Du budget 2025 examiné ce vendredi 28 mars au Congrès, on ne connaît pas encore tous les détails. Mais les grandes lignes communiquées à la presse par le gouvernement laissent transparaître l'imposant poids de la dette.
Cette année, son remboursement représente un quart du budget propre. Près de 53 milliards de francs seront ainsi affectés à ce poste de dépense, la majorité de la somme (46,6 milliards) étant destinée à restituer les avances consenties par l'État dans la gestion de la crise l'année dernière.
À titre de comparaison, la dette totale de la Calédonie représentait 80 milliards de francs en début d'année dernière. Le budget primitif 2024 avait consacré moins de quatre milliards à son remboursement.
Taux d'endettement en hausse
Et la tendance n'est pas près de s'inverser : environ 95 milliards de recettes de l'exercice budgétaire 2025 seront ponctionnées sur le prêt de 120 milliards consenti par l'Agence française de développement. La moitié de cette somme permettra de rembourser de précédents prêts.
Après avoir dépassé le seuil d'alerte, de 90 %, en 2018, le taux d'endettement du territoire (le montant de la dette rapporté aux recettes de fonctionnement) a grimpé au fil des ans, alourdi dans un premier temps par les deux prêts Covid. Fin 2023, il atteignait 153 % et tournerait désormais autour des 500 %, en raison des emprunts massifs liés à la crise insurrectionnelle. C'est sans compter les intérêts.
Rien que pour le prêt de 120 milliards, qui doit être remboursé à partir de 2027, la Nouvelle-Calédonie devra s'acquitter de 15 milliards de francs sur les trois prochaines années ... soit près de trois fois le budget annuel de la deuxième ville du territoire, Dumbéa.
Sujet de discorde
Le principe d'emprunts conséquents, qu'il faudra nécessairement régler par la suite - probablement au moyen d'autres prêts - suscite d'ailleurs des tensions au Congrès. Plusieurs groupes alertent depuis quelques mois sur la soutenabilité de la dette.
"Nous ne pouvons pas faire peser sur les générations d'aujourd'hui et de demain une dette qu'elle ne sera jamais en capacité de rembourser", déclarait la cheffe du groupe Rassemblement au Congrès, Virginie Ruffenach, mi-décembre. Le mouvement se montre plus discret sur la question depuis que son président Alcide Ponga a été placé à la tête de l'exécutif.
"On a la tête dans l'eau [...] Sans l'État, la Calédonie ne peut pas s'en sortir", avait indiqué au sortir de son élection le chef du dix-huitième gouvernement, interrogé quant à son positionnement vis-à-vis de la politique d'emprunt.
Échanges tendus en commission
Les autres groupes n'en ont pas pour autant abandonné leurs critiques. Le sujet aurait provoqué quelques échanges houleux en commission, avant l'examen prévu ce vendredi. Certains ont prévu de s'abstenir lors du vote pour marquer leur désaccord, à l'image de l'Éveil océanien. "À celles et ceux qui ont sollicité le prêt d'en assumer la responsabilité. C'est un cadeau sur le court terme qui deviendra un poison sur le long terme", estimait son président Milakulo Tukumuli, invité du JT dimanche 23 mars.
Le parti Calédonie ensemble, qui milite de longue date pour la mise en place de subventions plutôt que de prêts, n'a quant à lui pas encore pris de décision pour son vote de vendredi. Ses membres attendent notamment d'y voir plus clair sur les réformes qui seront exigées par l'État, en contrepartie de la deuxième tranche du "grand prêt" de l'AFD. D'après nos informations, la convention devrait être signée lors de la venue de Manuel Valls, ce samedi.