Australie : la tentation du vote électronique

Le dépouillement des bulletins de vote continue en Australie. Deux circonscriptions attendent toujours leur vainqueur, dix jours après les élections. C'est trop lent, estiment le Premier ministre et le chef de file de l'opposition, qui plaident pour la mise en place du vote électronique.
 C'est Bill Shorten, le chef de file des Travaillistes qui a mis fin au suspense dimanche dernier, soit huit jours après le scrutin : il a félicité Malcolm Turnbull pour sa réélection. À ce moment-là, la coalition libérale-nationale n'avaient remporté que 74 sièges, pas assez pour former un gouvernement majoritaire. 
 
On sait que le système de vote est complexe en Australie, mais pour Bill Shorten, on devrait être capable de connaître les résultats plus rapidement :
 
« Il est grand temps de songer à mettre en place le vote électronique dans ce pays. On ne peut pas se permettre de laisser notre nation à la dérive pendant huit jours. Je ne conteste pas le professionnalisme de la commission électorale, mais on est au XXIe siècle, on est une grande démocratie, on devrait être capable de savoir plus rapidement qui a gagné et qui a perdu. »
 
Bill Shorten a immédiatement reçu l'appui de Malcolm Turnbull. Le Premier ministre souhaite, lui aussi, une réforme du système électoral :
 
« Je suis partisan du vote électronique depuis longtemps. C'est effectivement quelque chose que l'on doit vraiment envisager. »
 
L'idée est donc soutenue par les deux principaux hommes politiques du pays, mais qu'en est-il des experts en technologie ? David Glance dirige le Centre sur les logiciels au sein de l'université d'Australie occidentale. Il se dit « frustré » de voir que le dépouillement prend autant de temps et estime que le vote électronique aurait permis d'avoir des résultats fiables en l'espace de « quelques minutes ». Pour lui, il est donc grand temps de s'y mettre :
 
« Ça pourrait se faire, par exemple, en remplaçant uniquement le vote par correspondance par le vote électronique. Les gens s'habitueraient ainsi à l'idée et seraient rassurés de voir que cela ne crée aucune catastrophe, et ensuite, on pourrait élargir ce vote électronique. »
 
Selon lui, si la technologie actuelle est suffisamment sûre pour permettre des transactions financières à grande échelle, alors elle peut permettre de délivrer des résultats électoraux en toute sécurité.
 
Ce n'est pas l'avis de Vanessa Teague, de l'université de Melbourne. Elle a travaillé sur le système de vote électronique mis en place ces dernières années pour des élections locales en Nouvelle-Galles-du-Sud et rappelle que cela a posé des problèmes :
 
« En 2011, le logiciel a buggé, et une partie des votes a été mal enregistrée. En 2015, on a trouvé une faille sécuritaire, on a montré qu'il était possible de modifier le vote de quelqu'un avant qu'il ne soit pris en compte par la commission électorale. Environ 66 000 personnes avaient voté avant que le problème ne soit réglé et on ne sait pas si cette faille a été exploitée ou non. Avec le vote électronique, c'est vraiment difficile de savoir si ce sont les bons résultats qui sont enregistrés. »
 
Tout changement devra passer par la commission électorale. Et comme le fait remarquer l'un de ses responsables, Phil Diak, la commission fera « ce que le Parlement lui demandera de faire ».