L'énième fermeture de la piscine de Basse-Terre met en lumière les difficultés structurelles qui frappent la natation en Guadeloupe.
Gilles Sézionale, président de la Fédération française de natation, a récemment félicité les bons résultats obtenus par la discipline au lendemain des Jeux Olympiques et Paralympiques, avec une hausse des licenciés dans l'Hexagone.
Cependant, en Guadeloupe, le tableau est bien plus nuancé. Le manque d’infrastructures aquatiques réparties équitablement sur tout l’archipel entrave l’apprentissage de la natation, pourtant essentiel sur un territoire insulaire.
Le défi des infrastructures
Dans l'archipel, la natation devrait être une compétence élémentaire pour tous. Pourtant, Gérard Olivary, président de la Ligue de natation de Guadeloupe, souligne l'inégalité criante dans la répartition des équipements : "La Guadeloupe aujourd'hui a un besoin important d'infrastructures. Nous avons accueilli avec plaisir, au mois de juin, la nouvelle piscine 50 mètres, 10 couloirs, aux Abymes. Mais, c'est l'arbre qui cache la forêt."
En effet, la majorité des bassins se concentre dans le triangle Baie-Mahault, Gosier, et Les Abymes. "Le reste de la Guadeloupe est très peu pourvu", déplore-t-il.
Des zones comme Anse-Bertrand, Petit-Canal, Morne-à-l'Eau ou encore le nord de Basse-Terre sont délaissées, privant une grande partie de la population d’un accès aux infrastructures nécessaires à l’apprentissage de la natation.
Une question de sécurité
La situation dépasse le simple cadre sportif. L’apprentissage de la natation est une question de sécurité publique. La législation française impose en effet que tous les enfants maîtrisent la nage dès l'âge de 6 ans, dans le cadre du programme "L’aisance aquatique" ou "J’apprends à nager". Or, en Guadeloupe, ces directives ne peuvent pas être appliquées de manière uniforme en raison de l’absence d’infrastructures dans certaines zones. "Comment mettre en place ces dispositifs en Guadeloupe, si le jeune d'Anse-Bertrand n'a aucun lieu de pratique ?" s’interroge Gérard Olivary. Le manque de piscines est directement lié à des drames évitables : "Ce n'est pas normal que l'on ait toujours ces problèmes de noyades", insiste-t-il.
Des solutions pour le futur
Pour pallier ce déficit, Gérard Olivary et la ligue guadeloupéenne de natation proposent une approche pragmatique.
Si la nouvelle piscine olympique aux Abymes est une "très bonne chose" pour les compétiteurs et le haut niveau, elle ne répond pas aux besoins d'apprentissage pour la majorité des jeunes. "Il est important que l'on soit sur des structures beaucoup plus petites, pour recevoir du public beaucoup plus jeune et mettre en place cette phase d'apprentissage", explique Gérard Olivary.
L’idée serait de construire plusieurs petits bassins à travers l’archipel, plus accessibles financièrement et géographiquement. Cette approche décentralisée permettrait de mieux couvrir le territoire et de garantir que chaque enfant guadeloupéen puisse apprendre à nager, peu importe où il habite.
Une réflexion collective nécessaire
Pour que ces propositions se concrétisent, Gérard Olivary appelle à une mobilisation collective des acteurs concernés. Pour le président, il faut une vraie réflexion sur le sujet. Se mettre autour d’une table, acteurs, sportifs, politiques "et choisir le cap", affirme-t-il.
La natation en Guadeloupe ne doit pas rester un sport réservé à une élite urbaine. Il en va non seulement de l’épanouissement des jeunes, mais aussi de la sécurité de tous les habitants de l’archipel.
Si la Guadeloupe peut s’enorgueillir de ses champions dans d’autres disciplines, le slogan "Guadeloupe Terre de champions" reste encore à concrétiser pour la natation selon Gérard Olivary.