VIDEO. Crise en Nouvelle-Calédonie : Les chefs coutumiers d'Inaat ne Kanaky déplorent le transfert en métropole des militants indépendantistes de la CCAT

Un reportage de Brigitte Whaap et Christian Favennec ©NC la 1ère
Le conseil des grands chefs, Inaat ne Kanaky s'est exprimé, mercredi 26 juin, pour dénoncer l’envoi des chefs de file de la CCAT dans l’hexagone, ce mercredi. Il dénonce une "justice à deux vitesses". Ils ont aussi abordé le sujet de la jeunesse révoltée, qui a besoin d’être écoutée.

Les responsables de la CCAT envoyés dans l'Hexagone en détention provisoire, des incursions des forces de l'ordre sur les terres coutumières mais aussi "une justice à deux vitesses"... C'est ce que dénonce le conseil national des chefs coutumiers d'Inaat ne Kanaky dans un courrier adressé à la population calédonienne et en conférence de presse, ce mercredi 26 juin.

"Nous dénonçons une justice à deux vitesses. On ne parle pas des milices qui tirent sur nos jeunes sur les barrages, par contre on reprend les discours des loyalistes qui qualifient les militants (indépendantistes) de "terroristes"", a déclaré Hippolyte Sinewami Htamumu, grand chef de la Roche et président d'Inaat ne Kanaky.

Pour rappel, onze militants indépendantistes ont été interpellés le 19 juin, neuf d'entre eux étant placés en détention provisoire, dont sept dans diverses prisons de l'Hexagone. Parmi ces derniers, figure Christian Tein, le leader de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT).

"Depuis 171 ans, l'Etat français a souvent utilisé cette méthode, on prend les gens, le mot déporté est fort, mais on les exile de leur lieu de vie ", ajoute Honakoko Honakoko, porte-parole de la chefferie du Wetr, à Lifou.

Le signal d'une jeunesse révoltée, selon les coutumiers


Pour les représentants des chefferies, les émeutes de ces dernières semaines, sont un signal, celui d’une jeunesse révoltée qui a besoin d’être écoutée. Ils regrettent le retour des barricades et rappellent que la violence et la destruction ne permettent pas une construction stable et durable. Certains coutumiers se sont rendus sur les barrages pour entendre la jeunesse des quartiers.

"Il y a une non prise en compte au niveau des emplois, des inégalités sociales. Quand on regarde la réaction des jeunes, ce ne sont que des jeunes des quartiers populaires, il faut dénoncer aussi les politiques publiques qui sont menées", lance Hippolyte Sinewami.

"Ce qui s'est passé, les bâtiments brûlés, les destructions, on ne peut pas le concevoir. Mais la vraie question que l'on doit se poser, c'est pourquoi les jeunes en sont arrivés à ce stade", a fait valoir le grand chef, soulignant que les jeunes Kanaks subissent "marginalisation", "inégalités sociales" et "difficultés d'accès à l'emploi".

Ces représentants coutumiers s'engagent à discuter avec la jeunesse de leurs aspirations pour construire le pays de demain et rappellent que le préalable du retour à la paix passe par le respect et le dialogue entre les différentes communautés du pays. " Il faut rajeunir les élus politiques de tout bord, il faut penser aux pays, il ne faut pas être plongé dans les affaires, ne pas être tenu par des forces extérieures", continue le grand chef de la Roche.

Pour l'abandon du texte sur le dégel du corps électoral

Dans une lettre ouverte aux Calédoniens, les responsables coutumiers identifient deux préalables nécessaires à l'apaisement des tensions: "l'abandon pur et simple du texte sur le dégel du corps électoral" aux scrutins provinciaux et le "retour de tous (les) prisonniers politiques".

Une fois la paix restaurée, les chefs coutumiers entendent tenir une place de premier plan dans les discussions avec l'État sur l'avenir institutionnel du territoire. "Le combat légitime, c'est celui du peuple kanak", a relevé le grand chef Hippolyte Sinewami Htamumu. "Les discussions se tiendront entre l'État et les grandes chefferies, pas entre institutions ou entre partis politiques", a-t-il martelé.