Les questions de desserte maritime n'en finissent pas d'émerger

Nouvelle mobilisation de salariés du "Betico", à Nouméa, le 18 janvier 2024.
Le transport maritime des passagers entre la Grande terre et les îles au cœur de l’actualité. Après l’annonce d’un prochain recours au privé pour assurer cette desserte, le personnel du "Betico" continue à manifester son inquiétude. En parallèle, la Compagnie maritime des îles effectue une tournée d’information pour présenter ses projets. Le sujet s’est aussi invité ce jeudi au Congrès.

"Les salariés de Sudîles craignent de perdre leurs emplois suite à l’annonce de l’arrêt de l’activité du Betico 2". C'est le titre de la lettre que le personnel de la société comptait envoyer aux élus de la province des Loyauté, et à sa déclinaison économique qu'est la Sodil. 

Mobilisations pour le "Betico"

Elle fait référence, encore une fois, aux propos tenus par le président Jacques Lalié, mardi 9 janvier, sur NC la 1ère. Revoir le modèle de desserte maritime en misant sur le privé ? Les employés du Betico ont réagi en se mobilisant, jeudi 11 ou encore ce jeudi 18, aussi bien à Nouméa qu'à Lifou. Une partie d'entre eux ont tenu exprimer leur inquiétude et interpeller les pouvoirs publics. 

Inquiétude à Sudîles

"On a un peu un sentiment d'abandon et du coup, de colère", confiait Pierre Houmaire, capitaine d'armement, interrogé ce matin. Simone Buama, chargée de clientèle au service commercial à Nouméa, disait son incompréhension. “Je suis en relation avec la clientèle depuis trente-et-un ans et j'adore ce métier." Elle a passé quasiment toute sa vie dans le transport maritime de passagers : sur le ferry Président-Yeiwene, le Marie-Hélène, le Betico 1 et désormais le 2. "Les usagers sont très inquiets [à l'idée] qu'on va supprimer le Betico, qu'on va revenir à vingt ans de cela, à l'époque du ferry Président-Yeiwene qui passait des nuits en mer", assurait justement Philippe Alikie, agent à Lifou. 

Leurs interviews par Erik Dufour et Cédric Michaut

©nouvellecaledonie

Après dix-huit ans à l’aéroport de Tontouta, Hervé Kru a rejoint l’équipe de la SAS il y a huit ans. "On n'est pas contre la desserte du Havannah 2", a-t-il assuré au micro de Cédrick Wakahugnème, en citant l'un des navires acquis par la CMI. "C'est au contraire très bien pour la desserte des îles, les gens pourront choisir entre les bateaux. Mais voilà, on avait déjà déposé notre projet pour la rénovation du Betico." 

Visite d'officiels

57 salariés en attente de réponses. À la mi-journée, ceux réunis à Nouméa ont reçu la visite d'élus loyaltiens : Mathias Waneux, conseiller UC qui s'est illustré par son opposition à Jacques Lalié en assemblée de province, Omayra Naisseline de la Dynamique autochtone, Charles Washetine du Palika îles. Mais aussi Hippolyte Sinewami-Htamumu, grand chef du district de La Roche et président du conseil des chefs Inaat ne Kanaky.

Pétition proposée aux usagers

La mobilisation se voulait sans conséquence pour les usagers : il n’y avait pas de rotation, ce jeudi. Des clients sollicités pour signer une pétition de soutien. La lettre ouverte, elle, rappelle que le Betico transporte "700 passagers par jour" lors des périodes de fortes affluences (vacances scolaires, mariages, coutumes, deuil etc.) Et qu'il assure en moyenne 200 rotations par an. 

Réunion sur d'autres projets

Réunion sur les prochains navires de la CMI à desservir les îles, le 18 janvier 2024, au faré provincial de Wé.

Pendant ce temps, la Compagnie maritime des îles effectue une tournée d'information. Ce jeudi après-midi, les représentants de la société étaient à Lifou afin de présenter leurs deux nouveaux navires, annoncés pour 2025. Dont le Havannah 2, ferry mixte de 80 mètres. En construction, il est appelé à transporter jusqu'à 1 900 tonnes de fret et 250 passagers. Mais pas destiné à remplacer le Betico, a-t-il été assuré à l'auditoire. Il doit faire la liaison entre la Grande terre et les Loyauté, y compris Ouvéa. La CMI compte acquérir également un NGV, "navire à grande vitesse", pour desservir l’île des Pins. Le monocoque viendra en renfort du ferry lors de forte affluences. Pour entendre ces informations et poser des questions, il y avait foule, sous le faré provincial de Wé. 

Question au gouvernement

Les problématiques de desserte locale ont aussi été abordées au Congrès, ce jeudi. Dans la matinée, il y avait l'exercice des questions à l'exécutif calédonien. Dont une d'Omayra Naisseline : "Dans un contexte de crise énergétique et de hausse des prix, quelles solutions sont envisagées (financement, gouvernance partagée) par le gouvernement pour pallier [les] difficultés du transport public aérien et maritime ?" Mickaël Forrest a répondu. Il a évoqué, entre autres, le fait de créer un syndicat mixte du transport maritime, pour mutualiser les  collectivités dont les compétences touchent à cette desserte. “Le projet a reçu l’aval de toutes les provinces et du gouvernement et est prêt, a-t-il déclaré. Mais l’opportunité de sa création est aujourd’hui interrogée par la restructuration de l’offre de transport maritime du secteur privé annoncée ces derniers jours.” 

Ajoutons que Jacques Lalié, président de la province Îles, est l'invité politique du dimanche, le 21 janvier, à 19h30.