À la Bourse des métaux de Londres, l’ambiance de fête du nickel est terminée. Le sentiment dominant est une remontée de l’offre mondiale qui pèse sur les prix. Le conglomérat Tsingshuan a encore disrupté le marché, avec sa promesse d'un nickel plus abondant....
Chinois, Indonésiens et Tanzaniens veulent, eux aussi, une grosse part du gâteau de la transition énergétique, ou pour faire simple, du marché des batteries pour les voitures électriques (VE).
Depuis son effondrement, des 3 et 4 mars, le nickel a évolué dans une fourchette de 15 650 $ à 16 650 $ la tonne. Le cours actuel, diminué d’une décote de 10 % pour le ferronickel, redevient problématique pour les usines calédoniennes.
Fin février, le "métal du diable" avait atteint près de 20 000 dollars la tonne à la Bourse des métaux de Londres (LME), près de deux fois son cours de mars 2020. Hélas, la Nouvelle-Calédonie avait la tête ailleurs, occupée à résoudre les questions politiques et industrielles de ses usines de nickel.
Pourtant, "Il reste de solides arguments en faveur d’une hausse des cours des métaux industriels", a indiqué, vendredi, la note d’analyse matinale (Insights) du négociant industriel Marex Spectron. Les achats saisonniers de matières premières repartent après le creux du mois de mars et des contraintes d’approvisionnement subsistent notamment pour le cuivre.
En revanche, les perspectives ne sont pas aussi favorables au nickel. Le métal est redevenu bon marché et l’argument qui prévaut pour le cuivre ne s’applique pas au principal ingrédient de l’acier inoxydable et des batteries électriques. Pourquoi ? Le risque de pénurie s’est évanoui, comme neige au soleil de Chine...
Tsingshan a annoncé qu’il pouvait produire, et abondamment, du nickel pour les batteries électriques, domaine jusque-là réservé des usines calédoniennes, canadiennes et australiennes. "L’objectif du géant sidérurgique chinois Tsingshan, de convertir de grandes quantités de minerai de latérite en matte de nickel, puis en métal de qualité batterie, a plombé l’optimisme du marché", rappelle l'analyste Alastair Munro.
Sur la question environnementale, Tsingshan a bien compris que s’il veut exporter son nickel ou ses batteries en Europe et aux Etats-Unis - et concurrencer notamment le NHP calédonien - il devra "verdir" sa production.
Le conglomérat chinois mise désormais sur le développement des véhicules électriques couplé à une alimentation des usines par de vastes champs de panneaux solaires "écologiques". Une production "nouvelle et verte" qui, selon lui, stimulera la demande de nickel, chinois si possible.
Les analystes rapportent également que les mineurs indonésiens du nickel se sont ralliés au projet de création d’une Société nationale de production de batteries électriques (Indonesia Battery Corporation). Le ministère indonésien de l'énergie et des ressources minérales a réaffirmé que le pays continue de restreindre les exportations de minerais de nickel, afin de favoriser le développement des projets industriels locaux.
Enfin, la Tanzanie "va exploiter le plus grand gisement de nickel au monde pour y produire du nickel de qualité batterie, et même fabriquer des batteries sur place", ont annoncé plusieurs sites d’information spécialisés. Mais, avant la concrétisation du projet tanzanien il passera beaucoup d'eau dans la canal du Mozambique: "C’est un projet très ambitieux mais très difficile à réaliser, trop loin de la côte, avec des coûts d’infrastructure énormes, un projet qui sera difficile à concrétiser, a indiqué à la 1ère Jim Lennon, stratégiste du nickel pour le géant bancaire australien Macquarie. Avec ses trois usines en bord de mer et sa filière d'exportation performante la Nouvelle-Calédonie n'a pas trop de soucis à se faire, tout au moins avec la Tanzanie...
En attendant de voir si Tsingshan n’a pas bluffé, si l’Indonésie va construire sa filière batterie, il n’y pas tant de nickel que ça en circulation. Ni en Nouvelle-Calédonie, ni en Australie. Le LME termine donc la semaine en hausse avec un cours du métal à 16.390 dollars la tonne. Le nickel progresse de 1,36 % vendredi soir à Londres, et de 0,80 % sur la semaine.