La contre-attaque n'a pas tardé... Après l'enquête du journal Libération sur les profits du groupe antillais Bernard Hayot, des profits qualifiés de suspects par Emmanuel Fansten, l’auteur de l'article, GBH a publié un communiqué, ce vendredi 10 janvier.
Le groupe GBH se défend et affirme que "les récents articles publiés par Libération ont clairement pour objectif de déstabiliser" le groupe.
GBH s'estime victime de "détracteurs habituels" et d'un ancien salarié ayant un "esprit de vengeance".
Ces attaques instrumentalisent notre groupe. Elles sont infondées et approximatives, sans considération pour nos salariés, nos clients et nos fournisseurs.
Extrait communiqué GBH
Le groupe affirme qu'Emmanuel Fansten, auteur de l'enquête n'a pas tenu compte des éléments chiffrés et sourcés qui lui ont été adressés.
Le quotidien national a publié en version papier et numérique, des articles sur le fonctionnement du groupe martiniquais en Outre-mer, se basant sur un dossier comprenant des dizaines de documents internes émanant d’un cadre supérieur de la multinationale. Un des 170 managers ayant accès à ces documents ultra-confidentiels.
Cet informateur anonyme, travaillant au sein de la branche automobile du groupe, indiquait que GBH réalisait 18 à 28% de marges nettes dans ce secteur dans nos régions, soit 4 fois celles réalisées dans l’Hexagone sur les mêmes voitures vendues.
Il mettait également en doute les arguments avancés par la direction du groupe, à savoir des frais d'approche qui expliqueraient ces données. Selon Emmanuel Fansten, ces coûts d’approche ne représenteraient que 15 à 20% du prix de vente final, soit l’équivalent de la TVA dans l’Hexagone. Il y aurait des frais appliqués qui profiteraient en réalité à nombre d’entreprises intermédiaires, qui appartiennent elles-mêmes à la constellation d’entreprises de GBH.
Une structuration qui permettrait d’accumuler des marges, de ventiler les bénéfices et d’alléger les comptes d’exploitation des entreprises les plus rentables, selon l'enquête.
GBH se défend et, dans son communiqué, insiste sur le fait qu’il évolue dans un marché concurrentiel, que ce soit dans la grande distribution alimentaire ou l’automobile. Le groupe affirme également pratiquer des prix attractifs.
Une version mise à mal par l’Autorité de la concurrence. En 2019, elle avait analysé en profondeur le fonctionnement des marchés en outre-mer, et soulignait que si aucune sur-marge isolée n’était directement responsable des écarts de prix avec l’hexagone, c’est l’accumulation des marges à chaque maillon de la chaîne qui posait problème.
L’accumulation des marges des acteurs de toute la chaîne des produits de grande consommation qui peut expliquer une partie des écarts de prix avec la métropole.
Autorité de la concurrence (juillet 2019)
En clair, chaque acteur, du grossiste, à l’importateur en passant par le distributeur, ajoute une marge, et c’est cette addition qui finit par peser lourd sur le portefeuille des consommateurs.
Dans son communiqué, GBH affirme que "les marges pratiquées dans les Doms sont les mêmes que celles constatées à l’international pour des opérateurs qui sont à la fois importateurs et distributeurs".
[...] comme nos concurrents localement, nous faisons deux métiers, celui d’importateur et de distributeur. Le métier d’importateur consiste à commander, stocker, former les équipes, distribuer et mettre en œuvre la communication et la stratégie de la marque. L’entreprise finance entre 3 et 5 mois de stock pour les voitures neuves et entre 3 et 6 mois de stock pour les pièces de rechange, cela n’existe pas dans l’Hexagone. Ce métier demande donc des immobilisations financières très importantes.
Extrait communiqué GBH
Et c’est là que GBH est un acteur clé. Le groupe n’est pas juste un distributeur : il est grossiste, importateur et distributeur. Autrement dit, il contrôle plusieurs niveaux de la chaîne. Une intégration verticale qui selon l’Autorité de la concurrence est une situation "susceptible de soulever des risques de concurrence … Un acteur intégré pourrait en effet être incité à privilégier ses enseignes au détriment de ses concurrents".
Par ailleurs, GBH met en avant la concurrence existante. Cependant, dans l’automobile, par exemple, le groupe Bernard Hayot, détient près de 50% des parts de marché dans la vente de voitures.
Dans son giron, trois concessions majeures en Guadeloupe : SGDM pour Mercedes, Carmo pour Toyota et Cama pour Renault.
Ce qui est frappant, c’est qu’il n’existe qu’une seule concession pour chacune de ces marques. Vous voulez une Hyundai en Guadeloupe ? Vous passez forcément par GBH. Contrairement à ce qu’on peut voir ailleurs, où plusieurs concessionnaires d’une même marque peuvent coexister et ainsi encourager une guerre des prix pour attirer les clients.
Le groupe Bernard Hayot, en fin de communiqué, insiste sur le fait que "le problème de la vie chère est bien antérieur à l’existence de GBH et trouve son origine dans une problématique structurelle : l’éloignement. En 1952, 8 ans avant la création de notre groupe, l’Etat accordait déjà une prime de vie chère à ses fonctionnaires" conclut-il.
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