Le Seattle Express annule son voyage en Polynésie, des conteneurs bloqués en Nouvelle-Zélande

Photo du Seattle Express, le 1er octobre 2021.
Un porte-conteneur qui devait décharger à Papeete le 16 octobre a fini par annuler son voyage en Polynésie. En cause : le remorqueur du port Aito Nui II toujours en panne. Le Seattle Express, un mastodonte des mers de 294 mètres, ne prendra pas le risque de venir à Papeete sans certitude de pouvoir accoster.

Après l'épisode du Cap Jervis bloqué au large de Papeete à cause d'une panne sur l'un des deux remorqueurs du port, le Seattle Express — qui a d'abord reporté son voyage le 30 octobre — a décidé d'annuler son passage en Polynésie. Le porte-conteneur de 294 mètres a besoin de deux remorqueurs avec une force de poussée de quarante tonnes pour pouvoir manœuvrer dans la rade de Papeete sans risque.

Or, il ne reste toujours qu'un seul remorqueur en état de marche au port : insuffisant pour tracter les gros navires de marchandises. Si la Marine nationale a pu se mobiliser et rendre possible le déchargement du Cap Jervis le 04 octobre dernier, les moyens militaires disponibles ne suffisent pas non plus pour contrôler la trajectoire du Seattle Express, qui mesure 34 mètres de plus que le Cap Jervis. Les remorqueurs de la Marine sont vieux de plus de trente ans et possèdent une capacité de poussée d'environ dix à douze tonnes.

Un remorqueur de Nouvelle-Calédonie à la rescousse

Le Aito Nui II ne devrait pas être réparé avant quatre à six mois, selon nos informations. Ce dysfonctionnement risque d'impacter toutes les futures opérations de remorquage et donc, l'approvisionnement du Pays.

Selon nos sources, une convention serait en cours de signature avec l'usine du nord de Nouvelle-Calédonie pour faire venir l'un de ses remorqueurs d'une capacité de quarante tonnes, mais, là encore, l'expédition prendra au moins un mois. 

Le porte-conteneur remorqué par Aito Nui et le remorqueur de la Marine nationale, vendredi 04 octobre 2024.

Inquiétude dans les sociétés d'importation

Les sociétés d'importations s'inquiètent. À l'image de Poly Import, déjà impactée par le retard de déchargement du Cap Jervis la semaine dernière. Un retard qui engendre un coût supplémentaire avec des marchandises qui périment.

Cette fois, c'est pire. Le conteneur de Poly Import a été déchargé en Nouvelle-Zélande. "Il est prêt depuis dimanche. Imaginez l'état de mes pommes de terre" déplore Ilona Laugeon, gérante de la société.

Et elle n'est pas la seule puisque "plusieurs centaines de conteneurs destinés à la Polynésie avec beaucoup de produits réfrigérés" étaient à bord de ce navire, indique l'agent maritime en charge du Seattle Express à Tahiti.

Selon nos informations, le navire de la compagnie Maersk ayant lui aussi annulé son escale à Papeete, c'est un porte-conteneur de CMA-CGM qui a été dépêché en mer exprès pour récupérer les conteneurs bloqués en Nouvelle-Zélande. Ces marchandises arriveront donc le 06 novembre prochain.

Les agents maritimes n'ont pas eu le temps d'anticiper ce problème de remorquage puisqu'ils n'ont eu vent de la panne du Aito Nui II que lors de l'incident avec le Cap Jervis, raconte notre source.

Le Aito Nui II amarré à la cale de halage.

Le ministre de l'Economie Warren Dexter avait abordé le sujet juste après sa nomination le 02 septembre dernier. "L'enjeu aujourd'hui est de savoir si on approfondit la passe de Papeete. Parce que les gros conteneurs qui nous amènent nos marchandises chaque année sont appelés à devenir de plus en plus gros. Si on ne creuse pas la passe de Papeete, ils ne pourraient plus passer". Néanmoins, le président Brotherson n'est pas favorable à cette solution, a affirmé Warren Dexter.

Le ministre l'avait prédit : "si les gros porte-conteneurs ne viennent plus à Papeete, ils déposeraient leurs conteneurs en Nouvelle-Zélande." Mais alors, comment les récupérer ? "Est-ce qu'on continue à faire appel à du privé, donc des transporteurs qui auraient des navires plus petits ou est-ce qu'on développe nos propres filières ? Vous savez qu'on a une flottille administrative sous-utilisée. L'idée est de savoir si on ne doit pas utiliser ce personnel pour cette mission ? Beaucoup de professionnels nous disent que ce ne serait pas une bonne idée parce que c'est un métier très particulier. C'est vrai qu'il faut qu'on puisse maîtriser les tenants et aboutissants. Mais l'enjeu est suffisamment important pour qu'on puisse se donner les moyens de réfléchir" avait exposé Warren Dexter. 

Il faudra trouver une solution pérenne puisqu'on est encore loin de l'autosuffisance alimentaire... Nous importons 70% de ce que nous consommons et 95% de ces importations sont acheminées par voie maritime.