Au moment d'examiner le budget 2023, regard sur la situation financière de la Nouvelle-Calédonie en 2022

Siège du gouvernement calédonien à Nouméa.
Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a une mission délicate autant qu’urgente, ces mercredi 29 et jeudi 30 mars : examiner les trois budgets de la Nouvelle-Calédonie pour l’exercice 2023. En attendant que s'achève le marathon des débats, NC la 1ère pose une partie du contexte en rappelant quelques grands chiffres présentés au début du mois, lors des orientations budgétaires.

Après l’examen - contesté - au gouvernement, place à l’étape cruciale du Congrès. Les élus du boulevard Vauban sont convoqués mercredi 29 et jeudi 30 mars pour se prononcer sur les trois budgets de la Nouvelle-Calédonie (budget propre, budget de répartition et budget de reversement). Un exercice à effectuer avant la date-butoir du 31 mars. En parallèle de cette session, NC la 1ère rappelle quelques grands chiffres qui posent le décor, en termes de finances calédoniennes. Ils sont issus du rapport présenté par le gouvernement le 2 mars au même Congrès, lors du débat sur les orientations budgétaires.

201 % d'endettement fin 2022

Le niveau d'endettement de la Nouvelle-Calédonie de 2016 à 2022.

Depuis 2018, le niveau d'endettement propre de la Nouvelle-Calédonie dépasse le seuil d'alerte, qui est évalué à 90 %. Pour le contenir, le recours à l'emprunt a fortement diminué. Mais en 2020 puis en 2022, il y a eu les deux prêts exceptionnels destinés à affronter les effets de la crise sanitaire, consentis par l’Agence française de développement, avec garantie de l’Etat : le premier de 28,6 milliards de francs CFP et le second de 20,8 milliards. Résultat, fin 2022, le taux d’endettement arrivait à 201 %, et l’encours de la dette (en substance, ce qu'il reste à rembourser aux banques) atteignait le record historique de quasi 80 milliards. 

Un taux d’épargne à 14 %

L'évolution de l'épargne brute.

Les autres indicateurs financiers d’importance, concernant la Nouvelle-Calédonie, s'avéraient aussi dégradés, fin 2022. L’épargne brute se montait à 5,8 milliards. Le taux d’épargne, rapport entre cette épargne brute et les recettes réelles de fonctionnement, était de 14 %. L'AFD recommande qu’il dépasse 15%. On précise que ce ratio permet de mesurer la capacité de la collectivité à dégager des ressources propres de fonctionnement, pour financer ses dépenses d’investissement et rembourser ses emprunts.

Cette épargne brute était de 7,1 milliards en 2021. La baisse d'une année sur l'autre est notamment attribuée à une hausse des subventions et des participations, dans le cadre du soutien marqué aux établissements publics pour marquer une relance après la crise Covid.

Les dépenses de personnel à 38 %

La part des charges de personnel dans le fonctionnement de la Nouvelle-Calédonie.

Toujours en 2022, la part des dépenses de personnel au budget de la Nouvelle-Calédonie a atteint 38 % des recettes réelles de fonctionnement. Cette part est contenue d’année en année mais le seuil de référence qu'il est recommandé de ne pas dépasser est de 36 %.

Fonds de roulement : six jours seulement

Le fonds de roulement dont dispose la Nouvelle-Calédonie.

Enfin, au 31 décembre 2022, le fonds de roulement de la Nouvelle-Calédonie était estimé à 1,1 milliard et se limitait à six jours. C’est-à-dire que la capacité à assurer les dépenses de fonctionnement et d’investissement avec le contenu des caisses était estimé à seulement six jours. C’est mieux que les quatre jours de 2021 ou les trois jours de 2019. Mais il est fortement conseillé de dégager et maintenir un fonds de roulement équivalent, au minimum, à 30 jours de dépenses réelles. Pour le bon fonctionnement de la collectivité, et pour assurer des délais de paiement convenables. Le fait que ce ne soit plus le cas depuis 2018 a engendré des tensions de trésorerie importantes.

Ce qu’il restait de l’emprunt à 20,8 milliards

A quoi a servi la somme empruntée en 2022 à l’AFD, pour continuer à financer la crise Covid ? En fin d'année dernière, ces 20,88 milliards avaient été dépensés à hauteur de 93 %. Ce qui représentait 19,26 milliards.
12,238 milliards ont servir à maintenir les régimes sociaux :

  • 10 milliards pour écoper le trou du Ruamm,
  • et le reste pour d’autres régimes sociaux en déficit.

4,647 milliards ont été affectés à la relance économique :

  • presque 2,5 milliards pour financer le plan pluriannuel d’investissement de la collectivité,
  • un milliard de créance versé en juin à la société Enercal
  • et 1,183 milliard pour rembourser les prêt à taux zéro des établissements publics (versé en décembre pour l’OPT et le Port autonome),

1,485 milliard a été dédié à des mesures économiques :

  • 635 millions de dotation pour la remise en état des hôtels réquisitionnés à des fins de quarantaine,
  • 600 millions de dotation pour des allocations de chômage partiel à verser sur des dossiers reçus tard,
  • 210 millions en subvention à la clinique Kuindo-Magnin de Nouméa
  • et quarante millions pour les premiers remboursements liés à la prise en charge des frais funéraires durant la crise Covid (leur mise en œuvre a été retardée pour un problème juridique, explique le gouvernement).

Enfin, 890 millions sont considérés comme des dépenses de gestion de crise : 

  • 600 millions finançant des tests anti-Covid, la vaccination, etc ;
  • 136 millions présentés comme des dépenses sanitaires de la DASS ;
  • 53 millions en réquisition de transport aérien ;
  • 44 millions en réquisition des hôtels ;
  • 40 millions pour la vacation de personnel
  • et 18 millions à la gestion des hospitels.

201 milliards de recettes fiscales 

En 2022, les rendements fiscaux en Nouvelle-Calédonie ont atteint des niveaux si élevés qu’on n’avait plus vu ça depuis 2015. Les recettes se sont montées à 201 milliards de francs CFP. Le rendement de la taxe générale sur la consommation, par exemple, a atteint en 2022 son plus haut niveau depuis sa mise en œuvre, en 2018. La TGC nette de l’année s’est élevée à 48,58 milliards (en somme recouvrée). La hausse dépasse cinq milliards en un an. 

Restons sur la TGC, afin d'illustrer à quoi peut tenir cette croissance inédite des rentrées fiscales. Selon le gouvernement, elle est surtout due à l’augmentation de la valeur des produits importés (+ 52 % sur un an), portée par la hausse de la valeur CAF ("coût, assurance, fret"), et à un volume des importations plus important (+ 11%), lié à la reprise d’activité des entreprises. "De même, avec une consommation des ménages qui s’est maintenue, la hausse des prix à la consommation a accru mécaniquement les recettes de la TGC." Quand la vie chère a des effets positifs...

L’impôt sur les bénéfices des sociétés "a aussi fortement pesé dans ce redressement des recettes fiscales en 2022". Les recettes de l’IS brut ont augmenté de 19 %. L’impôt sur le revenu des personnes physiques brut a quant à lui enregistré + 4 % de recettes en plus.

+ 4,9 % d'inflation

Courbe de l'inflation en Nouvelle-Calédonie.

En décembre 2022, l’indice général des prix à la consommation était en hausse de 4,9 % comparé à décembre 2021. Une augmentation des prix qui concernait tous les types de produits en dehors de ce qui est manufacturé : + 11 % pour l’énergie, + 10,9 % pour l’alimentation, + 9,3 % pour le tabac. Une situation attribuée aux conséquences de la guerre en Ukraine, à celles de la crise Covid, à la flambée subie par les cours mondiaux des matières premières. Localement, on percevait "les effets de la mesure gouvernementale relative au tabac et les dégâts des intempéries" qui ont touché le pays début 2022. "Mais c’est surtout au travers de ses importations que la Nouvelle-Calédonie [a été] impactée par les pressions inflationnistes mondiales."