Jeudi soir, la préfecture de La Réunion a communiqué deux mesures renforcées pour éviter de nouvelles violences urbaines comme celles de Saint-Benoît le week-end dernier.
D'un côté l'interdiction du port et du transport d'armes - de toutes sortes - et de munitions, jusqu'au 29 avril prochain, et de l'autre, celle d'organiser des combats de rue, jusqu'au mardi 2 avril.
Regardez les précisions de Réunion La 1ère :
Sabre et gomme-cognes dans le viseur
Est particulièrement visé par l'interdiction le port de sabre, arme avec laquelle des jeunes ont été vus lors de regroupements sur la voie publique notamment à Champ Fleuri fin février dernier. L'usage de gomme-cognes a aussi été constaté, "y compris de façon menaçante pour les habitants et pour les forces de l'ordre".
"Un jeune qui se promène dans les rues de Saint-Denis ou Saint-Benoît n'a pas à avoir un sabre. Si une personne est identifiée avec un sabre, il faut qu'elle sache qu'elle s'expose à des condamnations pénales qui peuvent aller jusqu'à 75 000 euros et 5 ans d'emprisonnement"
Jérôme Filippini, préfet de La Réunion
Les combats de rue, "pas une tradition culturelle"
Concernant les combats de rue, Jérôme Filippini tient à souligner qu'il ne fait pas d'amalgame avec les traditions culturelles ou les arts martiaux. Ici, ce sont "des jeunes qui se rassemblent, se défient, se violentent et sont auteurs de débordements sur la voie publique et ça c'est absolument inacceptable", rappelle le préfet de La Réunion.
"Cet usage des combats de rue n'est pas une tradition culturelle, juste un phénomène qui ne peut pas être accepté. Demain, si on veut conduire des arts martiaux, y compris de la capoeira ou du moringué, et qu'on veut le faire dans un cadre organisé habituel, il n'y a aucune raison d'être contre ça"
Jérôme Filippini, préfet de La Réunion
En outre, si l'interdiction de combats de rue court de ce vendredi soir jusqu'à mardi matin, elle pourra être reconduite si elle n'est pas respectée, affirme le préfet.
"Violence inqualifiable et anormale"
Ce faisant, Jérôme Filippini, le préfet de La Réunion, estime prévenir de nouveaux épisodes de violences comme il en a été constaté dernièrement à Saint-Denis, Saint-André, ou encore plus récemment Saint-Benoît.
"Plusieurs communes connaissent des faits de violence inqualifiable et anormale. Des jeunes qui s'attroupent, se défient, entre gens de même quartier ou de différents quartiers lors de combats de rue, créent des troubles à l'ordre public, agressent les pompiers et forces de l'ordre..."
Jérôme Filippini, préfet de La Réunion
Des rassemblements évités
Au-delà de ces faits observés, d'autres ont pu être évités, se félicite le représentant de l'Etat. Grâce à un service de renseignement efficace, "un certain nombre d'attroupements et de rassemblements, de tournages de clips menaçants avec des arts martiaux et des airs belliqueux" ne se sont finalement pas tenus.
Jérôme Filippini évoque aussi de "nombreuses interpellations", ou encore l'incarcération d'un auteur de refus d'obtempérer, "condamné à 3 ans et demi de prison".
Un sujet à traiter sur le long terme
Pour autant, les deux mesures prises par la préfecture ne représentent que le début des actions de lutte contre ce phénomène de violence constaté à La Réunion. "Il y a une tolérance zéro face à ces actes-là. Ça ne va pas se régler du jour au lendemain, c'est toute l'année 2024 au moins qu'on va devoir travailler sur ce sujet-là", dit le préfet, conscient du travail qui l'attend.
Ce travail sera notamment mené avec les élus réunionnais dès la semaine prochaine. Une rencontre est d'ores et déjà prévue, pour "parler de tous ces sujets là avec sérénité, réactivité et sang-froid".
L'Etat attendu sur la répression
Mercredi, les élus de l'Association des maires de La Réunion s'étaient rencontrés à Saint-Benoît, et avaient entre autres exprimé leurs attentes quant à l'Etat. Jérôme Filippini semble les avoir entendus, et annonce une "mobilisation majeure sur le volet de la répression".
Le rectorat, la CAF et les bailleurs sociaux conviés
Toutefois, sur le volet prévention, il faudra engager les efforts, aux côtés de l'Etat, du conseil départemental, des communes, du tissu associatif, rappelle Jérôme Filippini. Et comme réclamé par les maires, d'autres acteurs seront invités à la préfecture : le rectorat, la Caisse d'allocations familiales, les bailleurs sociaux...
Attention particulière en fin de journée
C'est un réel partenariat que l'Etat entend nouer avec les maires. Pour par exemple apporter une attention particulière aux "fins de journée", moment où l'agitation peut commencer à se faire sentir dans certains quartiers.
"Il y a sans doute un effort collectif à faire pour que les fins de journée soient mieux couvertes. Elles le sont par la police d'Etat et le gendarmerie, il faut qu'elles le soient aussi plus par la police municipale et par tous les instruments de médiation, c'est ça dont on va parler avec les maires"
Jérôme Filippini, préfet de La Réunion
Un pacte autour des "mineurs délaissés"
Une thématique qui ne sera pas oubliée, c'est celle des "mineurs délaissés", et plus généralement du "non-exercice de l'autorité parentale". Des mineurs qui, "quand ils sont tout jeunes sont de futures victimes et quand ils sont plus vieux deviennent des auteurs de faits inqualifiables", décrit Jérôme Filippini.
Ce dernier annonce son intention de signer, la semaine prochaine, un "pacte renforcé pour l'année" avec les maires, sur "le traitement de ces questions de mineurs délaissés", parce qu'"on ne peut plus continuer à tolérer ça".
"On y arrivera tous ensemble"
Mercredi, plusieurs maires avaient interrogé la responsabilité de l'Etat dans la résolution du problème. Comme une réponse à ces interrogations, le préfet de La Réunion les appelle à faire front ensemble pour apporter une réponse aux violences urbaines.
"Je salue la mobilisation et la réaction des maires, elle me fait plaisir. Parce que nous ne pouvons pas nous renvoyer la balle ou avoir le sentiment que les uns font et les autres ne font pas. On y arrivera tous ensemble"
Jérôme Filippini, préfet de La Réunion