Qu'est-ce que Waterships, le projet de bateau usine de dessalement défendu par la députée Anchya Bamana ?

Le navire-usine Odeep One, dans le port de Sète (Hérault), le 2 avril 2020.
Dans un courrier adressé au ministre des Outre-mer Manuel Valls, la députée de Mayotte Anchya Bamana appelle une nouvelle fois à financer le projet de bateau usine de dessalement de l'association Waterships pour produire des bouteilles d'eau, alors que le spectre d'une nouvelle crise se dessine.

C'est un projet évoqué depuis cinq ans à Mayotte : un bateau usine de dessalement pour alimenter le département depuis le large. Alors que le risque d'une nouvelle crise de l'eau plane sur le département, la députée mahoraise Anchya Bamana a de nouveau plaidé dans un courrier auprès du ministre des Outre-mer Manuel Valls pour financer cette solution, désormais portée par l'association Waterships. Selon l'élue RN, ce bateau pourrait produire jusqu'à 6.100 mètres cubes d'eau toutes les 48h, soit plus de 6 millions de litres d'eau tous les deux jours.

Un ancien projet avorté suite au Covid

Le principe est d'avoir un bateau, "autonome en énergie", capable de dessaler l'eau de mer depuis le large, pour l'acheminer à terre sous la forme de bouteilles et de citernes. Ce projet avait initialement vu le jour en 2019 dans une optique commerciale. Un ancien navire ferry a été réaménagé par la société Odeep pour produire de l'eau embouteillée à partir de l'eau de mer. Une aventure qui s'est "arrêtée de manière dramatique à cause du Covid", résume Régis Revilliod, le fondateur d'Odeep, et président de l'association Waterships. L'entreprise dépose le bilan en 2020 et le navire fini démonté en Inde.

L'idée, "le fruit de dix ans de travail", n'est pas abandonnée et est reconvertie sous la forme d'une structure associative pour produire notamment de l'eau pour les territoires français ultramarins. Elle compte une dizaine de membres, mais toujours pas de navire. "On a déjà les études d'ingénierie, on est en mesure de transformer un navire d'occasion avec une ligne de production en six mois", assure Régis Revilliod.

Des devis actualisés au fil des années

D'après la députée Anchya Bamana, cette solution est évaluée à 45 millions d'euros pour l'aménagement du navire puis 35 millions d'euros sur cinq ans en délégation de service publique pour financer les frais de fonctionnement. En 2020, la préfecture avait sollicité un devis à la société Odeep, mais le projet avait été écarté pour son coût selon le préfet Jean-François Colombet, cité à l'époque par Mayotte Hebdo.

L'idée ne semble pas avoir été abandonnée selon son porteur. "Tous les ans, la préfecture nous demandait des devis réactualisés", affirme le président de Waterships, qui a également rencontré à ce sujet le ministre des Outre-mer Manuel Valls début février. "On lui a proposé d'envoyer le bateau usine d'un hémisphère à l'autre, entre départements ultramarins selon les saisons, ce qui serait plus économique que d'envoyer des stocks de bouteilles." 

Une solution d'appoint pour une situation tendue

L'association insiste sur un point : ce projet ne vise pas à remplacer les installations terrestres. "Elle permettra simplement de répondre à l'urgence suite à Chido, pour donner de l'eau aux Mahorais, le temps que les infrastructures programmées soient réalisées", ajoute la députée Anchya Bamana. Le plan eau 2024/2027 prévoit notamment la construction d'une usine de dessalement à Ironi Bé, une troisième retenue collinaire et la mise en services des forages.

Actuellement, les infrastructures ne permettent pas de produire suffisamment d'eau pour alimenter l'ensemble de la population en permanence, notamment à cause de la croissance démographique. Des tours d'eau, à raison de 36h de coupure et 36h d'ouverture, sont toujours en vigueur mais sont régulièrement perturbés. Dans le centre et le sud, la SMAE a dû procéder à une coupure générale ce lundi soir face "à une instabilité générale de la distribution qui tend à s'installer."

L'accès à l'eau en bouteille est aussi compliqué à Mayotte, les rayons des magasins étant régulièrement vides. Les maires ont aussi annoncé ce lundi interrompre les distributions de denrées alimentaires et de bouteilles venant de l'État, après des suspicions de détournements dans les communes.