TEMOIGNAGES. L'école à la maison, une situation pas si simple en temps de crise

Ce lycéen travaille ses cours de géographie grâce aux applications en ligne.
La crise que traverse la Nouvelle-Calédonie apporte son lot de conséquences sur le quotidien des familles et l'école n'est pas épargnée. Tous les établissements du territoire sont fermés au moins jusqu'au 17 juin. Les enseignants mettent progressivement en place une forme de "continuité pédagogique", sans, pourtant mettre de pression aux parents ou aux enfants qui doivent, pour certains, gérer des problématiques bien plus urgentes.

Le gouvernement l'a annoncé la semaine dernière. Les établissements scolaires resteront fermés jusqu'au 17 juin. Les jeunes Calédoniens auront donc raté presque trois semaines de classe, à quoi il faudra ajouter les deux semaines de vacances. Sans oublier les écoles, les collèges et les lycées pillés ou dégradés...

Dans l'agglomération, les premiers jours de crise ont été consacrés à des préoccupations bien plus urgentes. Mais petit à petit, la question se pose au sein de certains foyers. Les instituteurs et les professeurs ont repris contact grâce aux outils informatiques et commencent à proposer des alternatives. En parallèle, les vacances apprenantes sont mises en place à partir du 1er juin par le gouvernement et la direction de l'enseignement a mis en ligne des outils pour les parents qui recherchent des ressources pédagogiques. 

Du stress et le travail à distance

Delphine a deux garçons de 13 et 15 ans. Depuis le début de la crise, cette maman qui habite Nouméa n'a pas fait travailler ses enfants. "Il y a des situations plus difficiles que la nôtre. Mais les dernières semaines n'ont tout de même pas été de tout repos. Il y a eu du stress. Et puis j'avais mon travail à gérer aussi." Elle compte désormais s'appuyer sur ce que les professeurs proposent. "Ils commencent à mettre des choses en ligne. C’est surtout pour que mes enfants se remettent dans le bain. Parce que plus le temps passe plus ça va être difficile."

Trop d'urgences à gérer

"L'école est passée complètement au second plan" dans cette famille d'Apogoti à Dumbéa. "Pendant les quinze premiers jours, c'était totalement impossible", raconte cette maman de deux petites filles qui a souhaité rester anonyme. "On était complètement bloqués et on devait gérer les questions alimentaires et sanitaires en priorité. On était tout le temps sur les réseaux, notre esprit était trop pris par ces urgences. On ne pouvait absolument pas s'occuper de ça." Ces derniers jours, elle commence à refaire quelques activités sur une application en ligne avec ses filles. "Elles réclament d'aller à l'école, ça fait partie de leur quotidien. Donc on essaye, mais c'est très récent. J'espère que ça prouve qu'on a passé une étape."

Commencer par bien réviser ses cours

Ce professeur dans un lycée ne parle pas d'une réelle continuité pédagogique. "Contrairement à ce qu'il s'est passé pendant la période du Covid, on propose plutôt des activités. L'idée n'est pas de mettre de pression sur les enfants, ni sur les parents d'ailleurs. Certaines personnes n'ont pas la tête à ça en ce moment."

La semaine dernière, il a tout de même envoyé des messages à ces élèves. "Sur Pronote, je n'ai obtenu aucune réponse et par sms, trois d'entre eux m'ont répondu." Selon lui, ces semaines peuvent être mises à profit pour essayer de gagner du temps. "Je leur ai dit de réviser à fond ce qu'on avait fait depuis le début de l'année. Ils peuvent aussi réfléchir à leur sujet de grand oral pour le bac en faisant des recherches."

Même approche pour cette professeur de français et d'anglais à Nouméa. "Je vais mettre des fiches en ligne et je vais adapter mes cours." Mais elle se fait peu d'illusion.

Il y a des jeunes dans des situations difficiles, dont les parents sont sur les barrages, voire certains qui ont vécu des traumatismes.

Une professeur de Nouméa

À Koné par exemple, le collège a transmis toutes les informations pratiques sur la continuité pédagogique aux parents d'élèves en début de semaine. Le collège précise qu'il s'agit notamment de révisions.

Des captures d'écran des devoirs

Bon nombre de ces adolescents ont pourtant des examens importants dans les prochains mois. "Mon fils est en première, il va passer son bac de français à la fin de l'année", raconte cette maman. Sa professeure de français a pris contact avec lui. Il a téléchargé le livre sur lequel il doit travailler. Il fait les exercices, puis il prend une photo ou une capture d'écran de son devoir et lui renvoie par internet pour qu'elle le corrige." Une situation loin d'être confortable. Sans compter que les enjeux sont importants. "Comme il a raté des cours, je me demande s'ils vont maintenir les 16 textes qu'il doit avoir étudiés avant l'examen."

À l'Université aussi cette problématique des examens est prise en compte : "des ressources ont déjà été mises en ligne pour les étudiants, certains contrôles ont aussi pu avoir lieu en ligne", annonçait dès la semaine dernière la présidente, Catherine Ris. Un dispositif est également mis en place avec l’OPT, "pour remettre en place l’accès aux ressources pédagogique sur le serveur de l’université".

Apprendre autrement

Dans ce contexte de crise, avec des difficultés multiples à gérer au quotidien, de nombreux parents n'ont tout simplement pas la possibilité d'accompagner leurs enfants. Dans les quartiers, des initiatives spontanées se mettent en place, comme à Magenta. Depuis la semaine dernière, trois maîtresses et une professeure d'anglais accueillent des enfants le matin. "Il fallait que l'information circule. Au départ ils étaient cinq, maintenant ils sont une dizaine" détaille Léa, professeure d'anglais. "Ils sont répartis en trois niveaux, les maternelles, le CP et les plus grands."

Une petite école de fortune chez un particulier. Les enfants font classe sur la terrasse ou dans le salon. "On commence par une petite séance de relaxation. On leur demande s'ils ont bien dormi, pour libérer la parole, comme un semblant de normalité." Au programme, de la lecture, des petites dictées et des activités. 

L'idée c'est qu'il n'y ait pas de coupure pour ceux qui apprennent à écrire par exemple. Ils sont très demandeurs et ils ont le sourire.

Léa, professeur d'anglais

Dans cette petite école improvisée, les enfants sont répartis en trois niveaux.

Au Mont-Dore aussi, trois maîtresses volontaires proposent des activités aux enfants.

Des associations essayent aussi d'accompagner les jeunes Calédoniens comme elles peuvent. C'est le cas de Livre mon ami qui propose des ouvrages sous format numérique et audio. 

Enfin n'oubliez pas que NC la 1ère accompagne aussi les familles calédoniennes avec des cours sur notre antenne à partir de 7h50 le matin pour le primaire et en fin d'après-midi pour les collégiens jusqu'au vendredi 31 mai.