Nouvel épisode dans le bras de fer qui oppose la province Sud, aux associations environnementales EPLP et Sea Shepherd, concernant la capture et l’euthanasie des requins.
Dans une décision rendue le 17 mars dernier, la Cour administrative d’appel de Paris a saisi le Conseil d’Etat. Elle considère que le recours d’EPLP, qui attaque la décision de la province Sud de prélever les squales, soulève une question de droit nouvelle, sur les compétences de la province Sud en la matière.
Qui est compétent ?
C’est en juin 2020, après l’attaque d’un windsurfeur sur le récif Ricaudy, que la province Sud prend un arrêté permettant la capture et l’euthanasie de requins tigres et bouledogues. Une décision, attaquée par l’association Ensemble Pour La Planète, déboutée une première fois par le tribunal administratif, le 11 mars 2021. Cette fois-ci, c’est la cour administrative d’Appel saisie, qui s’est penchée sur la question. Si elle ne s’est pas encore prononcée sur le fond, elle a annulé le jugement de première instance.
« Les demandeurs, en exposant que des mesures de destruction des individus d'une espèce marine susceptibles de se déplacer sur de grandes distances, comme les squales, pouvaient relever tant de la compétence de la Nouvelle-Calédonie que de celle des provinces, ont soulevé une question de répartition de compétence jamais tranchée par la jurisprudence et non dépourvue de caractère sérieux, eu égard à l'obligation générale de protection de l'environnement marin qui incombe à la Nouvelle-Calédonie et aux provinces en vertu de la Constitution et des engagements internationaux conclus par la France », précise la Cour administrative d’appel de Paris, dans sa décision du 17 mars dernier.
« Le tribunal administratif a ainsi méconnu son office, et le jugement attaqué, entaché d'irrégularité, doit donc être annulé ».
La présidente de la province Sud a-t-elle donc pu, légalement, prendre ces mesures de prélèvement et d’euthanasie de requins ? Ou étais-ce une compétence du gouvernement ?
Trois mois pour rendre son avis
La juridiction a pris un « surseoir à statuer », soit un report du jugement en attendant la réponse du Conseil d’Etat. « Il s'ensuit qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur les conclusions de l'association Ensemble Pour La Planète jusqu'à la notification de l'avis du Conseil d'État ou, à défaut, jusqu'à l'expiration du délai de trois mois prévu à l'article 205 de la loi organique du 19 mars 1999 », peut-on lire dans la décision de la Cour administrative d’appel de Paris.
La question est posée, telle quelle, au Conseil d’Etat : « Au regard des règles de compétences déterminées par les articles 20, 22 (10°) et 46 de la loi organique du 19 mars 1999, les provinces sont-elles compétentes et, le cas échéant, dans quelles conditions, en matière de destruction des individus appartenant à des espèces marines protégées susceptibles de se déplacer indifféremment dans la zone économique exclusive et dans les eaux de la mer territoriale ? ».
La plus haute juridiction a trois mois pour adresser un avis à la Cour sur la question.