Cyclone Chido : une semaine après, comment rebâtir entièrement Mayotte, département le plus pauvre de France ?

Une semaine après le cyclone dévastateur Chido, comment rebâtir un département tout entier ? Quelles erreurs ne pas reproduire ?
Une semaine après le passage du cyclone tropical intense Chido sur l'Île aux Parfums, l'heure est à présent à la reconstruction. Si certains tentent déjà de rebâtir leurs habitations, Emmanuel Macron, lors de sa visite sur place, a affirmé vouloir mettre fin aux bidonvilles et supprimer les habitats indignes et dangereux. Mais comment rebâtir un département tout entier ?

Le cyclone Chido a plongé Mayotte au fond du gouffre. La population a longuement été laissée-pour-compte, dénoncent les habitants sur place ainsi que la communauté mahoraise à La Réunion. Plusieurs actions de solidarité ont d'ailleurs été mises en place.

Nombreux sont ceux qui sont sans toit, sans eau et sans nourriture... Une situation que l'Elysée a tenté de résoudre avec la visite présidentielle d'Emmanuel Macron, sur place. Au terme d'une visite de terrain de deux jours, le chef de l'Etat a promis de "rebâtir Mayotte".

Regardez le reportage de Réunion La 1ère :

Une semaine après le passage du cyclone Chido, comment reconstruire Mayotte durablement ? ©Réunion la 1ère

Mayotte dévastée par le cyclone Chido

Selon Copernicus, le programme européen visant à créer une capacité européenne d'observation de la Terre, 56% des bâtiments ont été détruits ou endommagés dans le Nord/Est de l'archipel.

La majorité des constructions du centre de Mamoudzou a été rayée de la carte. Il n'en reste qu'un tas de gravas qu'il faut reconstruire.

Vue aérienne du centre de Mamoudzou avant le passage du cyclone Chido
Le centre de Mamoudzou après le passage du cyclone dévastateur Chido

"Il y a urgence"

Une situation d'autant plus préoccupante en pleine saison cyclonique. "Il y a urgence", selon la porte-parole du collectif RéMa (Réunion-Mayotte), invitée sur le plateau de Réunion La 1ère dans l'édition spéciale Mayotte, présentée par Gaëlle Malet.

"Mayotte n'a pas le temps d'attendre. Mayotte fait la superficie d'une ville dans l'Hexagone, ça veut dire que si la France le veut, elle peut relever Mayotte en y mettant les moyens humains et financiers. Les gens ne boivent pas et ne mangent pas. Ils subissent des pillages. Les gens dorment dehors, et on nous dit, on attend toujours.

Amina Djoumoi, porte-parole du collectif RéMa

Reconstruire Mayotte

Alors, de quelles façons reconstruire Mayotte à court et long terme ? Le Premier ministre François Bayrou lance un appel à projet sur des habitations pré-fabriquées. C'est une mauvaise idée selon les architectes de l'urgence.

On utilise des matériaux qui peuvent être locaux. En l'occurrence, il y a des filières de briques de terre compressées qui existent, donc, autant l'utiliser. Il faut augmenter au maximum la main-d’œuvre locale et faire travailler les gens en local plutôt que d'importer au maximum les choses, et surtout pas du pré-fabriqué parce qu'en termes de bilan carbone, c'est une catastrophe. Forcément, ça finit en bidonville. Ça ne coûte pas très cher à faire. On va dire qu'en trois mois ça peut être fait. Ce sont des maisons assez rustiques, mais si on sait faire, ce sera à la fois parasismique et paracyclonique.

Patrick Coulombel, co-fondateur des architectes de l'urgence

Des constructions en bambou ?

Si l'heure est à l'urgence, certains réfléchissent à des solutions de constructions durables depuis plusieurs années. Dans l'Ouest de l'archipel, Thibaut Fung Kwok Chine développe la filière bambou pour des constructions civiles et agricoles. Il faut quatre jours seulement pour construire seule une structure.

J'ai une charpente en bambou, construite il y a trois ans, en chantier école, notamment avec des stagiaires. C'est un modèle de serre anti-cyclonique. Il s'agit d'un petit ouvrage de 4,5 mètres de largeur par 8 mètres de longueur. Il résiste aux cyclones. La preuve en est, après le cyclone Chido, la charpente est toujours là. Le toit s'est bien sûr envolé, mais la charpente est intacte.

Thibaut Fung Kwok Chine, architecte réunionnais

Le bambou est une ressource résiliente qui pousse vite. Ce sont les deux arguments de taille pour l'architecte réunionnais.

"On voit que la plupart des arbres ont été couchés. Ils ont été dépourvus de leurs feuilles et qu'ils vont avoir beaucoup de mal à repartir. C'est différent du bambou, où une bonne majorité des cannes ont résisté, et ce, malgré le fait que leur partie haute est pliée", souligne l'architecte. 

Seul 10% du parc immobilier est assuré à Mayotte

À Mayotte, département le plus pauvre de France, en 2017, selon les derniers chiffres de l'INSEE, 4 logements sur 10 étaient faits de tôle, de bois ou de terre, comme 20 ans auparavant.

Seul 10% du parc immobilier est assuré à Mayotte, mais Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’un fonds d’indemnisation pour ceux qui ne sont pas assurés.