Pour les élus du Congrès, l'égalité professionelle entre les hommes et les femmes passe aussi par la vie de famille et la parentalité. Notamment pour tout ce qui concerne l'arrivée d'un enfant. Le travail préalable pour l'élaboration de ce texte de loi, mené auprès des professionnels, s'appuie entre autres sur les "1 000 premiers jours de la vie". Un concept développé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Selon Henriette Tidjine-Hmae, rapporteur spécial pour cette loi, "il constitue une période clé pour le développement d’un enfant".
Un aménagement pour les naissances prématurées
C'est un véritable soulagement pour l'association "Nos bébés kangourous". Sa présidente, Ophélie Muret, a même suivi toute la séance du Congrès en direct. Si cette association, créée en 2017, a pour but principal de soutenir les parents de bébés prématurés pendant et après l'hospitalisation, ses membres ont aussi pour mission la sensibilisation des institutions. Ils sont en contact avec les membres du gouvernement calédonien depuis 2018, pour faire évoluer la réglementation. En Nouvelle-Calédonie, 300 enfants naissent prématurément chaque année, dont soixante grands prématurés. Cette loi du 4 mai 2023 est donc une victoire pour l'association. "Avant ça, rien n'était prévu pour les parents, détaille Ophélie Muret. Quand on a commencé à travailler sur ce dossier, on s'est appuyé sur ce qui existe ailleurs, notamment en France. Et on est très satisfait des avancées adoptées par cette loi."
Reprendre le travail alors que son bébé est encore à l'hôpital
Concrètement, avant cette loi, dans le cas d'une naissance de grand prématuré, une maman qui avait accouché plusieurs semaines avant son terme n'avait que très peu de temps avec son bébé, après une longue période en service de néonatalogie. A peine un mois, le plus souvent. Certaines devaient même, parfoi,s reprendre le travail alors que leur bébé était encore hospitalisé. "Ce n'est pas possible. Cela ne laisse ni le temps de se reposer, ni de créer un lien avec son enfant, ni de prendre ses marques. D'autant plus que les semaines d'hospitalisation sont très dures, avec un bébé qui se bat pour vivre. Il est aussi fréquent que les mamans vivent des périodes très difficiles après les premières semaines, comme un traumatisme."
Seulement pour les salariées du privé
Grâce à ce vote, désormais toutes les mamans, même celles qui accouchent très tôt, pourront bénéficier de 10 semaines après la date d’accouchement qui était prévue initialement. Un congé supplémentaire, en plus du congé maternité légal, sera pris en charge.
"Demandée par le conseil calédonien de la famille, cette mesure d’allongement du congé de maternité s'applique aux enfants nés plus de 6 semaines avant leur terme" précise le texte.
Reste maintenant à savoir, à partir de quand cette loi sera réellement appliquée. "J'ai contacté les services du gouvernement parce qu'on reçoit déjà beaucoup d'appels des mamans concernées", ajoute Ophélie Muret. L'association émet tout de même un bémol "car seule les salariées du privée sont concernées par cette loi pour le moment. Le public aussi doit être pris en compte, c'est indispensable."
Des allocations pour toutes
A noter, également, que toutes les allocations naissance prévues par la Cafat seront désormais versées aux mères, même lorsqu'elles auront accouché beaucoup plus tôt que leur terme. "Il a été constaté que les mères accouchant prématurément ne bénéficient pas de l’allocation prénatale du huitième mois de grossesse qui leur était versée dans les conditions d’une grossesse normale." L'allocation du sixième mois de grossesse était également concernée dans certains cas.
Une inéquité et une double peine désormais corrigées. "Il faut savoir que les parents d'enfants prématurés ont beaucoup de charges, des frais d'hospitalisation, mais pas seulement", rappelle Ophélie Muret.
S'adapter aux contraintes professionnelles
Autre mesure très concrète, pour toutes les mamans cette fois, avec cette nouvelle loi il sera dorénavant possible de fractionner la prise de congés maternité dans une période correspondant aux mille premiers jours de l'enfant, c'est-à-dire 2 ans et 9 mois, tout en respectant les semaines prénatales (2 semaines) et postnatales (6 semaines) prévues.
Le reliquat des jours non-pris pourra être utilisé ultérieurement, sans risque de le perdre. "Certaines mères expriment le désir de reprendre une activité professionnelles plus tôt, du fait de contraintes professionnelles ou d'un isolement social ressenti. Même si ces situations restent exceptionnelles, il est nécéssaire d'y répondre", détaille le texte. C'est chose faite.
"Tout savoir sur la loi du pays favorisant l’égalité professionnelle réelle entre les femmes et les hommes", NC la 1ère vous propose une série de cinq décryptages :
- Bientôt des délégués à la lutte contre le sexisme dans les entreprises calédoniennes [1/5]
- Un plan d’action pour l’égalité professionnelle et une nouvelle mesure pour protéger les victimes de faits sexistes [2/5]
- Vers un congé maternité plus flexible [3/5]
- Enfin un congé paternité pour les pères calédoniens [4/5]
- Accompagner, au sein de l'entreprise, les victimes de violences intrafamiliales [5/5]