"Je ne me considère ni homme ni femme. Je suis un mélange des deux" commente tout d’abord Stefen. "Au début, je disais que j’étais gay mais il y a deux ou trois ans, je me suis identifié.e au terme non binaire. Je n’aime pas le fait que parce que l’on est un homme efféminé, alors cela signifie que l’on est forcément gay" ajoute-t-iel.
Couronne sur la tête, vêtu.e d’une longue robe d’un créateur local et perché.e sur ses talons haut de près de 12 cm, Stefen a de l’assurance. Une confiance acquise au fil du temps. "La coiffure et les défilés m’ont aidé" confie le mannequin. "Avant, je portais toujours des chaussures plates. Un jour, la première styliste pour qui j’ai défilé m’a proposé de le faire en talons. Je me suis dit pourquoi ne pas essayer ? C’était la première fois que j'en portais. Depuis ce jour, je ne mets plus de plat lorsque je vais en soirée par exemple". Son mantra ? "Qui va nous empêcher ? Empêchez-nous !"
Lorsque mon père m’a dit qu’il était fier de moi, ça m’a conforté.
Stefen Paraense
"Il faut avoir le cardio pour"
Stefen se souvient encore de son coming out comme si c’était hier. "En 2017, le soir de la fête des pères, je l’ai annoncé à ma mère. Je pleurais et elle m’a dit : c’est pour ça que tu pleures ?!" confie Stefen, le sourire aux lèvres. "En 2018, je l’ai ensuite annoncé à mon père. Je craignais de le faire alors je l’ai écrit sur un bout de papier. Je me souviens l’avoir préparé la veille. Le lendemain, le bus passait à 6h30 du matin et quand j’ai vu qu’il était l’heure de partir, j’ai donné le bout de papier à mon père. Il m’a demandé ce que c’était mais je lui ai demandé de le lire plus tard. Ensuite, je suis parti.e en courant. En rentrant le soir, c’était comme si rien ne s’était passé" se rappelle le.a coiffeur.se.
À lire aussi : Mois des fiertés 2024 : la communauté LGBTQIA + de Guyane mise en lumière
Après l’avoir dit à ses proches, Stefen décide de se dévoiler tel qu’iel est. "J’ai mis un post sur Instagram avec un sondage. J’avais dit que la seule personne à laquelle je craignais de faire mon coming out c’était mon père mais une fois que c’était fait, l’annoncer aux autres ne me faisait ni chaud ni froid. Il y a eu certaines réactions négatives mais cela s’est relativement bien passé. Je n’ai pas eu d’amis qui m’ont déçu à propos de ça".
Au début de son coming out, ce n’est pas simple. Il faut avoir le cardio pour. La société guyanaise devrait évoluer. Dans la rue, on m’insulte mais ça ne m’atteint pas. Pour quelqu’un de plus fragile, ça risque d’être un peu plus compliqué.
Stefen Paraense
"Ça a déjà viré à l’agression"
Au-delà du verbal, "ça a déjà viré à l’agression" déplore Stefen. "À une époque, je faisais encore carnaval. On m’a lancé des bouteilles. On m’a aussi déjà suivi. (…) Avant, je pensais que c’était de ma faute car j’étais efféminé.e".
On a qu'une seule vie. Même s’il ne faut pas se priver, il faut aussi savoir choisir où l’on va. C’est un conseil valable en Guyane mais aussi partout ailleurs. On ne va pas aller à un endroit que l’on ne connaît pas car ça risque vite de devenir compliqué.
Stefen Paraense
Pour changer les choses, il faudrait "avoir plus de soutien au collège. Je pense que s’il y en avait davantage, ça pourrait être plus facile. J’ai été harcelé.e une grande partie de ma scolarité. Arrivé.e au collège, il fallait s’endurcir car on m’insultait dès que je passais quelque part" explique le mannequin.
Il faudrait davantage d’accompagnement, faire intervenir des personnes pour en parler et échanger avec les élèves. Il ne faudrait pas spécialement créer un groupe de paroles pour les gays pour ne pas leur coller d’étiquettes mais plutôt un espace où chacun pourrait s’exprimer librement.
Stefen Paraense
Pour aller plus loin, vous pouvez visionner la collection de portraits de l'année dernière en cliquant ici.