Deux rapports en trois jours, la Chambre territoriale des comptes ne chôme pas en cette période de fêtes. Après s’être intéressée à la commune de Nouméa, la vigie des comptes publics sort un nouveau rapport de sa hotte, cette fois sur la gestion et les finances du Centre hospitalier Gaston-Bourret pour la période 2016-2021.
Une période cruciale pendant laquelle l’un des plus gros investissements du pays de ces dernières années, le Médipôle, a été mis en service. C'était en janvier 2017 à Dumbéa. Sur ce point, la Chambre estime que l’opération a été "réussie", le bâtiment ayant été livré dix mois avant la date prévue. Montant de l’enveloppe : 48 milliards de francs, soit une rallonge de "seulement 4 milliards de francs" par rapport à ce qui était annoncé en 2011.
Mais plusieurs points sont à améliorer sur ce nouvel outil, comme la comptabilité, qui ne lui permet pas actuellement d’étudier l’évolution des coûts de revient des séjours hospitaliers de ces dernières années.
Une gestion des ressources humaines à revoir selon la CTC
La gestion de ces séjours, en revanche, est "bonne", note la chambre. Les patients restent en moyenne 4,5 jours au CHT en 2019 contre 6 jours pour la moyenne nationale.
Le taux d’occupation moyen des lits a cependant baissé de presque 13 % en cinq ans. En 2021, seuls 77 % des 562 lits et places du Médipôle étaient occupés, contre près de 90 % en 2016. La faute à la crise sanitaire, qui a concentré la prise en charge sur les patients du Covid, au détriment d’autres secteurs comme la chirurgie ou la médecine.
La masse salariale, elle, suit la progression du nombre d’entrées : 2 218 postes à temps plein fin 2021, contre 2030 en 2016, soit presque 2 % de plus. Mais la gestion des ressources humaines laisse encore à désirer, selon la CTC. "Le centre hospitalier doit mieux anticiper les départs de ses agents et en particulier les vacances", afin "d’améliorer la continuité et la sécurité des soins".
Côté finances, le résultat de l’établissement en 2021 est excédentaire de 693 millions de francs. Un chiffre qu’il faut prendre toutefois avec précaution car l’hôpital est financé pour plus de la moitié par une dotation annuelle. Or, la CTC observe qu’"entre 2016 et 2021, le volume des journées réalisées n’a progressé que de 0,3 % alors que la dotation annuelle présentait une croissance de 6,6 %". Autrement dit, les financements ont augmenté, sans que l’activité de l’hôpital ne progresse réellement.
Un déficit qui se creuse
Selon la chambre, la santé financière du CHT "se dégrade". Le trou se creuse dans sa trésorerie : il est passé de -419 millions en 2016 à -726 millions de francs en 2021. Une situation qui a conduit l’hôpital à contracter une avance de 1,8 milliard de francs auprès de l’agence sanitaire et sociale, et qu’il n’a toujours pas remboursée "en raison notamment, de l’absence de paiement des créances que détient l’hôpital sur la CAFAT (21,5 milliards de francs), la province des Îles (653 millions de francs) et le centre hospitalier du Nord (520 millions de francs)", précise la CTC.
Autre problème identifié : les factures non payées par les patients, soit près de 2,3 milliards de francs, fin 2021. Le CHT doit mieux former ses agents au recouvrement des impayés, selon la chambre.
Enfin, la CTC met en garde sur des "risques d’irrégularité", en matière de commande publique. Elle encourage le centre hospitalier à "renforcer la sécurité juridique des marchés qu’il passe sans formalisme au-dessous du seuil de 20 millions de francs". Notamment en recensant chaque année ses besoins selon une liste précise de produits et de prestataires. "En son état actuel, l’organisation mise en place dans ce domaine fait courir à l’établissement le risque de commettre des irrégularités, en particulier dans le domaine des achats de matériel biomédical", alerte la Chambre territoriale des comptes.