Ces touristes australiens n’en reviennent pas. A leurs yeux, Nouméa sans les plages, ce n’est plus Nouméa. “C’est plutôt absurde”, lance Max Cameron depuis la baie des Citrons. “On subit des attaques très souvent, en Australie. Ce n’est pas pour autant qu’on va condamner toutes les plages, toute l’année ! C’est fou. Si vous me dites qu’on ne peut plus se baigner, forcément, ce n’est pas sûr que je revienne.”
“Sur la base de la surpopulation de requins”, dit la mairie
Interdit jusqu’au 31 décembre de piquer une tête à la BD, à l’Anse-Vata et sur toutes les autres plages nouméennes, mais aussi à l’île aux Canards ou encore à l’îlot Maître. Cette mesure est nécessaire, défendait jeudi soir le secrétaire général de la mairie. Romain Paireau était l’invité d’une édition spéciale consacrée au risque requin, présentée par Alexandre Rosada (à retrouver ici) : “Le constat : trois attaques en un mois, un mort, une blessée très grave, plusieurs campagnes de prélèvement, 41 squales de grande taille prélevés à proximité des plages, 23 pour la seule semaine dernière. Ce qui montre qu’on a une surpopulation de requins-bouledogues et de requins-tigres à proximité des plages de Nouméa.”
"Les conséquences vont être radicales", craint un professionnel de la restauration
Jean-Claude Da Costa a en charge quatre établissements à la Baie-des-Citrons. Pour lui, une interdiction de baignade sur les plages toute l’année représente une catastrophe. “On attend les clients et c’est la pire des choses qu’on puisse nous annoncer. Si ça continue, les conséquences vont être radicales", pressentait-il avant même qu'on apprenne la publication de l'arrêté municipal. "On n’aura pas le choix mais nos confrères n’auront pas le choix non plus : on va être obligés de stopper des contrats puisque l’après-midi, on n’a plus aucun client.”
Avis partagés des usagers
Du côté des usagers, les avis étaient d'ores et déjà partagés entre ahurissement, frustration et compréhension. “C’est très frustrant de ne pas pouvoir faire ça tous les matins", dit ainsi Marie-Jo Benet, habituée de la BD, "et même pour notre santé, c’est un problème. On ne pensait pas que ça durerait si longtemps.” “Tout à fait d’accord sur le fait que ça nous manque beaucoup mais d’un autre côté, c’est raisonnable”, relativise Gisèle Chauvet.
“Je trouve ça absolument absurde", formule Manon Lafleur. "La mer, c’est mon plus grand amour. Passer devant la mer tous les jours et ne pas pouvoir s’y baigner ou nager, c’est un véritable supplice.” “Par rapport au risque requin, de se faire mordre, c’est préférable”, considère encore Lizzie Xalitre. “Mais pas toute l’année…”
Un reportage de Dave Waheo-Hnasson et Gaël Detcheverry, mis en boîte juste avant qu'on apprenne la publication effective de l'arrêté :
Pour Sonia Lagarde, "le risque zéro n'existe pas"
“Le risque zéro n’existe pas et je ne peux pas sécuriser totalement ces deux baies”, déclarait Sonia Lagarde sur la radio RRB, jeudi 16 mars, en parlant de la baie des Citrons et de l’anse Vata. “J’ai plutôt tendance à dire : je ne réouvre pas tant qu’on n’aura pas véritablement sécurisé ces deux baies, c’est-à-dire, tant qu’on n’aura pas posé des barrières anti-requin. J’ai de grands espoirs pour que d’ici le mois de novembre, voire début décembre, ces deux plages soient totalement sécurisées.”
"Stupéfaction" d'EPLP
Réaction d'Ensemble pour la planète, sous la forme d'un communiqué diffusé ce vendredi et signé Martine Cornaille : "L’humeur générale est à la stupéfaction." Cette décision d'interdire la baignade jusqu'à la fin de l'année est selon EPLP un "nouveau bras d’honneur à la démocratie participative" et un "nouveau manque de respect aux Nouméens et au-delà, aux Calédoniens". L'association insiste : "Quatre ans ! Un temps très largement suffisant pour mettre en place de la surveillance, humaine et technologique, des études, des moyens humains, financiers et réglementaires…"
“Je ne sais pas comment je vais pouvoir rebondir”, s'interroge un loueur de matériel
Côté activités nautiques, NC la 1ère a rencontré les professionnels qui louent du matériel de glisse à l’Anse-Vata. Jamais ils n’auraient imaginé un tel scénario sur le bord de mer. Après la crise Covid, les intempéries de la Niña, les attaques de requins et les travaux d’aménagement, ils confient être à bout de souffle. A l’image de Laurent Gaüzere. Le Calédonien est établi dans son camion blanc, à l’ombre d’un banian, depuis vingt-et-un ans. Il a suspendu son activité de location. “On est énormément impacté, que ce soit les loueurs, les associations.”
"Qui est responsable ?", s'inquiète un autre
Situation tout aussi difficile pour le binôme installé dans un camion orange face à la mer. Plus d’un mois de fermeture. Si les activités nautiques pourront reprendre "à leurs risques et périls", annonce confirmée ce jour, pour Jérôme Guiraud, co-gérant, beaucoup de questions restent en suspens : “C’est bien beau ‘à nos risques et périls’ mais qu’est-ce que ça veut dire dans le fond ? Si je loue un matériel à un touriste et qu’il lui arrive le moindre pépin, qui est responsable ? Moi, la mairie ou est-ce que c’est sa propre responsabilité à lui ? C’est par rapport à ces réponses qu’on va voir si on continue notre activité ou si on est obligés de la suspendre à cause de ce risque requin.”
La province évoque une aide
La province Sud annonce pour sa part qu’un soutien financier d’urgence est en passe d’être attribué pour soutenir la trésorerie de 26 structures concernées par la situation. Selon Gil Brial, deuxième vice-président de l’institution, cette aide à la trésorerie rappelle celle attribuée pendant la crise Covid. Elle pourrait se monter à 1,5 million de francs, selon le chiffre d'affaires.