Elisabeth Borne : "Le processus de définition d’un projet pour la Nouvelle-Calédonie est désormais engagé"

Elisabeth Borne a conclu la première Convention des partenaires, à Matignon, par une déclaration.
La première Convention des partenaires a pris fin vendredi après-midi, heure de Paris. Dans sa courte déclaration finale, la Première ministre a donné la feuille de route pour les mois à venir : lancement de l'audit de décolonisation, réalisation d'un bilan sur les transferts de compétences, groupes de travail thématiques, visite ministérielle en novembre. "La conclusion de ces travaux nécessaires à l’élaboration du projet d’avenir de la Nouvelle-Calédonie est attendue mi-2023", a annoncé Elisabeth Borne, assurant que l'Etat poursuivra le dialogue "pour que tous les partenaires politiques participent aux discussions".

En quelques minutes, un chemin tracé pour aller de l’avant. "Le processus de définition d’un projet pour la Nouvelle-Calédonie est désormais engagé", a lancé Elisabeth Borne pour conclure, devant les médias, la première Convention des partenaires qui se tenait depuis le matin à l’hôtel de Cassini.  "Je me félicite de l’esprit de responsabilité et de consensus de nos échanges, fidèle à la tradition des accords de 1988 et de 1998, il a animé les travaux de cette première journée", a salué la cheffe du gouvernement, avant de livrer les leçons de cette séquence inédite.

Audit de décolonisation et bilan des transferts de compétences

"D’abord, nous avons constaté la nécessité d’appuyer nos réflexions sur les enseignements de l’expérience, au moment où s’ouvre cette période de transition. En conséquence, sur la base des cahiers des charges validés à Nouméa par l’ensemble des forces politiques, nous sommes convenus de lancer l’audit de décolonisation qui évalue l’accompagnement de la Nouvelle-Calédonie par l’État depuis 1988 au regard du droit international. De la même manière, un bilan de l’Accord de Nouméa sur les transferts des compétences par l’État et leur exercice par la Nouvelle-Calédonie et les provinces sera réalisé pour éclairer les travaux de la Convention des partenaires."

Convention des partenaires le vendredi 28 octobre, à l'hôtel de Cassini.

Groupes de travail

"S’agissant de l’organisation des prochains mois, a-t-elle enchaîné, il a été convenu d’élargir le champ des discussions au-delà des seules questions institutionnelles, en abordant également les sujets vitaux pour l’avenir des Calédoniens, au sein des groupes de travail suivants, dont la liste pourra être complétée" :

  • Questions institutionnelles
  • Égalité des chances et cohésion sociale
  • Développement économique, emploi, grands investissements
  • Nickel
  • Souveraineté énergétique et transition écologique
  • Souveraineté alimentaire et foncier
  • Valeurs, identité commune et réconciliation
  • Intégration et rayonnement régional.

Organisés par le haut-commissaire et installés par les ministres

"Ces groupes de travail, a précisé Elisabeth Borne, seront organisés à Nouméa par le haut-commissaire au mois de novembre et installés par les ministres. La conclusion de ces travaux, nécessaires à l’élaboration du projet d’avenir de la Nouvelle-Calédonie, est attendue mi-2023. Les travaux de la Convention respecteront les légitimités et les compétences de chacun. Ainsi, les questions institutionnelles feront l’objet d’échanges dans un format politique ad hoc. »

"Echanges incomplets" faute de délégation indépendantiste

Et de finir sur l’absence marquée et remarquée des voix indépendantistes. « S’ils ont été denses et fructueux, les échanges ont été incomplets en raison de l’absence d’une partie des forces politiques. Le processus que nous avons engagé aujourd’hui ne peut aboutir que si toutes les forces politiques calédoniennes y contribuent. Tous les partenaires présents l’ont affirmé, en rappelant la nécessité de rechercher le consensus. Avec Gérald Darmanin et Jean-François Carenco, nous poursuivrons le dialogue pour que tous les partenaires politiques participent aux discussions dans l’intérêt de la Nouvelle-Calédonie. Cet objectif sera affirmé par les deux ministres à l’occasion de leur déplacement au mois de novembre."

Une séquence censée relancer la dynamique et le dialogue entre les partenaires de l'Accord de Nouméa, mais d'ores et déjà entachée par l'absence de l'un des trois. À l'exception du président de la province Îles, les indépendantistes n'ont pas accepté l'invitation de l'État malgré le séjour, salué, de Jean-François Carenco courant septembre. Ils ont déclaré que "tout calendrier était caduc" et qu'ils ne discuteraient plus désormais que "sur la base de l'indépendance". Dans cette perspective, le déplacement à Paris, où État et loyalistes entendent justement décider d'un calendrier, était exclu pour eux.

Au contraire de la famille loyaliste largement représentée. Pour la première fois, et c'était pour certains un motif de désaccord, des représentants de la société civile ont été par ailleurs associés aux échanges.

Des participants "satisfaits" mais qui "regrettent l'absence" des indépendantistes

Philippe Dunoyer, député de la 1ère circonscription de Nouvelle-Calédonie, salue le fait que le dossier calédonien soit "pris à bras le corps par l’État". "Les discussions ne font que commencer, rappelle l’élu. On a tous unanimement regretté l’absence des indépendantistes. On a tous convenu qu’aucune solution ne sera possible sans recherche et obtention de ce consensus."

Sonia Backès, présidente de la province Sud se dit "très satisfaite" des discussions même si, elle aussi, "regrette" l’absence des indépendantistes et souhaite "qu’ils reviennent autour de la table".

C’est le premier jour de la construction de l’après accord de Nouméa. Après 10 ans d’accords de Matignon, après 24 ans d’accord de Nouméa, après 4 ans de référendum, on va pouvoir construire enfin un statut pérenne pour que nos enfants sortent de l’incertitude dans laquelle on vit depuis trop longtemps.

Sonia Backès, présidente de la province Sud

La présidente du groupe Avenir en confiance au Congrès, Virginie Ruffenach, espère que la venue de Gérald Darmanin et du ministre délégué aux Outre-mer, Jean-François Carenco, en Nouvelle-Calédonie fin novembre "sera l’occasion de faire venir nos camarades indépendantistes". "Nous ne sommes plus au temps des évènements, estime-t-elle. La jeune génération veut une Calédonie moderne, connectée, ouverte sur le monde et après cet accord de Nouméa et les différents référendums successifs, ils méritent, nos jeunes et la population en général, que nous puissions avancer et réformer notre territoire".

"On a obtenu ce qu’on pouvait obtenir de mieux avec l’absence des indépendantistes, c’est-à-dire un calendrier et une méthode de travail", estime Nicolas Metzdorf, député de la 2e circonscription. Lui aussi "espère qu’ils reviendront à la table des discussions" et assure que "s’ils veulent mettre et rajouter des groupes de travail qui leur sont propres, et bien ils ont tout loisir de le faire".

Selon David Guyenne, président de la Chambre de commerce et d'industrie, "ce sont des groupes de travail qui sont importants car les thématiques sont vraiment économiques et sociétales." Dans un communiqué du samedi 29 octobre, les trois Chambres consulaires de Nouvelle-Calédonie, CCI-NC, CMA-NC et CAP-NC "souhaitent avant tout remercier l’État, d’avoir associé les acteurs économiques, la société civile, aux discussions sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie." Et d'ajouter : "cela vient illustrer la reconnaissance de l’État de l’impérieuse nécessité d’inclure les enjeux économiques et sociaux dans ces discussions."

Le reportage de Sheïma Riahi

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