De nouvelles violences ont été recensées, au cours de la nuit de vendredi à samedi, à Nouméa et dans le Grand Nouméa. Des riverains d'une partie de Kaméré, sur la presqu'île de Ducos, ont vécu une nuit d'horreur. Les forces de l’ordre sont intervenues. Plusieurs dizaines de personnes ont quitté le quartier par la mer. Une petite résidence de deux étages a été incendiée.
Par caméra interposée, ils ont vu leur maison brûler
Une famille qui y vivait était partie se mettre à l'abri quelques jours plus tôt. La nuit dernière, le couple a vécu l'incendie à distance, mais en direct. "On avait placé une caméra qui se déclenche à chaque mouvement, à l'intérieur de la maison, en direction de la porte d'entrée, avec les gamelles des chats", a raconté le père de famille à NC la 1ère. "Hier soir, on a eu une notification (…) Quand j'ai allumé la caméra, on a pu constater qu'il y avait des gens avec des lampes torches en train de piller notre domicile et de tout saccager l'intérieur. Le temps d'appeler mes voisins, ils avaient mis le feu. On a eu le droit à une visio de notre maison en feu."
C'est en larmes, qu'il confie son choc "de ne plus rien avoir, de devoir rentrer en France" après de longues années à construire une vie en Calédonie. "Un rapatriement d'urgence a été demandé, pour la maman et son bébé de deux mois. Le papa va tenter de sauver son entreprise et ses dix employés.
Un témoignage recueilli par Karine Arroyo et Cédric Michaut
"On nous a dit d'évacuer le quartier"
"La maison a commencé à brûler vers 19 heures", a par ailleurs décrit un riverain à NC la 1ère. "De petits bateaux sont venus nous chercher depuis l'embarcadère de Kaméré. Ils nous ont transportés sur l'îlot Freycinet", précise-t-il - c'est près de la pointe de Ducos. "De là, de plus gros bateaux nous ont récupérés et emmenés vers le centre de Nouméa, où on nous a sécurisés dans un logement. Les forces de l'ordre sont passées avec un micro dans la rue pour nous dire d'évacuer le quartier. Les enfants ont été pris en charge en priorité. Des habitants ont préféré rester pour protéger leurs maison."
"C'est très choquant"
Reste l'appréhension du retour. "On a su que notre maison avait été pillée dans la nuit comme d'autres. C'est horrible, très choquant. L’après-midi même, on était encore à discuter, on ne ressentait aucune animosité. On ne s'est jamais senti en insécurité, ici." Ce Nouméen tient à ajouter : "Les gens qui ont brûlé et saccagé les maisons du quartier ne sont pas forcément ceux du barrage" tenu dans ce secteur par des opposants au corps électoral. "Les gens du barrage nous ont dit qu'ils allaient essayer de calmer le jeu avec les jeunes."
Le haussariat a recensé 35 personnes évacuées
Dans son point de situation quotidien, le haut-commissariat apporte d'autres éléments sur ce qu'il appelle "une opération de sécurisation" menée à Kaméré. D'après son communiqué, "une trentaine de personnes ont tenté de fuir par voie maritime suite à des incendies d'habitation. La cellule de crise du haut-commissariat a été contactée. Quatre embarcations mises à disposition par des riverains ont permis l'évacuation de 35 personnes, dont sept mineurs, sous la sécurisation de la brigade nautique." Il signale aussi que "grâce à la mobilisation des formations militaires de la sécurité civile", arrivées avec les renforts, "25 personnes ont pu être hébergées dans les locaux d'un lycée (…) Dix personnes ont pu être relogées par leurs propres moyens. Aucun blessé n'est à déplorer."
Incendie et détonations
Maison incendiée également cette nuit sur les hauteurs de la Vallée-du-Tir, rue Paul-Bert. Des détonations ont été entendues en différents points : à Magenta, aux Portes-de-Fer, au 7e Km, à Tindu ou encore Normandie. Ce samedi, les services de l'Etat signalent que "des actions sont menées" à Nouméa, à Kaméré, mais aussi dans les secteurs du foyer wallisien et futunien, de l'église de l'Espérance, de Magenta, Tina ou Tuband. Le couvre-feu reste de rigueur de 18 heures à 6 heures du matin, sur tout le pays, de même que l'interdiction de se rassembler, de transporter des armes et de vendre de l'alcool.
Sept victimes et plus de 370 interpellations
Vendredi après-midi, un homme de 48 ans a perdu la vie à Dumbéa-sur-mer. Un policier a été placé en garde à vue. Le bilan humain officiel fait désormais état de sept personnes mortes par balle, depuis le début des émeutes, le 13 mai dernier. Le haussariat mentionne par ailleurs, ce samedi, 115 policiers et gendarmes blessés, ainsi qu'un total de "plus de 370" interpellations. "Des renforts humains et matériels sont encore attendus", est-il indiqué. Autre chiffre, concernant les étrangers et les touristes français, "plus de 530 personnes ont pu être raccompagnées à ce jour".