Un lourd début de semaine, dans le Grand Sud calédonien. Ce lundi 19 février, les établissements scolaires sont restés fermés, à Yaté, de la maternelle au collège. Demain mardi, ils doivent recommencer à accueillir les élèves, avec l’apport d’un soutien psychologique. Sauf l’école de Touaourou, qui ne rouvrira pas avant la semaine prochaine. Il a été prévu de transférer les enfants de Goro, de façon provisoire, vers celle de Waho.
Dispositif de sécurité
Sur place, toujours un important déploiement de gendarmerie. Elle a mobilisé ses personnels et véhicules, y compris blindés, pour assurer la sécurité de la population. Un couvre-feu est instauré à Touaourou de 18 heures à 6 heures, jusqu’à jeudi matin. La décision se traduit par un arrêté qu’a signé le commissaire délégué de la République pour la province Sud. Il vise à empêcher la circulation et les regroupements, “sur la voie publique et dans les lieux publics” de la tribu.
Interdictions
Cela ne concerne pas les forces de l’ordre, les services d’urgence, les transports scolaires et les “déplacements personnels dûment justifiés pour des raisons impératives d’ordre médical ou professionnel”. En parallèle, une interdiction de vendre de l’alcool, de porter une arme ou d’en transporter a été décrétée par le haussariat. Elle est en vigueur jusqu’au dimanche 3 mars, à minuit.
Après un week-end dramatique
Durant le week-end, les tensions qui pesaient depuis de longs mois sur la tribu de Touaourou ont pris une tournure irrémédiable, alors que des habitants marquaient samedi la fête de l’igname. Au cours d’une nuit marquée par les violences et les tirs, deux hommes, de 48 et 57 ans, ont été tués à l’arme à feu. Trois autres hommes et une femme ont été blessés, dont l’un au point d’être admis en réanimation.
Un conflit latent
L’enquête est menée par la section de recherches de Nouméa, pour homicide volontaire et violences volontaires en réunion avec arme. Au moins sept personnes ont été interpellées. Les corps des victimes devaient être autopsiés. Le conflit qui a ainsi plongé Yaté dans le deuil court depuis plus d’un an. Le 22 novembre 2022, des blocages et des heurts impliquaient jusqu’à une centaine de personnes, comme le rappelle l’arrêté de couvre-feu. Ils ont fait deux blessés graves et entraîné des coups de feu.
Le 28 décembre 2022, c’était des dégradations, une voiture brûlée et “une personne gravement blessée au bras par un véhicule qui l’aurait percutée”. On peut encore citer les violences physiques de janvier et février 2024. L’arrêté sur l’alcool et les armes mentionne un tir dans la nuit du 14 au 15 février, qui a conduit à évacuer une victime au Médipôle.
Annulations
Dans le cadre de ce conflit, qui aurait une origine foncière, une mise en demeure d’expulsion coutumière a été prononcée par le président du conseil des chefs de clans. Celui-ci s’est aussi montré défavorable au maintien de la fête de l’igname. Au fil des semaines, différents événements ont ainsi été annulés en raison du contexte jugé explosif. Un contexte qui a vu intervenir des autorités coutumières, administratives et institutionnelles.
Prises de parole
Le paroxysme dramatique de ce week-end a d’ailleurs entraîné plusieurs réactions et appels au calme, par le maire de Yaté, le président du gouvernement, le haut-commissaire. Ce lundi encore, le conseil de l’aire coutumière Drubéa-Kapumë s’est exprimé sur NC la 1ère. Il doit se réunir en bureau exécutif, le 23 février. “On lance un appel aux familles de ne pas entrer dans cette spirale”, a dit son président, John Rock Tindao. “On recherche principalement qu'il y ait la paix et la réconciliation. On doit être dans une posture d'apaisement pour l'intérêt de tous.”