4 mai 1989: Maré, Hienghène et Ouvéa s'apprêtent à commémorer

En haut, Yeiwene Yeiwene, Jean-Marie Tjibaou et Léopold Joredie en juillet 1988. En bas à gauche, Djubelly Wea interviewé sur Antenne 2 fin 1988. En bas à droite, la plaque posée à Tiendanite après la réconciliation de 2004.
Samedi, cela fera trente ans que Jean-Marie Tjibaou et Yeiwene Yeiwene ont été tués à Ouvéa par Djubelly Wea, qui a été lui-même abattu. A la veille du trentième anniversaire de ce jour historique en Calédonie, les régions d'origine des trois hommes terminent les préparatifs des commémorations.
La date du 4 mai 1989 a marqué à jamais l’histoire de la Calédonie. Ce jour-là, à Ouvéa, la chefferie de Wadrilla accueille la cérémonie de levée de deuil des dix-neufs habitants de l’île tués lors de l’assaut de la grotte de Gossannah. Une page sombre que La1ere.fr décryptait l'an dernier, dans ce dossier. 

Tension

Jean-Marie Tjibaou, Yeiwene Yeiwene et Léopold Joredie, les trois leaders du FLNKS, tiennent à honorer leur mémoire malgré les risques qui pèsent déjà sur leur propre sécurité. Un an après la double tragédie d’Ouvéa, la tension est palpable, lors de cette cérémonie. Mais les coutumes de levée de deuil se passent normalement. Jusqu’au moment où les personnes présentes viennent serrer la main des leaders indépendantistes.
 
Yeiwene Yeiwene et Jean-Marie Tjibaou, les dirigeants du front indépendantiste FLNKS, en avril 1985.
 

Soudain, les tirs

C’est alors que Djubelly Wea sort une arme de son panier. Il est de la tribu de Gossannah et membre du FULK, ou Front uni de libération kanak. Un mouvement indépendantiste dur en rupture avec le FLNKS de l’époque. Il tire en direction de Yeiwene Yeiwene et Jean-Marie Tjibaou. Les deux hommes sont pratiquement tués sur le coup. Djubelly Wea est immédiatement abattu par Daniel Fisdiepas, le garde du corps personnel de Jean-Marie Tjibaou (et futur maire de Hienghène), qui sauve du même coup Léopold Joredie, semble-t-il visé lui aussi.
 
Yeiweine Yeiweine, Jean-Marie Tjibaou, Jacques Lafleur et Dick Ukeiwé, le 26 juin 1988, après la signature à Matignon d'un accord sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie conclu avec le Premier ministre, Michel Rocard.
 

Le politique vu par les enfants

Jean-Marie Tjibaou, premier président du FLNKS, a payé de sa vie son choix pour la paix, la signature des accords de Matignon et la poignée de main symbolique avec Jacques Lafleur. Trente ans après, quelle image les plus jeunes gardent-ils de cet homme politique, qui a porté la revendication kanak au plus haut niveau avant de perdre la vie à 53 ans ?
Marguerite Poigoune a tendu son micro aux enfants de Hienghène (photo: Rémy Moyen / AFP).
 

«On est des orphelins»

A Hienghène, on se souvient de l’enfant du pays en tant qu’homme politique, bien sûr, mais aussi en tant que père.
Cédrick Wakahugnème a rencontré Pascal Tjibaou, le benjamin de ses enfants. 

« Des frères jumeaux»

Jean-Marie Tjibaou et Yeiwene Yeiwene, tombés ensemble, étaient inséparables, rappelle Hamid Mokkadem. Le philosophe est l’auteur du livre Yeiwene Yeiwene, construction et révolution de Kanaky-Nouvelle-Calédonie.
Des propos recueillis par Antoine Le Tenneur. 

Recueillement annuel

Le 4 mai 1989 est marqué tous les ans, à Tiendanite, avec une prière et des témoignages. De même que l’embuscade de Wan'yaat est rappelée chaque 5 décembre, sur la route qui mène à la tribu. Là où dix Kanak, dont deux frères de Jean-Marie Tjibaou, ont été tués par des anti-indépendantistes le 5 décembre 1984. Mais cette année, les deux épisodes historiques seront commémorés ensemble.
 
A la tribu de Tiendanite.
 

Sculpture à Wan'yaat

Le site où se trouvent les carcasses des camionnettes attaquées a été réaménagé. Une sculpture confiée à l’artiste Jean-Marie Ganeval a été montée sur place. Les travaux, qui ont duré un an, ont été menés par la mairie de Hienghène. En partenariat avec la tribu de Tiendanite, qui souhaitait depuis longtemps l’aménagement du lieu. Inauguration ce samedi 4 mai, avec une bénédiction de l’endroit, à 10h30.
Le reportage de Marguerite Poigoune. 

Coupe Tjibaou au stade municipal

La coupe Tjibaou s’inscrit aussi dans le devoir de mémoire et l’effort de réappropriation qui est mené à Hienghène, avec un aspect culturel et historique qui va au-délà des rencontres sportives. L’édition 2019, qui a commencé mercredi et se poursuit ce week-end, a été décalée exprès pour coïncider avec le trentième anniversaire. 

Un slogan choisi par les écoliers

L'école publique du village a travaillé sur le choix du slogan qui marque cette année les célébrations. C'est une citation de Jean-Marie Tjibaou: «Aider les gens à être au mieux de ce qu'ils pourraient être.» 
Le reportage de Cédrick Wakahugnème.  

Quinze ans après, la réconciliation

Après le drame, se souvenir ne suffisait pas. Pour continuer à vivre, il a fallu aller au-delà. Casser le mur qui s'était érigé entre Ouvéa, Maré et Hienghène. Une profonde douleur, un rejet, une haine. De longues années ont été nécessaires, mais le 17 juillet 2004, près de quinze ans après, les familles se sont retrouvées à Tiendanite.
 
Dans «Tjibaou, le pardon», l'étreinte entre les veuves de Jean-Marie Tjibaou et Djubelly Wea.
 

Les mots de Maki Wea

Une leçon d'humanité, un pardon offert et accepté, une autre page d'histoire de la Calédonie symbolisée par ces quelques mots: «Crainte et humilité précèdent mes propos.» Ils ont été prononcés à Tiendanite par Maki Wea, le frère de Djubelly.
Ecoutez l'extrait du documentaire Tjibaou, le pardon. On y entend aussi Emmanuel Tjibaou, l'un des fils de Jean-Marie.
 

La commémoration à Ouvéa

Ce week-end, Ouvéa aussi vivra au rythme des commémorations, en mémoire de ce qui s'est passé le 4 mai 1989, et le 5 mai 1988. 
Les explications de Sylvie Hmeun. 

Dès vendredi soir à Maré

Une délégation d'Ouvéa a pris vendredi un avion spécialement affrété pour Maré, pour participer au trentième anniversaire de la mort de Yeiwéné Yeiwéné. Le Si Nengone avait 45 ans.
Ecoutez le témoignage de son jeune frère, Buama Yeiwene, au micro de Jeannette Peteisi.
 

Délégation d'artistes

Les célébrations devaient débuter ce vendredi, à 17 heures, au centre culturel Yeiwene Yeiwene. Et durer jusqu'à dimanche soir. Dans la journée, plus de 150 artistes ont débarqué du Betico pour y participer.
Le reportage de Nadine Goapana et Michel Bouilliez 
Un trentième anniversaire à retrouver sur toutes nos antennes.​​​