Affiches controversées : bras de fer entre les "gros producteurs" de bananes et le préfet de Martinique

Campagne publicitaire controversée de l'l’UGPBAN - Union des Groupements de Producteurs de Bananes de Guadeloupe et de Martinique (janvier 2021)

Après l’enquête initiée par le préfet de Martinique "visant à faire cesser la campagne de communication" de l’UGPBAN vantant la banane Bio, le président de ces groupements antillais a directement interpellé le ministre des Outre-mer. Collectifs et "petits planteurs" ne décolèrent pas.

Dès le début de cette campagne publicitaire mettant en avant une banane antillaise dite Bio, plusieurs "petits planteurs" ainsi que des collectifs d’ouvriers et de citoyens comme "ZERO chlordécone objectif ZERO poison" mobilisés contre les méfaits des pesticides dans les cultures locales, sont montés au créneau.

Après avoir pollué notre sol impunément et durablement, voici une campagne d'affichage totalement obscène et indécente des gros planteurs antillais, dans la ligne directe du green whashing. #mercipourlechlordecone

Post Facebook du collectif "Zéro chlordécone objectif Zéro poison" (5 janvier 2021)

 

C'est dans ce contexte que le préfet de Martinique a annoncé le lancement d’une enquête en matière de "pratique commerciale trompeuse", via un communiqué de presse daté du 14 janvier 2021.

Une récente campagne d’affichage de l’Union des Groupements des Producteurs de Bananes de Guadeloupe et de Martinique (UGPBAN) peut laisser croire que la production de bananes est issue de l’agriculture biologique.

 

Les bananes issues de la production biologique représentent moins de 2 % de la production totale de l’UGPBAN. Cette communication peut ainsi induire en erreur le consommateur.

(Cabinet du préfet Stanislas Cazelles)

 

Cette décision du représentant de l’État a suscité la "stupéfaction des producteurs de bananes de Guadeloupe et de Martinique" explique le président des groupements, d’où son courrier courroucé adressé le 15 janvier 2021, directement au ministre des Outre-mer.

Nous regrettons vivement que le préfet ou ses collaborateurs n’aient pas jugé opportun d’engager un dialogue avec nous sur le sujet, plutôt que de chercher le conflit. 

Comment comprendre cette agressivité de l’État local, sur le fond comme sur la forme, à l’endroit de notre filière et de ses producteurs ?

(Eric De-Lucy, président de l’UGPBAN - Union des Groupements de Producteurs de Bananes de Guadeloupe et de Martinique)

 

Dans sa lettre, Éric De-Lucy souligne "la sidération du planteur qui voit l’État l’attaquer", et ajoute "nous n’avons désormais plus droit qu’à un seul produit fongicide curatif pour lutter contre le champignon de la cercosporiose avec au maximum six applications terrestres par an, quand tous les autres producteurs de la planète utilisent des molécules beaucoup plus agressives, en plus grand nombre, et font jusqu’à une soixantaine d’épandages aériens par année, et c’est nous qui sommes montrés du doigt par l’État !".

"Malveillance" et "parti-pris"

 

Du coup, le représentant de l’UGPBAN signale que ses mandants ressentent cette initiative du préfet de Martinique "comme l’expression publique d’une malveillance et d’un partis-pris", dans un contexte ajoute Éric De-Lucy où, "la banane est déjà injustement prise pour cible par une partie de l’opinion locale".

 

Photo-montage d'images capturées sur la page Facebook du collectif "ZERO chlordécone objectif ZERO poison"

 

Dans ce bras de fer, pas sûr que Stanislas Cazelles se laisse impressionner par la charge des "gros producteurs", d’autant que le sujet cristallise l’opinion, dont des spécialistes de la santé. Tous demandent justice suite à l’empoisonnement "avéré" des terres agricoles aux Antilles, à cause de l’utilisation des pesticides durant de nombreuses années. 

Mais les groupements assurent sur le site de l’UGPBAN, que les pratiques ont "évolué".

La filière fait régulièrement évoluer ses pratiques pour améliorer la préservation de l’air, de l’eau et de la terre et favoriser la biodiversité dans ses plantations.

Beaucoup d’espèces sont de retour en Bananeraie !

Ces pratiques, plus respectueuses de l’environnement, sont indispensables pour préserver les qualités du terroir des départements de Guadeloupe et Martinique.

bananeguadeloupemartinique.com

 

l’UGPBAN - (l'Union des Groupements de Producteurs de Bananes de Guadeloupe et de Martinique) sur l'un de ses sites.

 

Quoi qu’il en soit, le sujet n’a pas fini de faire couler de l’encre ni de provoquer des manifestations parfois radicales, sur la question lancinante des "responsabilités" et des "réparations". Le 15 octobre 2019, une commission spéciale a livré son rapport à l'assemblée nationale à Paris.