Voilà un "point" qui soulève bien des questions. Dans un communiqué de presse en date du 25 avril 2024, la Collectivité Territoriale de Martinique indique que lors de la plénière qui s'est tenue le même jour, "la Conseillère Exécutive Marie-Thérèse Casimirius, a fait le point sur le soutien aux acteurs du monde sportif que sont les ligues, comités et associations".
L'institution explique que de l'argent serait en attente faute de réception des documents nécessaire.
En raison de la cyberattaque survenue en mai 2023, il reste aujourd'hui à solder 1 491 800€ pour les années 2020 à 2023. Cependant, à ce jour, les pièces justificatives transmises par les différents comités, ligues et associations ne pourront permettre de mandater que 379 850€. La Collectivité rappelle ainsi aux bénéficiaires la nécessité de régulariser leur situation afin de recevoir les sommes qui leur sont allouées.
Communiqué de presse de la CTM
"Nous sommes à deux années de retard de paiement"
En début de saison sportive, entre novembre et janvier, les associations, comités et ligues effectuent une demande de subvention auprès de la CTM. La collectivité étudie la demande et accorde un montant. Les demandeurs perçoivent cette subvention en deux paiements. Une avance à hauteur de 70% puis un solde de 30% après envoi des factures et autres justificatifs de dépenses.
J'ai envoyé mes documents depuis longtemps, mais je n'ai pas encore perçu les 100% pour la saison 2022/2023. Pour 2024, la CTM m'a envoyé un courrier pour me dire que mon dossier est pris en charge. Après il faut qu'il passe en commission avant le mandatement. Entre la prise en charge du dossier et le passage en commission, vous en avez pour trois mois, voire plus parfois. Puis entre le passage en commission et le mandement, il y a encore trois mois. On reçoit l'argent en fin de saison, parfois on ne sait même plus quelle saison cela représente tellement tout est en retard.
Marie-Eva Levert, présidente association Schœlcher natation 2000
À l'instar de cette association qui dénombre 350 adhérents et près de 330 licenciés, la ligue de judo (34 clubs et 2 400 licenciés) a elle aussi bien reçu son avance pour la saison précédente.
Le trésorier est très sensible à toutes ces démarches financières et nous nous y attelons de manière à permettre la bonne marche des procédures. Sur le budget global, la part de la CTM représente 60% environ. Nous avons un accompagnement de l'ANS (Agence Nationale du Sport), de notre fédération grâce au FDS (Fonds développement du Sport) et nous avons des aides fédérales. Tout cela nous permet de faire des choses dans l'intérêt général de notre discipline.
Alfred Céphise, président de la ligue de judo
Certaines associations et clubs peuvent également obtenir des aides de leurs communes, de l'EPCI (Cap Nord, Cacem ou Espace Sud), de la DRAJES (Direction de Région académique à la Jeunesse, à l'Engagement et aux Sports). Les sponsors et partenaires privés sont également des appuis importants.
"Le bénévolat, une activité en voie de disparition"
Pour ceux qui ne fournissent pas les pièces, les choses sont encore plus compliquées.
Il y a certaines associations qui ne sont pas à jour de leur propre document. C'est-à-dire qu'il faut faire l'AG [NDLR Assemblée générale], il faut présenter le bilan, le rapport d'activité, faire un budget. Elles sont confrontées à cela et le retard de dépôt des pièces peut-être dû à ça.
Marie-Eva Levert
Effectivement, ertaines ligues ne donnent pas les documents et cela empêche de toucher le solde des subventions. Nous ne savons pas qu'elles sont les ligues qui sont concernées.
René Méril, président du Comité Territorial Olympique et Sportif de la Martinique (CTOSMa)
Je suis solidaire des ligues et comités qui n'ont pas reçu depuis deux ans leur subvention. La vie associative est un maillon fort de notre société. Il est important de ne pas casser cette dynamique qui existe sur tout le territoire.
Alfred Céphise
En effet, ces retards ne sont pas sans conséquence sur les activités sportives.
"Si l'enfant fait un temps qualificatif pour les championnats de France, vous avez du mal à lui dire qu'il n'ira pas". Marie-Eva Levert, présidente de l'association Schœlcher natation 2000, résume tout le paradoxe de la situation.
La CTM verse, cela est très bien. Cela va permettre de souffler un peu. Mais pour pouvoir tenir depuis deux ans, cela signifie que les ligues ont mangé tout leur fonds de roulement ou elles ont annulé des choses. Quand l'argent va tomber, ça va permettre de renflouer et de revenir à flot. Mais il s'agit des subventions de 2023. Les subventions de la saison en cours ne sont même pas encore passées en commission. Le budget de la CTM a été voté. Mais pour savoir combien seront attribués aux clubs, il faut que cela passe en commission. Elles ne sont pas encore programmées alors que notre année sportive est terminée. Nous arrivons en mai le mois prochain, les équipes partent pour le Championnat de France. Toute l'année 2024 a été financée par un découvert bancaire.
René Méril, président du CTOSMa
Sur ce point, la collectivité se veut rassurante et indique que "tout est mis en œuvre pour accompagner au mieux le monde sportif dans le cadre des demandes de subventions concernant la saison en cours".
Le président s'attriste que la Martinique soit le dernier territoire français en nombre de licenciés sportifs. Il tente tout de même de proposer des solutions.
Pour toutes les ligues qui ne fournissent pas les documents, il faudrait voir avec la collectivité comment nous pouvons les accompagner et ce que nous pouvons faire pour leur permettre de toucher leurs subventions. Pour celles qui sont à jour, comment nous pouvons rattraper cette année. Parce que nous devrions recevoir les subventions de 2024 en juillet. Comment allons-nous commencer la nouvelle saison ? Nous allons tenter de trouver une organisation plus souple afin de mieux accompagner les ligues. Il faut également penser à d'autres financements que la CTM, mais cela demande des ressources que n'ont pas forcément toutes les ligues.
René Méril
Face à l'augmentation des prix des billets d'avion ou de l'hébergement, associations, clubs et parents de sportifs n'ont pas d'autres choix que de mettre la main un peu plus à la poche afin de contribuer à l'épanouissement de la jeunesse martiniquaise.