Ce jeudi 28 décembre, c'était la dernière séance publique de l'année du Congrès de la Nouvelle-Calédonie et le programme était dense : contrats de développement avec l'Etat, mais aussi la seconde lecture de la taxe sur les produits sucrés et un volet majeur de la réforme fiscale, celui de l'impôt sur le revenu.
Les contrats de développement
Avant de se pencher sur la taxe sur les produits sucrés, il y a eu de vifs échanges en matinée dans l'hémicycle autour des contrats de développement, et notamment sur le taux d'exécution, c'est-à-dire l'argent réellement dépensé pour financer les projets portés par ces contrats, qui a soulevé de nombreuses interrogations.
Il est en effet de seulement 36%, contre plus de 90% pour les contrats concernant les provinces. "C'est tout simplement de l'argent qui est voté, budgeté, puis gelé", a fait remarquer au gouvernement Sonia Backès, tandis que Philippe Dunoyer a formulé le vœu que "l'amélioration de ce taux d'exécution par le gouvernement soit une priorité pour cette nouvelle génération de contrats", d'autant qu'ils sont signés pour la période 2024-2027, soit quatre ans au lieu de cinq habituellement. "Tout retard dans le démarrage des projets sera donc, selon le député, particulièrement pénalisant."
La délibération finale a bien sûr été adoptée, par 51 voix pour et une abstention, elle ne fait pas débat. Elle prévoit au total une enveloppe de 8,3 milliards de francs, dont 80% à la charge de l'Etat, pour des projets variés.
>> Le prochain contrat Etat / Nouvelle-Calédonie présenté ici
Onze opérations sont inscrites au nouveau contrat
- Construction du nouvel ouvrage de franchissement de la Tontouta RT1 (2,4 milliards de francs)
- Construction du nouvel ouvrage d'accès à la presqu'île de Nouville (800 millions)
- Requalification et viabilisation du site de Gaston-Bourret tranche 2 (réseaux et voiries) (400 millions)
- Projet d'unité médico-légale hospitalière au CHT (300 millions)
- Construction d'un centre d'accueil médico-social Iamele handicap (245 millions)
- Requalification du site sportif Numa-Daly de Magenta (750 millions)
- Rénovation du centre culturel Tjibaou phase 2 (400 millions)
- Restructuration de l'internat du lycée de Touho (500 millions)
- Reconstruction du réfectoire et de l'internat du lycée Lapérouse (950 millions)
- Sécurisation du barrage de la Dumbéa phase 2 (400 millions)
- Installation de radars météorologiques phase 2 (850 millions).
Sur ces opérations, le taux de l’intervention de l’Etat est porté à 68%.
Soutien à la recherche
Dans le cadre de la lutte contre les effets du dérèglement climatique, certaines opérations dans le domaine de la recherche bénéficieront d’un soutien accru :
- IAC « acquisitions de nouveaux équipements scientifiques » (45 millions, dont Etat : 80%)
- IAC « évolution des installations et équipements techniques et agricoles vers l’agroécologie » (90 millions, dont Etat : 80%)
- IAC « développement de solutions numériques » (15 millions, dont Etat : 68 %)
- CRESICA « acquisitions de nouveaux équipements scientifiques structurants » (78,7 millions, dont Etat : 80%)
- UNC « vallée des sciences de Nouville - infrastructures de recherche - Blue et green tech » (310 millions, dont Etat : 100%).
La taxe sur les produits sucrés
C'est ensuite un texte controversé, dont le Rassemblement et les Loyalistes contestaient l'utilité, qui a été confirmé le matin en seconde lecture : la loi du pays instituant une taxe sur certains produits alimentaires contenant du sucre. Le texte a été adopté à la majorité, 31 voix pour 18 contre et 2 abstentions.
Un amendement porté par Philippe Dunoyer (Calédonie ensemble) a ajouté une obligation pour l'Agence sanitaire et sociale d'utiliser cette recette pour des actions de prévention.
La taxe concernera les produits suivants : boissons contenant du sucre, ajouté ou non, boissons lactées contenant du sucre, préparations, concentrées ou déshydratées, permettant la reconstitution de boissons contenant du sucre, crèmes glacées et sorbets, confiseries constituant des « sucreries sans cacao (y compris le chocolat blanc) » au sens du tarif des douanes, chocolat et autres préparations alimentaires contenant du cacao, sauces et sauces préparées, préparations alimentaires à base de céréales additionnées de sucre, produits de boulangerie, de la pâtisserie ou de biscuiterie industriels, sucre à l’état solide ou en sirop et les mélasses résultant de l’extraction ou du raffinage du sucre.
La taxe sera due par les importateurs ou les transformateurs et son montant sera fixé par le Congrès.
Le gouvernement justifie cette taxe par le nombre d'adultes bénéficiant d'une couverture longue maladie à la suite d'un diagnostic de diabète : il est passé de 2 548 personnes en 1996 à 15 495 en 2022.
La réforme de l'impôt reportée
L'après-midi, un autre texte polémique devait être étudié par les élus : la réforme de l'impôt sur le revenu.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, ils ont d'abord adopté un projet de loi du pays portant diverses dispositions d'ordre fiscal. Un texte qui sert à régler des questions importantes, mais techniques, et à supprimer par exemple, des articles obsolètes.
Le projet de loi du pays sur la réforme de l'impôt, lui a finalement été renvoyé en commission à l'unanimité des groupes afin de poursuivre les discussions.
"La réforme de l'impôt sur le revenu qui nous est proposée suscite des profondes oppositions entre les différents groupes politiques, à la fois sur la réforme du barème de l'impôt sur le revenu et sur l'intégration des dividendes. Et comme ce texte ne concernera que les impôts qui seront payés en 2025 sur les revenus de 2024, on a le temps de rechercher un accord et un consensus sur ce sujet. C'est ce qu'on va s'efforcer de faire", a expliqué Philippe Michel (Calédonie ensemble) qui s'exprimait pour l'ensemble des formations de l'hémicycle.
On a le temps de rechercher un accord et un consensus sur ce sujet. C'est ce qu'on va s'efforcer de faire.
Philippe Michel, Calédonie ensemble
"Cette loi ne doit s'appliquer qu'à compter de 2025, abonde Gilbert Tyuienon, en charge de la fiscalité à l'exécutif. Autrement dit, on a le temps de bonifier le texte et de travailler sur les trois aspects qui semblent poser problème pour les uns et les autres. À savoir comment réajuster les barèmes de la progressivité des impôts ? Quelles sont les charges qu'on va déduire ou non et surtout, cette question essentielle de l'intégration ou pas, et à quel niveau des dividendes dans l'IRPP? Parce que je rappelle simplement qu'aujourd'hui l'impôt sur le revenu est payé par les seuls revenus salariés. L'idée du gouvernement, c'était d'y introduire les revenus financiers, les dividendes. Et aussi tout ce qu'il est avance en compte courant associé dans les entreprises."
Aujourd'hui l'impôt sur le revenu est payé par les seuls revenus salariés. L'idée du gouvernement, c'était d'y introduire les revenus financiers, les dividendes
Gilbert Tyuienon, en charge de la fiscalité au gouvernement
Mercredi, le Rassemblement et les Loyalistes, qui sont vent debout contre ce texte, ont annoncé qu'ils le combattraient à coups d'amendements et de demandes de seconde lecture. Pour l'opposition, cette réforme relève du "matraquage fiscal qui conduira à la fuite des investisseurs".
Le gouvernement parle, lui, d'un texte destiné à "rétablir la justice sociale" via, notamment, un nouveau barème de l'impôt et l'intégration des dividendes perçus dans le calcul de l'impôt.