Les Iles Salomon, situées à 1 800 kilomètres au nord-ouest de la Nouvelle-Calédonie, ont été secouées fin 2021 par des émeutes meurtrières alimentées par le ressentiment d'une partie de la population contre l'influence grandissante de la Chine.
Pékin, qui avait envoyé instructeurs de police et matériel anti-émeutes, cherchait depuis à renforcer son dispositif de protection sur l'île. Le mois dernier, une version préliminaire de l'accord entre la Chine et les îles Salomon avait fuité.
Le document avait provoqué une onde de choc en Australie, car il comprenait des propositions autorisant des déploiements policiers et navals chinois dans l'archipel. Canberra et Washington s'inquiètent depuis longtemps de la possibilité que la Chine construise une base navale dans le Pacifique Sud, ce qui lui permettrait de projeter sa puissance maritime bien au-delà de ses frontières.
"Coopération normale"
Manasseh Sogavare, Premier ministre des Salomon, avait confirmé le mois dernier qu'un accord en matière de sécurité avec Pékin était bien en préparation, mais démenti tout projet de construction d'une base navale.
"Les ministres des Affaires étrangères de la Chine et des Iles Salomon ont récemment signé l'accord-cadre de coopération en matière de sécurité", a affirmé mardi devant la presse un porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin.
Il s'agit d'une coopération "normale entre deux pays souverains et indépendants", s'est défendu M. Wang. L'accord permettra de soutenir "la stabilité à long terme" des Iles Salomon, a-t-il argué.
Ces dernières semaines, l'Australie et les Etats-Unis ont multiplié les efforts diplomatiques pour dissuader les Iles Salomon de se rapprocher de Pékin. "Nous pensons que la signature d'un tel accord risquerait d'accroître la déstabilisation au sein des Iles Salomon et de créer un précédent inquiétant pour la région des îles du Pacifique dans son ensemble", a estimé lundi le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.
Dans la foulée, les Etats-Unis ont annoncé l'envoi d'une délégation diplomatique de haut niveau pour une tournée dans le Pacifique, avec les Salomon comme priorité pour contrer les ambitions de Pékin.
La semaine dernière déjà, le ministre australien du Pacifique, Zed Seselja, avait été dépêché à Honiara pour une réunion inhabituelle avec le Premier ministre des îles Salomon.
Rivalité avec Taïwan
Il était aussi reproché au Premier ministre Manasseh Sogarave de vouloir forger des liens plus étroits avec Pékin après avoir brusquement rompu en 2019 les relations de longue date avec Taïwan.
La Chine s'oppose à toute reconnaissance diplomatique de Taïwan, qu'elle considère comme faisant partie de son propre territoire. Le gouvernement communiste de Pékin en fait un prérequis pour l'établissement de relations diplomatiques avec d'autres pays.
Au moment où Washington cherche à renforcer sa présence dans la région pour contrer l'influence chinoise, les Etats-Unis avaient annoncé en février rouvrir une ambassade aux Iles Salomon, après 29 ans de fermeture.
Ce mardi 19 avril, la Chine a donc indiqué avoir signé un vaste accord de sécurité avec les Iles Salomon, au moment où plusieurs pays occidentaux, États-Unis en tête, prêtent à Pékin des ambitions militaires dans le Pacifique, relate l'AFP. La Chine vient de marquer un point.
A l'image des îles Salomon, Kiribati a également rompu ses relations diplomatiques avec Taïwan en 2019 pour en établir avec la Chine. Quatre pays d'Océanie, sur treize au total, ainsi que le Vatican, sont toujours diplomatiquement liés avec Taïwan (et donc pas avec Pékin) : Nauru, Palau, les îles Marshall et Tuvalu.