Ce mardi, Philippe Gomès, Philippe Michel et Martine Lagneau sont convoqués au tribunal pour une audience relais dans le cadre de soupçons d'emplois fictifs. En mai, après presque trois ans d’enquête, la juge d’instruction a considéré "qu’un vaste système d’emplois fictifs, liés à la communauté wallisienne et futunienne, avait été mis au profit du parti Calédonie ensemble” entre 2014 et 2018. Une quarantaine de personnes, employées et rémunérées par la province Sud et le Congrès, auraient en réalité été utilisées pour de la prospection de voix. Face à ces accusations, Philippe Gomès affiche “une sérénité absolue”.
"L’affaire a été relancée pour des raisons politiciennes"
“En 2014, les mêmes faits ont donné lieu à un classement sans suite du procureur, un réquisitoire aux fins de non-lieu de la part du vice-procureur et une ordonnance de non-lieu de la part de deux magistrats. Quatre magistrats ont estimé qu’aucun délit n’avait été commis”, explique le membre fondateur de Calédonie ensemble, député de 2012 à 2022. "L’affaire a été relancée pour des raisons politiciennes”, considère-t-il. En l’occurrence, par un signalement de Sonia Backès.
L’actualité politique de l'élu Calédonie ensemble au Congrès, est quant à elle rythmée par les discussions sur le dégel du corps électoral et sur l’avenir institutionnel. Depuis fin octobre, Calédonie ensemble travaille avec l’Uni et l’UC sur ces questions. “Deux groupes ont décliné l’invitation, les Loyalistes et le Rassemblement", rappelle Philippe Gomès. Objectif : “trouver un consensus global entre les indépendantistes, les non indépendantistes et l'Etat.”
J’ai bon espoir que, dans les prochains jours, on puisse offrir à l’Etat et au peuple calédonien une perspective de sortie de l’Accord qui respecte les convictions de chacun.
Lors de sa visite, Gérald Darmanin a répété que, faute d’accord sur le dégel du corps électoral provincial d’ici fin décembre, l’Etat avancera. Une position logique pour Philippe Gomès. "L'État est dans son rôle : le président de la République doit assurer le fonctionnement régulier des institutions. L’État doit pouvoir organiser les élections provinciales au plus tard le 12 mai 2024.”
Mais, “on sait que dans notre pays, de manière générale, les passages en force, ça ne nous réussit pas trop”, poursuit-il. L’État en aurait conscience. D’où l'attachement à un accord global, lui aussi réaffirmé par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer. Philippe Gomès pense possible d'en présenter un "dans les prochains jours”.
Je pense que les Calédoniens en ont marre des partis politiques qui se tirent dans les pattes alors qu’eux tirent la langue.
“Des choses nous opposent mais des choses nous rassemblent. Ce qui nous rassemble, c’est un plancher et un plafond. Le plancher, c’est celui de l’Accord de Nouméa. Le respecter, c’est respecter les anciens et le Parlement. Le plafond, c’est le peuple calédonien et le peuple calédonien a dit trois fois non à l’indépendance. Entre ce plancher de l’Accord et ce plafond de la souveraineté du peuple calédonien, on doit cheminer pour constituer l’accord qui nous permettra de continuer à vivre ensemble et en paix." Ce cheminement permettra peut-être même à l’UC de revenir à la table des discussions début janvier, lors de la prochaine visite annoncée de Gérald Darmanin, veut croire un Philippe Gomès optimiste.
“Calédoniser” les compétences régaliennes
Concernant le corps électoral, il propose deux conditions. Dix ans de résidence. Et la preuve d'un investissement financier, social et citoyen. “Être citoyen calédonien, c’est dire cette terre, j’y suis et désormais j’y reste."
Comme alternative au transfert de nouvelles compétences, il propose de “calédoniser” les secteurs qui demeurent sous l’autorité de l’Etat en y augmentant le nombre de fonctionnaires calédoniens. Il cite la justice, composée de seulement 19% de Calédoniens, ou encore la gendarmerie et ses 30% d’emploi local.
“Je pense qu’à ce moment de l’histoire, les Calédoniens en ont marre des partis politiques qui se tirent dans les pattes alors qu’eux tirent la langue, sur le pouvoir d’achat, l’emploi, les impôts. A quelques mois des élections provinciales, il faut que, collectivement, on fasse les efforts nécessaires pour offrir au moins la stabilité politique, un horizon politique. Ça ne va pas régler tous les problèmes mais ça nous permettra peut-être d’avancer plus sereinement vers l’avenir.”
Il y a les postures politiciennes et la réalité, c’est comme toujours dans notre pays et d’autres pays.
A propos des exportations de nickel
Optimiste, il semble également l’être sur la capacité des acteurs politiques et économiques à s’entendre sur un plan de sortie de crise pour le nickel. Notamment sur l’autorisation d’exporter le minerai inexploité dans les réserves métallurgiques. À ses yeux, les divergences avec la province Nord relèvent de “postures politiciennes”. Des autorisations attendues par la SLN auraient récemment été délivrées par la province Nord, assure-t-il. Persuadé que, “dans les intérêts des uns et des autres, on arrivera à trouver un équilibre.”
"Eramet doit investir"
Philippe Gomès exhorte par ailleurs l’Etat à “donner des instructions aux actionnaires”. Au moins à Eramet, dont il est actionnaire. “Pourquoi Eramet n’investit pas dans la SLN ? Le groupe a fait 180 milliards de francs de bénéfices l’an dernier. Il va investir 240 milliards à l’échelle de la planète. Et en Nouvelle-Calédonie, rien ? Il y a quand même un petit problème...”