Depuis le début de la semaine, les parlementaires nouvellement élus ont commencé à quitter leurs provinces afin de rejoindre Honiara. Pas pour prendre place dans l’hémicycle, mais pour rejoindre de discrets quartiers généraux installés dans les hôtels et les casinos de la capitale salomonaise.
Le parlement élit le Premier ministre
Ancienne colonie britannique, membre du Commonwealth, les Salomon ont en effet calqué leur système politique sur celui de la Grande-Bretagne : les membres du parlement élisent le Premier ministre, au terme d’intenses négociations qui peuvent durer plusieurs semaines. La comparaison avec le Royaume-Uni, où règne le bipartisme, s’arrête là. Aux Salomon, pas moins de treize partis étaient en lice pour ce scrutin et près de la moitié des 334 candidats aux cinquante sièges à pourvoir se sont déclarés comme indépendants.
"Pro" et "anti" Chinois font jeu égal
Le Premier ministre sortant, Manasseh Sogavare, a été largement réélu dans sa circonscription, sur l’Est de l’île de Choiseul. Mais sa coalition OUR (“Ownership, unity and responsability”) n’a remporté que treize sièges en tout. Au coude à coude avec la coalition Care (“Coalition for acountability, reform and empowerment)”, qui comptabilise également treize sièges, et le Salomon islands united party (sept sièges). Ces deux formations ont fait campagne contre la politique pro-chinoise de Manasseh Sogavare.
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L'enjeu de séduire les élus "sauterelles"
Insuffisant pour obtenir la majorité, même en remportant les deux sièges dont les résultats se font encore attendre. Les dix-sept candidats élus sous l’étiquette "indépendants" ou celle de micro-partis feront donc office de faiseurs de rois. Et dans les semaines à venir, chaque camp aura à cœur de séduire "les sauterelles", comme les Salomonais surnomment ces élus, capables de passer d’une alliance à une autre en fonction du plus offrant.
"Les enchères portent surtout sur les politiques publiques"
"Ça peut être un siège au gouvernement. Mais en général, les enchères portent surtout sur les politiques publiques qui seront menées pendant les cinq ans de la mandature dans sa circonscription”, décrypte le journaliste d’In-depth Solomons, Ofani Eremae. “Se retrouver dans la mauvaise alliance et donc hors de la majorité parlementaire, c’est risquer de voir ses électeurs oubliés des grands projets. Avec le risque que ceux-ci s’en souviennent lors des élections suivantes." A ce jeu des négociations post-électorales, Manasseh Sogavare est un "joueur redoutable", estime un observateur de la vie politique locale.
Heurts à Malaita
L’absence de vainqueur clair risque également d’exacerber les mécontentements, dans un pays où les élections sont le théâtre d’affrontements. Dimanche, déjà, des heurts ont éclaté sur l’île de Malaita, traditionnellement opposée à la politique prochinoise de Manasseh Sogavare. Jusqu’au virage opéré en 2019, en faveur de Pékin au détriment de Taïwan, Malaita bénéficiait en effet d’un fort appui taïwanais en matière d’aide au développement.