la lignée africaine, endémique de Madagascar. Les travaux d'une thèse montrent qu'elle a toujours vécu avec le petit coléoptère. Dans ses gènes, elle a des moyens de défense, c'est là-dessus qu'il faut travailler", fait valoir François Payet. 

Davantage d'écoute et de collaboration

La filière apicole demande donc davantage d'écoute de la part des services de la DAAF, et davantage de collaboration pour lutter contre ce problème. 

"On est là pour travailler avec les autorités, c'est un problème grave et on ne pourra le résoudre qu'ensemble. On demande une étude de terrain, et non une réglementation appliquée sans concession, de manière abrupte, totale. On connaît les abeilles, on connaît le petit coléoptère dans le monde, mais c'est in situ qu'il faut venir regarder ce qu'il se passe"

François Payet, président du syndicat des apiculteurs