Pour protester collectivement contre les dégradations répétées des monuments aux morts de l'île, les citoyens Martiniquais sont appelés à participer à une marche silencieuse, samedi (8 juillet). Départ du monument aux morts de Fort-de-France à 9h du matin. Dresscode : haut blanc.
Ces actes de vandalisme sont devenus récurrents en Martinique. En décembre 2021, les plaques du monument aux morts de Ducos ont été brisées. L'année suivante, en 2022, pas moins de 10 mausolées ont été vandalisés.
Derniers en date : ceux de six communes ont été aspergés de peinture rouge dans la nuit du 18 juin 2023. Une date probablement choisie en référence à l'appel du Général de Gaulle réalisé 83 ans plus tôt, jour pour jour.
Le 18 juin, "la goutte de trop"
Cet énième saccage, qui salit au passage le souvenir de l'appel à la résistance, c'est "la goutte de trop" pour Marlène Gabriel. "On s'est dit qu'il fallait réagir", témoigne cette fille de militaire, membre de l'Association des anciens combattants du Robert.
Pour la première fois, une mobilisation est donc organisée afin de "dire stop à la destruction des monuments aux morts et respecter ceux qui se sont battus pour notre liberté", d'après un communiqué transmis à la presse par plusieurs intellectuels et associatifs martiniquais.
Parmi eux, l'historienne Sabine Andrivon-Milton. Selon elle, de tels gestes traduisent un rapport identitaire tendu avec la France hexagonale. "Certaines personnes veulent essayer de gommer cette histoire qui est peut-être trop attachée à l'histoire française, mais qui est quand même notre histoire", affirmait-elle dans un précédent entretien accordé à Martinique la 1ère.
Seul lieu de recueillement pour beaucoup de familles
"Nous avons conscience que certaines guerres françaises sont éminemment critiquables. Mais il s'agit tout de même de respecter ces gens qui sont partis sacrifier leur vie pour l'île, et dont certains ne sont jamais revenus", poursuit Marlène Gabriel.
Les monuments aux morts relèvent du sacré, particulièrement en Martinique où les corps des soldats n'ont pas toujours été rapatriés. Pour leurs familles, ils constituent leur seul lieu de recueillement possible.
Marlène Gabriel, membre de l'Association des anciens combattants du Robert
Interrogé en février 2022 sur la question, l'historien Richard Chateau-Degat rappelait que nous ne pouvons pas juger les conflits d'hier avec les yeux d'aujourd'hui. Selon lui, "cette mouvance entame une rupture avec nos anciens (...), une tendance dangereuse, le signal du démembrement de notre corps social".
Il n'est cependant pas admis que cette défiance soit généralisée, ou même importante, au sein de la jeunesse martiniquaise. Jusqu'à présent, les vandales n'ont pas été interpellés. Il s'agit peut-être, depuis le début, d'un même petit groupe de personnes.