Crise en Nouvelle-Calédonie. Le secteur du BTP craint l’effondrement avant la reconstruction

Une grue surplombant un chantier de construction à Nouméa, image d'illustration.
En Nouvelle-Calédonie, les dirigeants et les salariés du BTP retiennent leur souffle. Les entreprises de ce secteur, dont les difficultés se sont encore aggravées depuis les émeutes, tiendront-elles jusqu'aux chantiers de reconstruction ?

"Le secteur du BTP sera en crise catastrophique au moins pendant un an." Le président de la fédération calédonienne du bâtiment et des travaux publics énumère les difficultés rencontrées par les entreprises de la filière, en ce moment. À commencer par "la libre circulation pour nous rendre et que nos ouvrier se rendent sur les chantiers", indique Benoît Meunier, invité du journal télévisé le 19 juillet. Il cite par exemple les employés qui habitent la partie Sud du Mont-Dore "et qui ne peuvent pas se déplacer" - l'un d'eux en parle ici

Le privé à l'arrêt et le public sans capacité de prendre le relais

De façon globale, estime Benoit Meunier, "80 % des chantiers publics ont été suspendus pour le moment voire arrêtés. Il en est de même pour les chantiers privés. Faute de visibilité, les promoteurs et les clients privés attendent un retour à la stabilité et la confiance." Et d'ajouter : "On attend que le secteur public prenne le relais et malheureusement, les caisses publiques sont vides. Il faut absolument que l’État vienne aider la Nouvelle-Calédonie pour pouvoir relancer, déjà, les chantiers qui étaient en cours, et apporter de nouveaux projets."
Son entretien avec Natacha Lassauce-Cognard

©nouvellecaledonie

Recours au chômage

Les chantiers se faisaient moins nombreux, ces dernières années, mais sont devenus presqu'inexistants depuis les émeutes. De quoi fragiliser davantage les entreprises du BTP, qui subissaient déjà le manque d’activité. Résultat, près de la moitié des salariés - environ trois mille personnes - se trouvent au chômage partiel. 

En juillet, "ça prend légèrement"

Le vice-président de la fédération du batiment, François Le Bris, dirige une société de plomberie et sanitaire qui employait douze personnes. Face à l’effondrement du chiffre d’affaires, il s'est séparé d’un tiers des effectifs. 

Il y a deux cas différents. Les chantiers suspendus, jusqu’à quand, on ne sait pas, tant que la sécurité n'est revenue de manière suffisante pour qu'on puisse envoyer nos équipes sans risque. Et les chantiers définitivement arrêtés.

François Le Bris, entrepreneur dans le BTP

"On a pris des dispositions avec les banques pour trouver des accords financiers, signale-il, parce qu'on est en quasi inactivité depuis deux mois et demi. Ça reprend légèrement, au mois de juillet. On peut retravailler. On sera à 10 ou 15% de facturation par rapport à d’habitude, donc on est en grande difficulté."

En attendant les chantiers destinés à rebâtir

L'un des enjeux à l'avenir, après les nombreuses destructions des dix dernières semaines, sera la nécessité de rebâtir le pays. "D'ici dix mois, un an, on attend les chantiers de reconstruction", précise le président de la fédération du BTP. "Ça serait dommage que les entreprises périclitent d'ici là." A la tête d'une société de gros œuvre, Daniel Ochida renchérit. "Quand on parle de reconstruction, il faut qu'il y ait des entreprises capables de reconstruire."

Si on veut survivre, il y a trois conditions essentielles : conserver nos personnels et nos compétences, qu'on puisse assumer nos charges fixes et qu'il y ait une reprise d'activité le plus rapidement possible.

Daniel Ochida, entrepreneur dans le BTP

La filière pourrait reprendre quelques couleurs prochainement, grâce au financement par l’État de la reconstruction des établissements scolaires détruits.

À retrouver ci-dessus, le reportage de Loreleï Aubry et Mourad Bouretima