Dans une allocution sur les antennes de NC la 1ere, le ministre des Outre-mer s'est exprimé ce lundi sur l'engagement de l'Etat dans l'usine du Sud. Il a également évoqué les conséquences d'un possible troisième référendum. Sans oublier d'aborder la crise sanitaire.
A la veille d'une nouvelle table ronde consacrée à l'usine du Sud, sous l'angle environnemental, le ministre des Outre-mer s'adressait ce lundi soir «aux Calédoniennes et aux Calédoniens», en exclusivité sur NC la 1ere. Profitant des vœux pour aborder les grands sujets du moment, à commencer par la cession de l’usine Vale.
Retrouvez cette allocution dans son intégralité :
La nationalisation de l’usine [du Sud] n’est pas la solution.
«Il faut sortir par le haut de ce conflit»
«Il faut désormais sortir par le haut de ce conflit autour de l’usine du Sud», a formulé Sébastien Lecornu. «En novembre et en décembre, nous avons enchaîné les tables rondes, les visioconférences, les rencontres. L’Etat a fait de nombreuses concessions dans une logique d’ouverture. La nationalisation de l’usine n’est pas la solution. On ne peut pas brûler une usine, puis demander à l’Etat de la reprendre. On ne peut pas asphyxier la SLN parce que l’Etat en est actionnaire, puis demander à l’État de reprendre l’usine du Sud.»
Je suis prêt à discuter d’une implication plus forte de l’État dans l’usine du Sud.
Une proposition...
Et d’ajouter cette annonce : «Parce que nous voulons tendre une dernière fois la main, je suis cependant prêt à faire une proposition nouvelle et forte. Je suis prêt à envisager ce qui, jusqu’ici, ne l’était pas. Je suis prêt à discuter d’une implication plus forte de l’État dans l’usine du Sud.»
...à deux conditions
Mais d'y poser deux conditions :
- «La première - et elle est logique ! - est que les leaders indépendantistes doivent revenir à la table des négociations : je ne peux pas discuter avec une chaise vide. Des rencontres bilatérales, avec les uns comme avec les autres, sont possibles pour préparer les discussions. Mais, quand il s’agit de décider, il ne peut y avoir de destin commun sans que tout le monde soit autour de la table».
- «La deuxième condition est qu’une nouvelle implication de l’Etat sera liée à l’avenir institutionnel. Si la Nouvelle-Calédonie devient indépendante, la France se désengagera de l’usine du Sud. La proposition que je fais devra donc être assortie d’une clause résolutoire en ce sens.»
Invitation
Avec cette invitation : «les responsables politiques qui le souhaitent peuvent venir à Paris, à tout moment pour échanger directement avec le gouvernement. Si le dossier de l’usine du Sud est important pour eux, de même que j’ai fait la quatorzaine pour venir à eux, ils peuvent venir à nous.»
Sébastien Lecornu à propos de l'usine du Sud :
Et l'analyse de Martin Charmasson sur ce thème du nickel:
«L’accord de Nouméa arrive à son terme en 2022»
Le ministre des Outre-mer s'est par ailleurs attardé sur les échéances institutionnelles. «Nous ne pouvons plus repousser : l’accord de Nouméa arrive à son terme en 2022. Le moment des décisions approche. Dans moins de trois mois, le Congrès pourra décider de déclencher le troisième et dernier référendum», a formulé Sébastien Lecornu.
Bientôt «un document écrit et complet»
Autre annonce de cette allocution : «Je remettrai prochainement à ceux qui vous représentent un document écrit et complet qui recense l’intégralité des questions posées par le “oui” et par le “non”.» Un document qui «sera inédit par son ampleur et sa précision. Je leur demanderai d’y réagir formellement. Là encore, chacun devra prendre ses responsabilités.»
Sur l'avenir institutionnel :
Les questions sont nombreuses et vous méritez de savoir : dans l’hypothèse de l’indépendance : pourrez-vous conserver la nationalité française ? quelle sera votre monnaie ? quel serait le modèle économique ? le modèle fiscal ? qui remplacera les gendarmes ? qui rendra les décisions de justice ? quels seront les droits des minorités, les droits des femmes, les droits des homosexuels ? avec quels pays de la zone formerez-vous des alliances ? dans quels pays pourrez-vous étudier demain ? est-ce que le droit de vote sera ouvert à ceux qui en sont aujourd’hui exclus ?
Si la Nouvelle-Calédonie choisit de rester française : est-ce qu’il sera possible de choisir l’indépendance dans quelques années ? qu’est-ce qui doit changer par rapport à aujourd’hui ? dans le partage des compétences, dans le partage des richesses ? que pouvons-nous faire de mieux pour le rééquilibrage ? pour sauver l’industrie du nickel ? qu’est-ce que la France peut apporter à la Nouvelle-Calédonie dans cette zone du Pacifique où les tensions montent ?
«Grande consultation de la société civile»
«Parallèlement, fait savoir Sébastien Lecornu, j’ai demandé au haut-commissaire de la République de déclencher la grande consultation de la société civile que j’avais annoncée lors de mon déplacement. Je vous invite ainsi à prendre la parole et à vous faire entendre», ajoute-t-il. Le haussaire doit en dévoiler les modalités «dans les prochains jours».
Les éclairages de Martin Charmasson :
«Un cycle de consultations avec les forces politiques nationales»
Reste, modère le ministre, que «faire participer tous les Calédoniens ne suffira pas. Une large partie des questions que j’ai soulevées ne trouvera de réponse qu’à Paris : par exemple, l’hypothèse de la double nationalité dépend d’une discussion puis d’un vote au Parlement, et donc des forces politiques nationales. C’est pourquoi j’engagerai, dans les prochains jours, un cycle de consultations avec les forces politiques nationales pour évoquer l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie.»
A l'international
«Au-delà de Paris, j’engagerai enfin des contacts sur le plan international pour évoquer la situation calédonienne avec l’Organisation des Nations unies», glisse encore Sébastien Lecornu.
De la pandémie
Entre usine du Sud et enjeux institutionnels, il a enfin été question de la Calédonie face à la pandémie - même si elle en reste préservée avec quarante cas en tout depuis le 18 mars, tous d’origine extérieure, et aucun décès.
La crise sanitaire mondiale se poursuit et, même si la Nouvelle-Calédonie est épargnée, nous savons que la situation d’isolement qui est la vôtre n’est pas tenable durablement.
Vaccins et quatorzaine
Sébastien Lecornu a rappelé l’arrivée vendredi dernier des premières doses de vaccin anti-Covid, «fournies gratuitement par la France». Et les conséquences économiques de la situation sur le Caillou.
Pour accompagner le pays dans la gestion de cette crise inédite, je vous confirme ce soir que l’État accompagnera le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie dans la prise en charge du coût de la quatorzaine, selon des modalités que nous devrons définir ensemble.
Le texte complet de cette allocution (seul le prononcé fait foi):
Que pouvons-nous souhaiter ensemble pour 2021 ? Il y a tant à faire. Je veux garder l’espoir. Certes, il nous reste du chemin, mais le “pari de l’intelligence” qu’avaient fait Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, n’est pas perdu.