L' Alzheimer, un combat de tous les jours. Une Mahoraise Anlli Sittina et Assoumani Darioucche, ainsi que Abdourraquib Andjib, expliquent comment ils se battent au quotidien pour aider leurs parents respectifs atteints de cette maladie pour laquelle il n' existe aucun traitement curatif
Je m'appelle Anli Sitina. Je viens d’Accoua, j'ai une mère touchée par cette maladie l'Alzheimer.
" On en souffre en famille mais on vit avec. C'est ça qui m’a fait adhérer à l’Association Mayotte Alzheimer. Quand j'ai vu ma mère atteinte de cette maladie, au début, on cherchait comment la guérir mais finalement, on sait que c'est une maladie à vie, ça ne se guérit pas mais on peut accompagner la malade et l’apaiser, c'est pourquoi, j’ai adhéré à l’Association Mayotte Alzheimer et comme tout le monde en a peur et ne veut pas en parler, je suis là pour relever le défi."
Comment vous avez commencé à constater quelque chose d’anormal chez votre maman ?
" Nous ne connaissions pas cette maladie, on en entendait parler en métropole mais on n' en connaissait pas les symptômes. Au début, ma mère a commencé à oublier où elle a déposé telle ou telle chose, elle donne à quelqu'un et elle oublie. Je n’étais pas là, j’étais en métropole, ma sœur qui était à Mayotte m’a signalé que maman mélangeait tout, elle oubliait de rentrer chez elle...
J'ai décidé de revenir à Mayotte. Quand je suis arrivée, j’ai été choquée de voir ma mère dans cet état, j’ai pleuré. Elle ne se souvenait pas de mon nom. Quand on lui demandait les noms de son fils ou de sa fille, elle donnait d’autres noms. Quand elle était seule, elle parlait toute seule et disait
n' importe quoi et son élocution était perturbée, ça nous a vraiment fait souffrir, mes sœurs, mes frères et moi. On a été voir le médecin pour des examens et on nous a signalé que c'est un début d’Alzheimer. Au fur et à mesure qu'on avançait, on a vu qu’elle perdait vraiment sa mémoire. Maintenant, elle n’arrive pas à dire son propre nom. Même pour manger, elle ne sait pas dire qu’elle a faim, elle ne peut plus dire qu’elle veut manger, elle ne sait pas dire qu’elle veut aller faire ses besoins."
Suite aux informations que je reçois de l’Association Mayotte Alzheimer ou des réunions avec les autres associations, j’ai fini par constater que c’était vraiment l’Alzheimer.
" Nous rencontrons beaucoup de difficultés pour nous occuper de nos mères malades. Quand nous allons au boulot, les aides familiaux n’ont que 2 ou 3 heures par jour pour s'occuper d’elles. Nous avons beaucoup de difficultés à ce niveau. Ca finit par nous mettre les nerfs à vif ?
N’eut été l’amour d'une maman de la part de sa fille, ça doit être pénible? Moi, ce que je dis, pour
l' amour que j' ai envers ma mère, je ne suis pas fatiguée, au contraire, je suis très motivée de rester avec elle mais seulement, il y a des moments où je dois souffler en m' occupant aussi des enfants, en allant au travail. Quand je ne suis pas à la maison, je ne cesse de penser à ma mère. Quand vous dîtes aussi que c'est fatiguant, si on veut être fatigué, c'est fatiguant, si on ne veut pas être fatigué, ce n’est pas fatiguant. Quelqu'un qui n’a pas de patience, de tolérance, se dit fatigué. Mais si on dit que c'est ma mère, c'est mon devoir de m’occuper d'elle car elle m’avait élevé avant tout et que c'est mon tour de m’occuper d’elle, là on n'est jamais fatigué.
Si on sait que chaque jour, l’amour envers une mère est quelque chose qui est rare, on est toujours là pour elle. C’est comme ça que je conçois l'amour pour une mère et aider une mère, c'est vraiment une passion pour moi de rester avec ma mère, de garder ma mère avec moi, de la chérir pendant toute la durée de sa vie."
Je voudrais ajouter pour terminer qu'il ne faut pas avoir honte de cette maladie ni la cacher.
" Quand on est à bout de souffle, il faut parler de ses soucis avec les autres, notamment au sein de la famille, afin de puiser du courage. Il ne faut pas avoir honte de son parent, de sa maman atteinte, de la maladie d’Alzheimer. Tout le monde doit prendre conscience qu'il ne faut pas cacher cette maladie."
Témoignage d' Assoumani Darouèche.
" Je voudrais compléter par un conseil à toute personne ou à toute famille : L'Alzheimer est une maladie qui peut arriver à n'importe qui... Je conseille à toute personne de se rapprocher de l’association Mayotte Alzheimer. C'est une maladie dont il faut vraiment tenir compte. Personne n’est à l' abri de cette pathologie, ça peut arriver à n' importe qui, à n’ importe quel moment. Il ne faut pas la sous-estimer. "
Au mois de septembre de l’année dernière 2016, lors d’une mission à Paris, il y avait la célébration de la Journée Mondiale de l’Alzheimer, c'était au château de Vincennes, j’ai suivi plusieurs communications et je me suis rendu compte qu’à Mayotte, nous avions beaucoup de manques par rapport à ce qui peut être fait en métropole. Je suis sûr qu’à Mayotte ici, il y a beaucoup de familles qui sont dans cette situation , ils se débrouillent avec les moyens de bord.
Là-bas, j’ai vu dans des stands qu'il existe des accessoires pour les malades d’ Alzheimer . Pour eux, même manger, ils oublient, ils ne savent plus qu’il faut manger, donc, il y a des accessoires spécifiques que j’ai vus qui sont utilisés pour leur rappeler de s’alimenter ... "