La deuxième consultation référendaire sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie s'est conclue dimanche sur 53.26 % pour le Non à l'indépendance. Alors que le Oui profite d'une mobilisation historique et atteint 46.74 %. Leçons d'un vote...
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#1. Le Non l'emporte
Le 4 octobre 2020, la Calédonie a majoritairement refusé d’accéder à la pleine souveraineté et à l’indépendance. Un nouveau rejet, près de deux ans après le précédent.A l'époque, le rapport de force (56.7 % pour le Non, 43.3 % pour le Oui) avait été jugé plus serré qu'attendu. Or dimanche, ce Non, qui obtient cette fois 53.26 % des suffrages exprimés, a vu son avance grignotée par la progression de l’autre bulletin.
Analyse globale des résultats avec Yvan Avril :
Référendum 2020, retour sur les résultats
#2. Le Oui réduit l’écart
Le Oui a été choisi à 46.74 %. La victoire du camp loyaliste résonne donc aussi comme un succès pour les indépendantistes, dont la position gagne plus de trois points. L’écart entre les deux réponses à cette délicate question de l’avenir institutionnel se réduit d’environ huit mille voix. De quoi donner l’impression que personne n’a gagné, mais que personne n’a perdu.#3. Participation record
Le terme avait été utilisé en 2018, et voilà qu’il s’avère encore plus d’actualité cette année. La mobilisation des plus de 180 000 électeurs autorisés à voter, c’est-à-dire inscrits sur la liste spéciale pour la consultation, a été historique. La participation au scrutin est montée à 85,69 %, alors qu’elle était déjà de 81,01 % deux ans plus tôt.La journée de vote a déroulé un scénario similaire, fait de files devant les bureaux et d’attente qui s’est parfois comptée en heures. Les référendums motivent décidément bien davantage que les autres scrutins. A travers toute la Calédonie, ou presque, à l’exception, le taux de participation a été à la hausse : au Sud, au Nord et dans la province Îles où 38 % des électeurs avaient boudé les urnes en 2018.
La mobilisation est globale, elle est dans toutes les communes.
- Pierre-Christophe Pantz, docteur en géopolitique
Le point sur la participation avec Loreleï Aubry :
La mobilisation était notamment visible à Nouméa, comme le montre ce reportage de Natacha Lassauce-Cognard et Judith Rostain diffusé dimanche, lors de la soirée électorale :
Les jeunes, notamment, se sont plus mobilisés que d'habitude. C'était le cas à Koumac, comme le montre ce reportage de Martin Charmasson et Louis Perin, diffusé dimanche soir avant les résultats.
#4. En faveur des indépendantistes
La capacité à mobiliser a profité davantage au camp du Oui. C’est vrai dans les provinces traditionnellement indépendantistes. A Koné, le chef-lieu du Nord, ou dans la province Îles où les électeurs de Lifou optent à 86 % pour l’indépendance. C’est aussi le cas dans des fiefs loyalistes comme à Bourail, au Mont-Dore, à Païta, à Dumbéa.Et surtout à Nouméa. Dans la capitale, le Oui n'est majoritaire que dans six bureaux sur 54 et pourtant, il progresse de cinq points.
Le point de Stéphanie Chenais :
Référendum 2020, résultats à Nouméa
Tour d’horizon de Stéphanie Chenais :
Référendum 2020, le vote dans le Grand Nouméa
#5. Un pays clivé
Le rapport de force ne s’est pas inversé. Mais le clivage s’est creusé dans la population, et on retiendra que la Calédonie ne sort pas de ses fractures.Géographique, d’abord : le Nord et les îles choisissent massivement la pleine souveraineté.
La province Sud, elle, reste massivement attachée à un avenir dans la République française. Plus des deux-tiers des habitants ont voté Non.
Pour aller plus loin dans la fracture territoriale, toutes les communes de l’Est on fait le choix majoritaire du Oui. Quand l’Ouest et le Grand Nouméa sont plutôt placées sous le signe du Non.
Le scrutin aura aussi souligné une nouvelle fois des fractures communautaires - entre les Kanak et les autres, mais aussi sociales.
Bref, en deux ans, dans les grande lignes, rien n’a vraiment changé.
L’analyse de Mathieu Ruiz-Barraud :
Référendum 2020, les enseignements
#6. Rebelote d’ici 2022 ?
Se pose maintenant la question de la suite, au vu du résultat et alors que l’option du dernier référendum fait débat. L’Accord de Nouméa prévoit qu’après une deuxième victoire du Non, l’organisation d’une troisième consultation dans les deux ans peut être demandée par un tiers du Congrès. Soit dix-huit élus sur 54. Or, dans l’hémicycle du boulevard Vauban, ce sont 28 sièges qui reviennent à l’Uni et à l’UC-FLNKS et Nationalistes avec Eveil océanien.L’analyse de Mathieu Ruiz-Barraud :
Référendum 2020, vers un troisième scrutin
#7. L'Etat, cible des critiques
Comme attendu, les représentants politiques se sont opposés sur presque tous les sujets dimanche soir, lors du débat télévisé sur NC la 1ere. Malgré tout, un point fait consensus : la position, en retrait, adoptée par l’Etat ces derniers mois sur la question calédonienne.Les explications de Mathieu Ruiz-Barraud :
Référendum 2020, l'Etat jugé peu présent
#8. Sous les drapeaux
C'est l'un des faits marquants de la campagne électorale qui a précédé ce nouveau référendum : l'affichage décomplexé du drapeau dans lequel se reconnaît chacun des deux camps majoritaires. Ils se sont livrés une bataille symbolique des couleurs. Cette fois, la bannière tricolore a rivalisé sur le terrain avec l'emblème de Kanaky.Même si l'après-scrutin a été dominé par un déferlement de drapeaux et de cortèges indépendantistes, du moins dans l'agglomération nouméenne. Seuls les militants du Oui semblaient de sortie jusque tard dans la nuit.
Le fil de cette journée à revivre dans notre minute par minute numérique: