"Éviter le crash" pour les uns, "en défaveur de la jeunesse" pour d'autres : les réactions après l'adoption du budget 2025

Séance extraordinaire du Congrès consacré au vote du budget 2025, le 28 mars.
Le budget de la Nouvelle-Calédonie a finalement été adopté, non sans difficultés, en début de soirée ce vendredi. Après des heures de suspension de séance, les trois enveloppes ont été validées. Elles sont marquées par le poids de la dette envers l’État. Les réactions des groupes.

C'est un dénouement inattendu qui s'est produit boulevard Vauban. Alors qu'un report de séance planait au fil de la journée, les trois budgets de la Nouvelle-Calédonie ont finalement été adoptés, in extremis, vers 19 heures. Après d'âpres discussions au sein de l'hémicycle, ponctuées de longues suspensions, l'examen s'est très vite accéléré en fin d'après-midi.

En "responsabilité"

En l'absence de Paul Néaoutyine, élu de l'Union nationale pour l'indépendance (Uni), 53 élus sur 54 étaient réunis en séance extraordinaire, le vendredi 28 mars. L'adoption des budgets s'est traduite comme suit :

  • Le budget propre s'est soldé par 25 voix pour, 25 contre et trois abstentions. Mais la voix prépondérante de la présidente du Congrès, Veylma Falaeo, a fait basculer le vote. L'élue de l'Éveil océanien, installée au perchoir, n'a pas suivi l'abstention de son groupe.

"Ça n'a pas été facile. C'est dans un esprit de responsabilité pour le fonctionnement de nos collectivités, qu'en concertation avec mes collègues de l'Éveil océanien j'ai voté pour accompagner ce budget, expliquait Veylma Falaeo, au sortir de la séance. Si nous sommes réalistes aujourd'hui, nous n'avons que le prêt [de l'État] pour survivre, c'est en toute lucidité que j'ai effectué ce vote."

Le montant de l'enveloppe du budget propre s'élève donc à 205,7 milliards de francs.

  • Le budget de reversement a comptabilisé 26 voix pour, 25 contre et 2 abstentions, toujours celles de l'ÉO.

Le montant de l'enveloppe du budget de reversement s'élève à 79,9 milliards.

  • Le budget de répartition a été adopté avec 51 voix pour et 2 abstentions.

Le montant de l'enveloppe du budget de répartition s'élève ainsi à 101,8 milliards de francs.

    L'Uni demandait un report de la séance, estimant que davantage "de temps pour discuter avec le gouvernement" était nécessaire. Ce qui restera lettre morte, puisque l'examen a repris au bout de six heures de suspension, avec la ferme intention d'une majorité des élus de voter les textes, sans plus attendre.

    "Nous avons décidé de ne pas voter le budget de reversement et le budget propre de la Nouvelle-Calédonie, par contre, nous avons pris la décision de voter le budget annexe de répartition", a rapporté Jean-Pierre Djaïwé de l'Uni.

    Les pour

    Un vote à double tranchant. À quelques heures de l'arrivée du ministre des Outre-mer, Manuel Valls, pour reprendre les discussions sur l'avenir institutionnel du pays, le dilemme s'est avéré risqué face aux enjeux économiques et sociaux. D'autant que si la séance avait été reportée, une menace de mise sous tutelle de l'État aurait pesé sur la Nouvelle-Calédonie.

    Un vote de soulagement, salué par le président du gouvernement, Alcide Ponga. "C'est ce qui permettra de financer le chômage, l'électricité, les collectivités, les provinces, les communes et les établissements publics. C'est une leçon que l'on retient ce soir."

    Gilles Brial, élu de l’intergroupe les Loyalistes, se félicite du résultat en dépit du "chantage des indépendantistes" qu'il impute aux suspensions de séance. "Si demain les Calédoniens ont de l'électricité parce qu'Énercal est sauvée, s'ils peuvent se soigner parce que le Ruamm est sauvé, s'ils peuvent continuer à toucher le chômage, c'est parce qu'il y a la moitié des élus qui ont pris leurs responsabilités."

    Éviter le pire

    Un scénario catastrophe évité de justesse également selon Virginie Ruffenach, élue du Rassemblement. "Si ce budget n'avait pas été voté, c'était véritablement le chaos pour la Nouvelle-Calédonie. Je ne comprends pas qu'on mette en balance, d'un côté, le vote d'un budget, pour tous les Calédoniens [...] et de l'autre côté, quelques désignations dans des établissements publics qui sont de l'ordre du personnel. Je considère qu'on a joué aux apprentis sorciers côté indépendantiste et du maire de Dumbéa."

    Un budget voté également par Philippe Dunoyer, élu de Calédonie ensemble, mais à contrecœur. "Ce budget était essentiel pour éviter un crash [...]. Mais la mort dans l'âme puisque c'est au prix d'un emprunt, qui va endetter les Calédoniens sur plusieurs générations à des taux complètement énormes, alors qu'on aurait pu et qu'on aurait dû avoir d'autres moyens d'accompagner le territoire de la part de l'État."

    Les contre

    Les élus qui se sont abstenus ont manifesté leurs divergences à l'égard des dotations allouées à la jeunesse.

    "Je ne suis pas d'accord sur le vote du budget propre, qui n'est pas du tout en faveur de la jeunesse alors qu'elle devrait être notre préoccupation, déplore le maire de Dumbéa, sans étiquette, Yoann Lecourieux. Il annonce la fermeture des centres de formations par alternance sur l'ensemble du territoire, ne finance pas l'ensemble des établissements publics à la hauteur de ce qu'ils devraient avoir." Il s'est donc abstenu.

    Idem pour le groupe UC-FLNKS et nationaliste qui est allé dans le sens des critiques lancées en début de séance. "C'est un vote contre pour simplement confirmer que le budget reste un budget d'exclusion, dans le même élan des politiques publiques qui sont menées au niveau de la province Sud, a affirmé Pierre-Chanel Tutugoro, à l'issue du vote. Il y a comme une unité de commandement qui se met en place. C'est une organisation comme tant d'autres, comme on a vécu à certaines périodes de l'histoire du pays."