Violences à Saint-Benoît : les élus réunionnais s'emparent du sujet, une table ronde attendue avec le préfet

Cyrille Melchior à Bras-Fusil
Ce lundi après-midi, le président du conseil départemental Cyrille Melchior s'est rendu dans le quartier de Bras-Fusil à Saint-Benoît, où des véhicules ont été dégradés samedi soir. Le député Jean-Hugues Ratenon lui, a visité le centre éducatif fermé de Sainte-Anne. Tous deux s'interrogent sur les actions à engager pour éradiquer les phénomènes de violence qui touchent La Réunion depuis peu.

Que faire pour endiguer les phénomènes de violence observés dernièrement à La Réunion, dont ce week-end encore à Saint-Benoît ? Une question qui semble préoccuper plusieurs élus réunionnais, qui ce lundi, ont souhaité s'exprimer sur le sujet. 

En premier lieu, Patrice Selly dont la commune a été concernée dans la nuit de samedi à dimanche par un épisode de violences, dans un contexte d'affrontements entre bandes rivales. Finalement, ce sont les véhicules des particuliers, stationnés dans le quartier, qui ont fait les frais de cette violence gratuite. Une quarantaine a été vandalisée.

Regarder le reportage de Réunion La 1ère : 

Cyrille Melchior et Jean-Hugues Ratenon étaient à Saint-Benoît ce lundi. Ils réagissent aux violences commises à Bras-Fusil ce week-end.

"Entendre la colère de nos habitants" 

Le maire de Saint-Benoît, est retourné sur le terrain ce lundi 25 mars 2024. Comme il l'avait déjà exprimé dimanche lors d'une visite de quartier, il a rappelé un "problème d'intégration qui touche désormais l'ensemble de l'île". "La population réunionnaise est excédée par cette insécurité persistante. Nous devons entendre la colère de nos habitants et apporter collectivement des réponses pérennes et durables", commente le maire de Saint-Benoît. 

Cyrille Melchior affiche sa solidarité à Saint-Benoît

Il était accompagné ce lundi par le président du conseil départemental, Cyrille Melchior. Ce dernier a souhaité communiquer aux maires sa "solidarité", les assurant de la mobilisation de la collectivité. 

"Sur une île où nous avons tous appris à vivre ensemble les uns avec les autres, dans le respect de nos traditions et dans un esprit de tolérance, on ne peut pas accepter de voir ces phénomènes de violence se développer à un rythme aussi rapide"

Cyrille Melchior, président du conseil départemental de La Réunion

Des sanctions, sans "tabou", pour Melchior

Parmi les solutions à envisager, il appelle à davantage de "sanctions envers ceux qui commettent des délits", sans entrer dans les détails. Mais "ces problèmes sont suffisamment graves pour qu'on envisage des solutions à tous les niveaux. Il ne doit y avoir aucun tabou", considère le président du Département. 

"Il faut rester calme"

En attendant, Cyrille Melchior a pris la température à Bras-Fusil ce lundi après-midi. "Il faut rester calme. L'Etat, les maires, et nous-mêmes, on est ensemble pour trouver des solutions. Mais pendant ce temps-là, il ne faut pas que ça casse, que ça brûle. Il faut ramener la paix et nous laisser faire", tentait-il de convaincre un habitant en colère après avoir subi des dégradations. Nombreux sont les Bénédictins à s'interroger sur cette situation après un tel week-end.  

Cyrille Melchior interpelle l'Etat

Force est de constater que les agents de médiation, ou les actions en faveur de la parentalité, que le Département rappelle avoir déployé dans les quartiers difficiles, ne peuvent à elles seules prévenir ou même contenir la violence. "Il faut donner de la force et de la cohérence à nos actions", soutient Cyrille Melchior.

L'action, poursuit le président du Département, doit aussi se poursuivre par la prise en compte de  la problématique des "arrivées de mineurs isolés". Il en appelle à l'Etat et indique son intention d'interpeller le préfet et le ministère de l'Intérieur. 

"Si on ne règle pas le problème des arrivées incontrôlées de mineurs sur le territoire, on mettra toujours un pansement sur une jambe de bois. Il faut que l'Etat comprenne bien qu'il y a un sujet incontrôlable à La Réunion. On peut pas accepter de voir notre société traversée par toutes ces violences, il faut agir sans tarder" 

Cyrille Melchior, président du conseil départemental

Jean-Hugues Ratenon au centre éducatif fermé

Cette problématique des arrivées de Mayotte était également au coeur du déplacement du député Jean-Hugues Ratenon au centre éducatif fermé pour mineurs de Sainte-Anne. C'est ici notamment que des mineurs sous contrôle judiciaire ou condamnés à du sursis sont placés pour éviter les récidives. Une visite "pour voir quel public on retrouve ici, s'ils ont suffisamment de moyens", dit le député de la 5ème circonscription. 

Jean-Hugues Ratenon au centre éducatif fermé de Sainte-Anne

Car le parlementaire dit être entré dans une "démarche de rencontres, de consultation, d'audition de tous les acteurs de l'insertion et de la lutte contre les violences", d'où cette visite au Centre éducatif fermé. Il s'interroge notamment sur le transfert de prisonniers de Mayotte à La Réunion. "Que deviennent ces détenus à la fin de leur peine ? Ils restent sur le territoire, et organisent cette forme de violence", avance Jean-Hugues Ratenon. 

Pas de "transfert massif" de détenus, selon le préfet 

Interrogé à ce sujet dans la Matinale de Réunion La 1ère ce lundi matin, le préfet Jérôme Filippini a avancé quelques chiffres sur ces fameux transferts de prisonniers qui semblent cristalliser les inquiétudes de certains élus. "Il y a 1 300 détenus à La Réunion aujourd'hui. Les transferts de Majicavo, la prison de Mayotte, c'était 70 personnes à un instant donné, soit environ 5%. Sur ces 70 personnes, 15 sont sorties l'an dernier, et 6 sont restées sur le territoire de La Réunion. Quand j'entends parler de transfert massif, ça n'est pas le cas", a rectifié le préfet de La Réunion. 

"Il faut être attentif lorsque les gens sortent de prison à ce que ce soit une sortie accompagnée. Mais il ne faut pas avoir cette idée fausse que tous les déliquants du département voisin restent chez nous et ne partent plus ensuite" 

Jérôme Filippini, préfet de La Réunion

"On ne vise pas la communauté mahoraise"

Le député Ratenon lui, se défend de stigmatiser une communauté. "On ne vise pas la communauté mahoraise, mais une violence importée de Mayotte", précise-t-il. Citant l'exemple du "mouringué", ces combats à mains nues, "violence pure", qui "n'existaient pas à La Réunion", mais sont aujourd'hui un "facteur de violence et de délinquance dans l'Est comme dans le Nord".

"Quand je vois comment la violence a évolué à Mayotte, je me dis qu'on est en train d'en prendre le chemin"

Jean-Hugues Ratenon, député de la 5ème circonscription

Bientôt une table ronde entre les élus et le préfet

 En outre, la demande de table ronde que le député Ratenon formulait dimanche a bien été entendue. Le préfet Jérôme Filippini a indiqué ce matin que cet échange avec l'ensemble des maires et parlementaires aurait lieu dans les prochains jours. 

Et une réunion de travail de l'AMDR

Idem pour la réunion de travail sous l'égide de l'Association des maires de La Réunion (AMDR) réclamée quant à elle par Patrice Selly. Serge Hoareau, président de l'AMDR disait ce lundi midi répondre favorablement au maire de Saint-Benoît, pour "que l'ensemble des acteurs puissent travailler sur ce sujet qui devient extrêmement préoccupant à La Réunion". 

Les précisions de Serge Hoareau, président de l'AMDR, sur Réunion La 1ère : 

Direct Serge Hoareau, président de l'AMDR

Cet échange devrait permettre, dit-il, de "définir des actions pour interpeller le préfet, demander des moyens pour enrayer la délinquance de cette jeunesse désoeuvrée et l'occuper à travers des dispositifs spécifiques et de droit commun". 

L'AMDR prête à "prendre le sujet à bras le corps"

Selon le président de l'AMDR, également maire de Petite-Ile, "ces actes se répètent et il est urgent de prendre le sujet à bras le corps", tout en ne stigmatisant ni quartier, ni commune, précise-t-il.

"Pour que ces violences s'arrêtent, il faut activer le plus rapidement possible le dispositif de nouvelles brigades et des moyens humains pour rétablir l'ordre républicain, quitte à solliciter les réservistes ou intensifier les patrouilles sur le territoire". 

Serge Hoareau, président de l'AMDR

"Ces phénomènes de clan, de bandes organisées ont tendance à se développer, et si nous ne faisons rien nous aurons demain des problèmes de gangs", réagissait Serge Hoareau lors du journal télévisé de Réunion La 1ère ce lundi midi.