Report du référendum de projet : les clarifications et les réactions

Jean-François Carenco, Philippe Dunoyer et Nicolas Metzdorf discutent en aparté, mardi 13 septembre, à l'entrée du campus universitaire de Baco, à Koné.
Après l'annonce du report de la consultation prévue en juin 2023, les réactions se sont multipliées, mardi 13 septembre. Jean-François Carenco a apporté des précisions, dans le courant de la journée, afin de confirmer la tenue du scrutin.

La réaction du groupe Les Loyalistes ne s'est pas fait attendre, mardi 13 septembre, au lendemain de l'annonce du report du référendum de projet prévu en juin 2023. Philippe Dunoyer et Nicolas Metzdorf, les deux députés, ont interpellé Jean-François Carenco, en ouverture de la deuxième journée de rencontres à l'ordre du jour de la visite officielle en Nouvelle-Calédonie du ministre délégué en charge des Outre-mer.

"Ce n'est ni le lieu, ni le moment", a répondu, en aparté, ce dernier. Une demi-heure plus tôt, Les Loyalistes ont adressé un communiqué en réponse à la sortie inattendue du ministre délégué sur la chaîne Caledonia. "La fin de l’Accord de Nouméa et un nouveau statut constitutionnalisé en 2023 ne sont pas des options (…) Ce calendrier n’est pas une option mais un engagement de l’Etat qui ne peut être remis en cause", indique le groupe non-indépendantiste.

"Peut-être que le ministre n'a pas tout dit"

Interrogé par RRB, Jean-François Carenco indique que le référendum qui devra valider un nouveau statut juridique du territoire ne pourra se tenir sans un consensus. "Alors qu'il n'a pas encore rencontré les formations loyalistes, nous rappelons également avec la plus grande fermeté au ministre délégué aux Outre-mer que le prochain comité des signataires doit acter la fin de l’Accord de Nouméa dans les prochaines semaines", insistent Les Loyalistes.

"Jusqu'à présent, il n'était pas question de remettre en cause le référendum de projet de 2023 (…) Peut-être que le ministre n'a pas tout dit et il faut qu'il précise sa pensée", réagit sur notre antenne Nicolas Metzdorf. Le député de la deuxième circonscription et président de Générations NC doit s'entretenir, jeudi, avec le ministre délégué. Il met en avant le besoin de clarifications des Calédoniens. 

Pour Les Loyalistes, "en tout état de cause, si le calendrier de modification constitutionnelle venait à ne pas être respecté en 2023, nous exigerions en 2024 l’organisation d’élections provinciales avec un corps électoral totalement rouvert, le corps électoral gelé étant devenu caduque avec la fin de l’accord de Nouméa et aucune nouvelle disposition n’étant venu le remplacer", conclut le communiqué.

Retrouvez, ci-dessous, ce texte complet :

L'organisation d'un référendum confirmée

Entre deux visites, Jean-François Carenco a donné quelques précisions. "Oui, il y aura un référendum, pour décider ce qu'on aura décidé ensemble." 

Ce référendum de projet, il a toujours été question qu'il ait lieu, je regrette un peu que l'on se soit mal compris. Il n'y a aucun sujet là-dessus. Le référendum de projet, c'est une évidence. Je viens pour ça.

Jean-François Carenco, ministre délégué en charge des Outre-Mer

Par la suite, Gil Brial, porte-parole du groupe Les Loyalistes, a réagi à ces propos. "Ses mots étaient clairs, hier. Ils ne correspondaient pas à l'engagement de l'Etat, en tout cas pas à la continuité de la politique de l'Etat. Ce qui compte, c'est que cela soit revu, que les propos soient rectifiés et que l'on s'engage tous, indépendantistes et loyalistes, à se mettre autour de cette table et à commencer à travailler dans l'intérêt de la population calédonienne, quelle qu'elle soit."

Pour Calédonie ensemble "le calendrier ne peut être tenu"

"Parfois, il faut prendre un peu plus de temps si c'est au bénéfice de l'intérêt général", tempère pour sa part Philippe Dunoyer, le député de la première circonscription, pour qui la tenue de discussions préalables et la reprise du dialogue entre les indépendantistes, les non-indépendantistes et l'Etat sont essentielles.

Philippe Gomès, élu Calédonie ensemble se veut également réservé. "Je ne pense pas qu'on puisse parler de bisbille, c'est une question de méthode. L'idée, c'est de faire en sorte que l'on aboutisse à un consensus. Pour y aboutir, il faut parfois se donner du temps. Le temps, ce n'est pas un temps perdu, c'est un temps utile. Si on n'aboutit pas à un consensus en juin 2023, peut-être que ce sera en septembre 2023 ou en décembre 2023. Les quelques mois qui sont nécessaires pour aboutir à un consensus, il faut les prendre."

Ecoutez-le, au micro de Steeven Gnipate :

Par communiqué, Calédonie ensemble rappelle que "la date de juin 2023 pour le référendum de projet a été fixée il y a bientôt deux ans, en juin 2021. Eu égard au contexte, le calendrier ne pourra être tenu, et nous en avons fait état lors de notre conseil politique le 08 septembre". Toujours selon le parti non-indépendantiste, le président de la République aurait annoncé lors d'un dîner de travail avec les parlementaires des départements d'Outre-mer, le 7 septembre, qu'une "fenêtre pour une réforme constitutionnelle était ouverte pour fin 2023, début 2024."

Pour Calédonie ensemble "la seule dead line juridique et politique pour la Nouvelle-Calédonie, c’est mai 2024, terme de l’ultime mandat des membres des assemblées de provinces tel que prévu par l’Accord de Nouméa". Le parti souhaite qu'un consensus local soit trouvé pour que le Parlement, réuni à Versailles, modifie la Constitution, à la majorité des trois cinquièmes et qu'un projet soit proposé par référendum aux Calédoniens.

Retrouvez, ci-dessous, le communiqué de Calédonie ensemble :

Un camp indépendantiste "désolé des contradictions de l'Etat"

Le camp indépendantiste, lui, s'attriste de cette communication non maîtrisée. "Nous sommes désolés de ces contradictions de l'Etat, de ces incompréhensions alimentées par des mensonges de l'Etat. C'est dommage qu'on en soit encore là, en 2022", indique Aloisio Sako, président du Rassemblement démocratique océanien et porte-parole du FLNKS.

Pour l'Eveil océanien, l'objectif est de "trouver un consensus"

L’Eveil Océanien ne souhaite pas polémiquer sur la communication de l'Etat via le biais du ministre délégué. Le parti estime qu'il faut d'abord créer les conditions du dialogue. "Une chose qui me semble assez claire : il faut un référendum, ou en tout cas un projet d'avenir institutionnel. Le mettre via un référendum, ça c'est une question. La question, ça va être la temporalité. On sait bien que les élections de mai 2024 vont arriver, avec un corps électoral qui pose, effectivement, question. Ces questions-là, il va d'abord falloir les régler", commente Milakulo Tukumuli, son président.

"La deuxième chose, c'est rebalayer l'architecture institutionnelle, faire un bilan de l'Accord [de Nouméa, NDLR] et trois, enfin, imaginer l'avenir. Mais ça, ça prend du temps. Il y a le calendrier à respecter, mais si on ne le respecte pas, est-ce que c'est si grave que ça ? Décaler de six mois, parce qu'on aura trouvé un consensus, magnifique, définitif ou pas définitif d'ailleurs, c'est ça l'objectif concernant l'Eveil océanien."

Ecoutez-le, au micro de Steeven Gnipate :

Jean-François a maintenant l'occasion de poursuivre ses explications auprès de tous les élus Calédoniens. Gouvernement, Congrès et groupes politiques auront des entretiens avec le ministre délégué, mercredi 14 septembre.

Le reportage de Bernard Lassauce, Claude Lindor, Brice Bachon, Nathan Poaouteta et Steeven Gniptae :

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