C’est emmitouflées dans du papier bulle que les 27 statuettes sont arrivées sur le Caillou, après un peu plus de 24 heures de vol. Elles sont le don de Philippe Collin, petit-fils d’un ancien médecin pénitentiaire de 1910 à 1914, à l’époque du bagne. "On doit faire passer les idées, les récits, mais aussi les objets, parce qu'ils sont chargés de mémoire et d'informations."
Ces personnages, qui témoignent de scènes de vie au sein de la société kanak, ont été façonnées par Alexandre Gérard, condamné à la déportation à l’Ile des Pins, puis aux travaux forcés au bagne de l’île Nou. Les montrer, "c'est redonner la parole à Gérard, qui est un bagnard parmi d'autres, pour Philippe Collin. La plus grande des hantises de ces hommes qui sont déportés, transportés, relégués, c'est d'être oubliés."
Patrimoine calédonien dispersé
Des œuvres en terre séchée hautes d’une dizaine de centimètres, dont l’état de conservation impressionne. "Il s'agit d'une série de petites statuettes représentant des kanak dans diverses attitudes. Elles ont été faites par un condamné au bagne, ça signifie qu'elles s'intègrent dans un circuit qu'on appelle la débrouille, explique Louis Lagarde, maître de conférences en archéologie à l’université. Ces cameloteurs fabriquaient de petits objets pour les vendre et améliorer leur ordinaire."
Des témoins de l’histoire modelée il y a près 110 ans. "Les pigments, les couleurs, les traits des visages : tout est parfait. C'est un don inestimable pour le patrimoine calédonien", selon Yves Mermoud, le vice-président de l'association Témoignage d’un passé. Vous pourrez les découvrir ce samedi sur le site historique de l'île Nou, et à l’occasion du Calédonia Festival la semaine prochaine, au Centre culturel Tjibaou.
Le reportage d'Alix Madec