Une femme sur trois a été victime de violence physique ou sexuelle, le plus souvent par un partenaire intime, d'après le dernier rapport de l'ONU Femmes. Lorsque l’on considère le harcèlement sexuel, ce chiffre est encore plus élevé. Partout dans le monde, y compris en France, les violences faites aux femmes ne diminuent pas et passer la porte du commissariat reste toujours difficile.
Fin 2023, 270 000 femmes affirment avoir été victimes de violences sexuelles physiques (viol, tentative de viol, agression sexuelle). Mais seule une petite minorité porte plainte au commissariat où à la gendarmerie : 6 % pour les violences sexuelles physiques et 2 % pour les violences sexuelles non physiques. Des chiffres qui prouvent que le travail pour protéger les femmes reste un long combat à mener.
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À Saint-Pierre et Miquelon, difficile d'établir des données pour estimer l'ampleur des violences. Des violences souvent intrafamiliales et conjugales.
En octobre 2023, la coordonnatrice interministérielle contre les violences faites aux femmes en Outre-Mer Justine Bénin avait dressé un état des lieux des outils existants et établi un constat : les moyens sur l'archipel ne sont pas suffisants.
Un manque de structures et de dispositifs d'urgence
Sur l’archipel, il n'existe pas de Téléphone Grave Danger qui permet à une victime d’alerter immédiatement les forces de l’ordre. Pas non plus de bracelet anti-rapprochement alors qu’il y a eu des ordonnances de protection civile prononcées judiciairement. Une mesure qui paraît peu envisageable sur le territoire pour les gendarmes :
Utiliser un bracelet ici pose des problèmes d'exiguïté du territoire. Ce dispositif n'a pas de sens sur l'archipel.
Etienne Riethmuller, Commandant en Second de la gendarmerie de Saint-Pierre et Miquelon
Pas de bracelet donc, mais alors quelles sont les autres mesures d'éloignement des auteurs de violences, notamment lorsqu'il s'agit du couple ? Pour le moment, aucune solution de prise en charge des auteurs de violences n'existe à Saint-Pierre et Miquelon.
En 2023, sur une dizaine de procédures de violences intrafamiliales sur Saint-pierre et Miquelon, la moitié concernait des violences dans des couples à l’encontre de femmes.
Des échanges ont eu lieu ces dernières semaines pour mettre en place des solutions qui devraient voir le jour en 2025. Éloigner les auteurs plutôt que les victimes, une démarche nécessaire pour éviter la double peine infligée aux femmes lorsqu'elles doivent en plus de subir des violences, quitter le domicile familial. Aujourd'hui du côté des hébergements d'urgence sur l'archipel, quatre places peuvent être libérées pour des femmes devant quitter le domicile familial et leurs enfants.
Autre manquement dans l'archipel concernant la protection des femmes. Il n'existe plus aucune association de prise en charge des victimes. La dernière, "Les Salines" a fermé ses portes en 2021.
Des mesures au niveau national
En cette journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le gouvernement a annoncé certaines mesures pour mieux protéger les victimes, comme la généralisation du dépôt de plainte à l'hôpital. "D'ici fin 2025" le nombre d'hôpitaux permettant de déposer plainte directement pour les femmes victimes devrait augmenter, a annoncé Salima Saa, secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, au micro de France Info.
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À Saint-Pierre et Miquelon, les urgentistes et médecins sont déjà en capacité de prendre en compte les dépôts de plaintes depuis quatre ans. L'hôpital de Saint-Pierre fait partie des 236 établissements qui ont signé une convention avec la gendarmerie et le parquet. Une convention signée avec l'ancienne procureure de la République, Isabelle Arnal.
C'est rare de voir les femmes victimes de violences venir à l'hôpital. On voit plus les auteurs de violences à l'hôpital que les victimes.
Patrick Lambruschini, directeur du centre hospitalier de Saint-Pierre
Des auteurs de violences souvent transférés à l'hôpital par les gendarmes pour des prises en charge psychiatriques. Patrick Lambruschini confie avoir reçu " peu de femmes victimes de violences " cette année au sein du centre hospitalier. À noter qu'un dispositif de confidentialité et un espace d'entretien individualisé sont mis en place pour protéger l'identité des femmes.
La peur du regard des autres mais aussi des représailles de leurs agresseurs, elles sont nombreuses à le ressentir. Les femmes ne déposent que très souvent une main courante auprès de la gendarmerie. Cependant, si les gendarmes estiment qu'il y a une infraction pénale, ils peuvent automatiquement en référer au juge pour demander une ordonnance de protection immédiate, effective dans les 24h après la main courante sans obligation de dépôt de plainte.
Parmi les mesures du gouvernement pour lutter contre les violences faites aux femmes, il y a aussi le renforcement de l'aide universelle d'urgence. Elle va passer de 13 à 20 millions d'euros. Une aide allant de 250 à 1 300 euros pour aider les victimes de violences conjugales et les soutenir lorsqu'elles quittent leur domicile.
Localement, depuis le 1er décembre 2023, une aide est également mise en place par la CPS (caisse de prévoyance santé). Une aide qui "doit permettre à la victime de s’éloigner physiquement de l’auteur des violences et faire face aux dépenses immédiates en attendant de trouver des solutions durables", peut-on lire sur le site de l'oganisme. Un montant de 243 euros à 1100 euros dans un délai de trois à cinq jours après la demande.
Si vous êtes victime de violences, vous pouvez appeler le numéro d'urgence 39 19, des professionnels sauront vous écouter et vous orienter dans vos démarches.