Pourquoi des infirmiers libéraux ont décidé de ne plus prendre de nouveaux patients

Des dizaines d'infirmiers libéraux manifestaient déjà devant le gouvernement mardi 7 mars.
La colère reste vive, chez les infirmiers libéraux de Calédonie. À partir de ce mardi 7 mars, nombre d'entre n’assureront plus la prise en charge de nouveaux patients. Les professionnels souhaitent alerter sur leur situation qu’ils estiment de plus en plus difficile.

Dix ans qu'elle sillonne les routes pour assurer les soins des patients à domicile. Laurène, infirmière libérale de 36 ans, parcourt chaque jour 150 à 250 kilomètres. "L'essence a énormément augmenté, c'est vraiment une charge pour nous, surtout selon les zones dans lesquelles on travaille, qui peuvent parfois être très reculées. Les routes sont accidentées."

L'entretien de nos véhicules et l'augmentation de l'essence, ça a un énorme impact sur notre quotidien.

Laurène, infirmière libérale en Nouvelle-Calédonie

Levée aux aurores

Un quotidien généralement bien chargé. Pour accomplir sa tache, Laurène se lève aux aurores. "On attaque les soins en général entre 5 et 6 heures. Des fois, certains cabinets commencent vers 4 heures du matin. En général, on a une pause de 14 heures jusqu'à 15 heures et on part jusqu'à 18-19 heures, des fois plus selon les soins à prodiguer." Un rythme soutenu dont la trentenaire a rapidement pris conscience, en observant sa mère elle-même infirmière. "Elle avait des horaires irréguliers, je ne la voyais pas souvent et je me suis toujours dit que je n'imposerais jamais ça à mes enfants. Je me suis dirigée pour faire de la gestion et du commerce. Finalement, il fallait que je sois infirmière, c'était une évidence."

"Une évidence"

Après dix ans d'exercice, l'évidence est toujours là pour Lorraine, qui s'est depuis adaptée aux différentes facettes du métier. "Quand vous posez aux gens la question de savoir ce que font les infirmières, je pense qu'ils arrivent difficilement à se rendre compte de tout ce qu'on peut faire en une journée. 

On est tout terrain. On fait des soins techniques, on fait des soins d'hygiène, on fait des soins psychiques aussi, parce qu'on est là pour écouter quand les gens en ont besoin.

Laurène

Prestations pas revalorisées

Une profession que Laurène n'envisage absolument pas de quitter. Même si elle estime aujourd'hui ne pas être prise en considération par les pouvoirs publics. Voyez aussi le portrait de Rozenn, rencontrée par Caroline Antic-Martin et Gaël Detcheverry : 

©nouvellecaledonie

Les prestations des infirmiers à domicile n'ont pas été revalorisées depuis quatorze ans. La présidente de leur syndicat, Laure Favreau, déplore l'absence de mesures pour aider la profession. "En dix ans, l'essence a augmenté de 30 %, le gazole a augmenté de 67 %. Nous, on ne peut plus absorber ça. On n'y arrive plus. Sans compter que les véhicules aussi ont énormément augmenté, plus l'entretien. Ce n'est plus soutenable."

Un projet très mal accueilli

Une conjoncture difficile pour les infirmiers libéraux, qui ont de surcroît très mal accueilli le projet de réforme du Ruamm. "On nous rend responsables en partie du déficit du Ruamm mais il faut bien comprendre que ça, ça ne vient pas des infirmiers. Nous, on est juste des exécutants, on fait notre travail du mieux qu'on peut. On était présents pour la crise du Covid."

On a suffisamment contribué à faire des économies de santé. Il est grand temps qu'on nous aide nous aussi.

Laure Favreau, présidente du syndicat  des infirmiers libéraux

Ils ne veulent plus attendre

Une aide plusieurs fois évoquée avec l'exécutif. D'où la frustration du syndicat des infirmiers à domicile. Il déplore que la situation tarde à évoluer. "On pensait avoir été entendus et avoir une petite bouffée d'oxygène. Pas du tout. M. Slamet nous a redit qu'il avait entendu notre message. Néanmoins, il nous met encore en attente. Cette fois-ci, c'est par rapport à la mis une place de l'Oceam, l'objectif calédonien d'évolutions des dépenses de santé. C'est pour le moment une coquille vide." Faute d'accord avec le gouvernement, le mouvement pourrait affecter de nombreux patients ces prochaines semaines. Dans un communiqué, le syndicat affirme réclamer "une mesure d'urgence". Une mobilisation est par ailleurs prévue ce mardi matin à Nouméa devant le gouvernement.