Au Mont-Dore, on s’est parlé, samedi. De visu, à un endroit fort en symbole : c’est sur la chaussée de la RP1, sous un chapiteau rapidement installé le long de la rivière la Coulée, qu’une rencontre a d'abord eu lieu en début de matinée, pour évoquer la réouverture de la route à la circulation. Et au bout d'une nouvelle journée de rebondissements, c'était fait.
Le reportage de Laurence Pourtau et Laura Schintu :
Bouclé depuis lundi
La route provinciale qui dessert la partie Sud du Mont-Dore et Yaté - 14 000 habitants - était impraticable depuis lundi, avec toutes les conséquences en cascade d’un si long bouclage, à peine interrompu par les ballets de bateaux.Délégations
Vers 7 h 30 samedi, après un échange de coutumes, la discussion a commencé avec :- d’une part, une délégation représentant Saint-Louis, où la RP1 a été longuement bloquée par un barrage, de nombreux obstacles et des confrontations avec les forces de l’ordre, dans le cadre du dossier usine du Sud ;
- d’autre part, une délégation représentant des habitants du Sud Mont-Dore rassemblés à l’initiative de l’association Citoyen mondorien, qui ont érigé depuis mercredi des contre-barrages dans un but de protestation et de sécurisation. «On n’a pas eu besoin de politiques pour se rassembler», insiste un habitant. «C’est apolitique, et c’est pluriethnique.»
Paroles
Les échanges de ce matin ont été sans langue de bois et sans drapeau, à l'exception de l'emblème indépendantiste affiché au-dessus d'une voiture.On s’excuse, parce que vous êtes derrière. Mais cette usine nous concerne tous. Si le barrage pète, c’est tout le monde qui va être touché : Saint-Louis, Yaté, le Mont-Dore. C’est le seul moyen qu’on avait. Ce n’est pas pour vous emmerder. Nous, on ne veut pas de Trafigura dans le pays. On a essayé de discuter pendant quatre mois. On a utilisé tous les moyens. En dernier recours, on a mis le barrage à Saint-Louis, on a voulu que ça accélère les choses. C’est grâce à vous, c’est grâce à nous, que les choses bougent.
- Désiré Tein, collectif «usine du Sud=usine pays»
Nous, on n’a pas une position sur l’usine, ce n’est pas notre combat. Ça fait trop longtemps que quand il y a un souci, vous nous bloquez, et vous pénalisez des bonnes gens. A un moment, on veut trouver des solutions durables avec vous. Vous avez des idées à défendre, il faut défendre ses idées. Mais pas en bloquant, pas en caillassant. On est un seul barrage qui bloque tout le monde. Mais on va poser nos conditions de sécurité.
Quand c’est bloqué, nous aussi, à Saint-Louis, on est bloqués. Ça nous fait mal, aussi, que ça se passe comme ça.
Je me félicite qu’une partie de la population [du Sud] se soit réunie. Après, il y a la forme. Chaque fois qu’on vient ici, le sujet numéro 1, c’est la sécurité. Après, j’ai affaire aux gens de Saint-Louis, j’ai affaire aux habitants du Mont-Dore Sud... Je ne suis pas un chef de guerre, je suis un maire. Le maire doit représenter la stabilité, mon rôle est d’apaiser.
Rapprochement
Des échanges qui se sont déroulés en présence du maire arrivé en cours, de la gendarmerie, de Yves Teanyouen responsable du lotissement les Jardins de Belep et d’une centaine de Mondoriens lambdas. Notamment l’habitant à l’origine d’un certain rapprochement, Luigi Pourcelot. Vendredi, le jeune homme avait pris l’initiative d’aller discuter avec les différentes parties prenantes. Dans la foulée, les Mondoriens avaient quitté le contre-barrage situé à l’entrée de la route de Yaté.Pas d'habitants sur le contre-barrage route de Yaté
Ce samedi matin, il fallait encore slalomer entre les débris et épaves de voiture à hauteur des Jardins de Belep, ou monter sur le trottoir pour accéder au rond-point de La Coulée depuis le Sud.On ne demande pas grand chose. Juste d’aller à Nouméa en paix, en sécurité, avec les enfants. Sans les politiques, qui mangent des langoustes mayonnaise pendant que je bois du thé avec du riz, on a ouvert le barrage de Mouirange, et on a remis le bébé entre les mains de la gendarmerie.
Doléances
L’évolution de la circulation a été suspendue aux conversations en œuvre sur le Mont-Dore, qui n’ont visiblement pas eu besoin de l’appel au dialogue au niveau politique. Citoyen mondorien a remis ses doléances à un membre local du collectif « usine du Sud=usine pays ». Elles ont été examinées côté Saint-Louis.Garantir la sécurité
Quant aux doléances en question, on pourrait les évoquer ainsi : une ouverture totale de la RP1, avec sécurité garantie, sans créneaux horaires et sans slalom entre les obstacles (ne serait-ce que pour permettre le passage des camions essence devant ravitailler les stations-service vides de carburant). Mais aussi des rencontres régulières.A la mi-journée, la traversée de Saint-Louis a été déblayée par les services techniques municipaux, avec l'aide des gendarmes et l'accord des chefferies.