La case du Sénat coutumier a brûlé dans la nuit [MàJ]

Au petit matin du 9 août 2020, il ne reste presque plus rien de la grande case du Sénat coutumier, ravagée par un incendie criminel
Vers 22 heures samedi soir, le feu a pris sur la case du Sénat coutumier qui se dressait symboliquement à Nouville. L'incendie serait intentionnel, un jeune homme a avoué les faits. Récit, et nombreuses réactions [MàJ avec sujet télé].
[MISE A JOUR DE DIMANCHE SOIR AVEC SUJET TELE]

A la fin du mois, le Sénat coutumier doit renouveler ses instances, après un an de présidence assurée par Hippolyte Sinewami-Htamumu pour l’aire Nengone. A travers toute la Calédonie, les conseils coutumiers se réunissent actuellement pour se mettre en ordre de marche avant ce congrès du pays kanak prévu les 29 et 30 août, à Maré. Et voilà que la case emblématique de l’institution est en cendres : elle a subi un incendie dans la nuit de samedi à dimanche, aux alentours de 22 heures. 

Le reportage de Clarisse Watue, José Solia et Philippe Kuntzmann (avec images Facebook) :
©nouvellecaledonie
  

Grillage forcé

Le sinistre serait d'origine criminelle : selon un témoin, un individu s’est introduit cette nuit sur les lieux en forçant le grillage côté bord de mer. La case s’est embrasée peu de temps après. Les pompiers de Nouméa se sont rendus sur place et l'incendie a été maîtrisé vers minuit, laissant un spectacle de désolation. Les bâtiments alentours ont été épargnés. 
 

Un acte volontaire

Un suspect a été rapidement interpellé. L'enquête judiciaire, confiée à la police nationale, est en cours sous l’autorité du procureur, qui a relaté les aveux du jeune homme. Se présentant comme le secrétaire-adjoint de l'association des squatteurs du radar de Nouville, il aurait agi «seul et sur un coup de tête», «par réaction à l'absence de soutien de la part des autorités coutumières». Détails ci-dessous : 
La case s'est embrasée dans la nuit de samedi à dimanche.
 

Le président du Sénat exprime «un profond désarroi»...

C'est la troisième fois qu'une case du Sénat coutumier est la cible d'un incendie, cette fois à moins de deux mois de la prochaine consultation référendaire. Interviewé ce midi sur notre antenne radio, le président de l'institution s'est montré très touché. «C'est un profond désarroi», a confié Hippolyte Sinewami-Htamumu à Claudette Trupit. «Une déception, aussi. Ça touche une structure symbolique, représentant les huit aires coutumières au niveau du Sénat coutumier. On ne peut pas mettre des [mots] pour qualifier cet acte.»
 

...et appelle au calme

«On appelle à la sérénité, au calme. Il ne faut pas oublier les échéances qui arrivent, a-t-il insisté. L'appel au calme avant tout et avancer avec précaution. Ne pas entrer dans le tourbillon des commentaires qui puissent aggraver la situation.»

Hippolyte Sinewami-Htamumu

 

Didier Poidyaliwane salue «la rapidité des autorités»

Un appel relayé par Didier Poidyaliwane. Le membre du gouvernement en charge des affaires coutumières salue aussi «la rapidité des autorités pour retrouver les coupables», aussi bien dans cette affaire que dans celle de la bannière brûlée sur l'hôtel de la province Sud.
Ecoutez-le au téléphone de Clarisse Watue : 

Didier Poidyaliwane

 
 

Le haussaire dit «sa vive émotion»

L'incendie a fait réagir le haut-commissaire. Dans un communiqué diffusé ce matin, Laurent Prévost «tient à faire part de sa vive émotion devant la destruction de ce lieu emblématique qui a vu se dérouler tant de cérémonies d’accueil pour les visiteurs et les arrivants en Nouvelle-Calédonie leur permettant ensuite de poursuivre leur chemin au sein des huit aires coutumières».
 

Le ministre réagit aussi

Le haussaire «condamne fermement cet acte qui porte atteinte à l’institution coutumière et au-delà à une institution de la Nouvelle-Calédonie». En ajoutant que «le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, qui a été tenu informé de cet incendie volontaire, a demandé au haut-commissaire de faire part également de son émotion et de son soutien au président du Sénat coutumier, Hippolyte Sinewami, avec lequel le haut-commissaire s’est entretenu ce matin». 
  

AEC fait part de sa «consternation»...

Autre réaction, celle de l’Avenir en confiance. «Le 11 juillet, nous dénoncions les exactions commises contre la province Sud et nous étions consternés des dégradations par l’incendie de la bâche exposée sur l’hôtel de la province Sud», explique la plate-forme loyaliste dans un autre communiqué reçu ce matin.
 

... et son soutien

«Aujourd’hui, c’est avec consternation que nous apprenons la destruction d’une case au Sénat coutumier. C’est avec les mêmes convictions que nous condamnons cet acte criminel dont les conséquences auraient pu être encore plus graves», poursuit AEC. «Tout notre soutien va aux sénateurs coutumiers ainsi qu’aux agents qui travaillent dans l’institution.»
 
  

«Solidarité» du gouvernement

Communiqué de la Nouvelle-Calédonie, également : son exécutif «déplore un tel acte criminel, qui touche un interlocuteur institutionnel majeur du gouvernement en matière de législation et de réglementation relatives à l'identité kanak». Le gouvernement, enfin, «tient à affirmer son soutien et sa solidarité aux sénateurs coutumiers, qui représentent la parole coutumière dans les institutions de la Nouvelle-Calédonie, nées de l'Accord de Nouméa».
 

Paul Néaoutyine y voit «un coup porté»...

«Au nom de la province Nord, de ses élus et de toute sa population», Paul Néaoutyine condamne fermement cet «acte criminel incendiaire». Pour l’élu indépendantiste, «il s’agit d’un coup porté contre la représentation coutumière et la symbolique de la case dans la culture kanak. Il s’agit d’un coup porté à l’institution chargée de la préservation et de la valorisation de l’identité kanak dans le processus de décolonisation ouvert par l’Accord de Nouméa.»
 

...et se tourne vers la justice

Et le président de la province Nord prévient : «Quel qu’en soit l’auteur, cet acte individuel inqualifiable qui intervient à quelques semaines d’une consultation décisive pour l’avenir du pays, ne saurait faire l’objet d’aucune spéculation ou instrumentalisation. Il appartient désormais à la justice de faire son travail en toute sérénité.» 
 

Thierry Santa parle d'«acte irresponsable» et de «respect»

Et puis des ressentis exprimés sur les réseaux sociaux. Comme celui de Thierry Santa. «C’est encore un acte inacceptable», pour le président du gouvernement. «Quelles que soient les circonstances, s’en prendre à nos institutions est un acte qui doit être puni et que je condamne fermement. Plus que jamais, le temps est au respect et à la responsabilité.» 

Philippe Gomès évoque «la porte d'entrée du pays»

«C’est un symbole qui est ainsi parti en fumée : la porte d’entrée du pays», publie par ailleurs le député Philippe Gomès, en écrivant : «Dès maintenant, il nous faut porter notre regard sur l’après. Le temps de la reconstruction.» 

La semaine dernière, le faré du CNC

Il y a seulement quelques jours, au soir du mardi 28 juillet, c’est à la piscine du CNC qu’un incendie a illuminé la nuit de Nouméa, détruisant le faré du Cercle des nageurs calédoniens.

Retrouvez les réactions avec Loreleï Aubry : 
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