"Un séisme de cette amplitude n'est pas quelque chose qu'on voit tous les ans”, décrypte Jérôme Aucan, océanographe

Jérôme Aucan, invité du JT le 19 mai, dirige le Centre de la Communauté du Pacifique pour les sciences océaniques.
Après le séisme, après l’alerte au tsunami, l’explication du phénomène qui s’est produit ce vendredi 19 mai, en Nouvelle-Calédonie. Un épisode qui s’est bien terminé mais qui n’est pas passé inaperçu ! Explications avec Jérôme Aucan, qui dirige le centre pour les sciences océaniques à la Communauté du Pacifique.

Soyons clairs, “il y aura de nouvelles secousses”. Jérôme Aucan dirige le Centre de la Communauté du Pacifique pour les sciences océaniques (en anglais Pacific Community centre for ocean science, ou PCCOS). Invité ce vendredi 19 mai dans le journal télévisé de NC la 1ère, il a confirmé la probabilité de sentir prochainement la Calédonie trembler, au soir d’un séisme d’environ 7.7 sur l’échelle de Richter et de l’alerte tsunami qui a suivi durant deux heures

Limite de plaque

Et de fait, l'épisode a généré des vagues inhabituelles même si leur hauteur n'était pas forcément impressionnante. Jusqu'à quarante centimètres à Maré et cinquante, à l'île des Pins. "C'est une zone très sismique, on est sur la Ceinture de feu du Pacifique", rappelle l'océanographe. "Ce séisme a eu lieu sur cette zone, sur cette limite de plaque entre le Vanuatu et la Nouvelle-Calédonie. Un assez fort séisme comme celui-là engendre tout le temps des répliques. Aujourd'hui, il y en a eues plusieurs déjà. Mais ces répliques n'ont pas, elles, déclenché une alerte tsunami, n'ont pas généré de tsunami."

Une foule de répliques !

Pour se faire une idée, le violent séisme de 13h57 a été suivi de secousses moins fortes, mais très nombreuses (force évaluée par l'Institut d'études géologiques des États-Unis, ou USGS) :

  • 5.9 à 14h06
  • 5.4 à 14h27
  • 5.3 à 15h02
  • 5.4 à 15h09
  • 5.1 à 15h50
  • 5.5 à 15h54
  • 5.2 à 16h06
  • 5.2 à 16h25
  • 5.2 à 16h36
  • 4.8 à 16h54
  • 5.1 à 17h08
  • 5.2 à 17h34
  • 5 à 18h02
  • 5.5 à 18h13
  • 4.8 à 18h23
  • 5.3 à 19h27
  • 4.6 à 19h42
  • 4.9 à 20h41
  • 4.7 à 20h55
  • 4.8 à 21h04 
  • 5 à 21h15
  • 4,9 à 21h22
  • 5.1 à 21h44
  • 5.2 à 21h46
  • 4.9 à 22h02
  • 4.9 à 22h23
  • 4.9 à 22h37…

Toutes enregistrées dans le Sud-Est des Loyauté, à environ 400 kilomètres, pour faire simple. A 19h42, une autre intervenait par ailleurs, de 4.6, que l'USGS a localisée à 263 kilomètres à l'Est de Vao, île des Pins, toujours à faible profondeur.

"A la vitesse d'un avion de ligne"

"C'est tout à fait normal, a en tout cas développé le scientifique. Même si un séisme de cette amplitude n'est pas quelque chose qu'on voit tous les ans. C'est plutôt le genre de séisme qu'on voit tous les entre deux à cinq ans, voire un peu plus." Et quoi qu'il en soit, "il y a quelque chose de très important à se rappeler, pour les tsunamis : ça voyage très, très vite. Quand on a eu la première estimation du séisme, on a vu sa position, qui était à peu près à 400 ou 500 kilomètres au Sud-Est des Loyauté. Mais comme un tsunami voyage à la vitesse d'un avion de ligne, il peut être là très vite. Pour Maré, on a vu les signes du tsunami moins de quarante minutes après le déclenchement du séisme. Les services d'alerte n'ont que très peu de temps pour pouvoir faire sonner les sirènes avant l'arrivée effective de la vague."

Faible profondeur rime avec danger

Et si on apprenait un mot, au passage ? Jérôme Aucan a décrit au JT en quoi consistent "ces séismes qu'on appelle tsunamigéniques. Ils font trembler le plancher océanique, le fond de la mer. On parle d'un tsunami superficiel, près de la surface, quand il est à moins de cent kilomètres dans la croûte terrestre. Au large de la Nouvelle-Calédonie, au Vanuatu, on a très souvent des séismes presqu'aussi forts que celui-là, mais qui sont à 400, 500, 600 km de profondeur. Ils ne vont pas faire bouger le fond marin et pas générer de tsunami."

Son entretien complet avec Thérèse Waïa :

On retiendra surtout que l'épisode sismique, largement relayé, n'a fait ni victime ni dégât. Et mis en lumière un comportement plutôt adequat des Calédoniens, ce que la sécurité civile appelle une "acculturation au risque".