"La savane, un zarlor'", "Touche pas nout savane", "Non au béton", "Stop béton, stop savane", "La Terre, notre mère", sont les messages apposés sur les pancartes du collectif de citoyens engagés "Protège nout' savane", ce dimanche 29 septembre 2024, du côté de Plateau Caillou à Saint-Paul.
Sur cet espace naturel régulièrement soumis à des incendies récurrents, les tractopelles sont sur place et des travaux de terrassement ont été menés depuis le mois de mai dernier. L'aménagement de la ZAC 3 Renaissance, près de l'échangeur de Plateau Caillou, est un projet qui s'étend sur 90 hectares.
Regardez le reportage de Réunion La 1ère :
Résorber la crise du logement ?
Porté par la SEDRE, Société d’Equipement du Département de La Réunion, ce projet tend à résorber la crise du logement à La Réunion.
Entre 2023 et 2024, le nombre de logements en construction a diminué de 16,1% sur l'île, (-13,1% pour les locaux non résidentiels). Dans le même temps, 48 000 demandes de logements sociaux sont en attente sur l'île, dont 11 900 dans l’Ouest et 5 130 à Saint Paul, d'après les chiffres communiqués par la SEDRE.
"Face à la crise du logement qui frappe actuellement, ce projet est important pour La Réunion", avait réagi Yannick Payet Fontaine, directeur général de la SEDRE, dans un communiqué publié le 20 septembre dernier. Mais le collectif de citoyens ne l'entend pas de cette oreille. "Touche la savane, c'est toucher La Réunion en entier", s'accordent-ils à dire lors de cette deuxième mobilisation ce dimanche.
Le collectif interpelle les collectivités
Pour certains, la question se pose : "pourquoi détruire un espace naturel quand des projets d'aménagement sont déjà à l'étude sur des terrains en friche ?".
"En 2018, on a promis un projet d'écocité avec 25 000 logements, on n'entend plus parler. Alors, on voudrait comprendre pourquoi ici on se battrait pour si peu de logements ?, alors qu'en réalité, on attend tous le projet de 2018", affirme Geneviève Payet, secrétaire régionale d'Europe Ecologie Les Verts Réunion.
Par ailleurs, le bailleur soutient, quant à lui, qu'il s'agit là d'un projet d'intérêt général, qui permettrait de proposer 2 000 nouveaux logements, pour moitié sociaux et pour autre moitié libres, mais aussi de doter Plateau Caillou d'une offre de services et d'équipements publics.
Avec cette mobilisation, les membres du collectif espèrent provoquer une réaction au sein de l'opinion publique, mais surtout auprès des élus. Le collectif pointe notamment du doigt une absence de réponse de la part des collectivités, voire un silence total. "On essaie de montrer qu'il y a eu une erreur d'appréciation sur la valeur de cette savane. On nous ignore. Il faut le reconnaître, revenir en arrière, discuter du projet et se remettre en concertation avec une discussion quasiment absente dans ce projet", souligne Elie Payet, lui aussi membre du collectif "Protège nout savane".
"On demande l'annulation du projet"
Une pétition pour abandonner ce projet a déjà recueilli près de 20 000 signatures. Lancée en juillet dernier, elle tend à exprimer "la volonté populaire", du moins celle de 20 000 personnes signataires.
Les promoteurs immobiliers ne comprennent pas que nous, créoles, et que La Réunion en entier, ne voulons plus que nos écosystèmes soient détruits au profit des requins de l'immobilier et des lobbyistes. Ça ne profite qu'à une élite, ça ne profite pas aux créoles. On demande l'annulation du projet. C'est le pouvoir de l'argent contre celui de la nature. C'est détruire la nature pour privilégier l'argent. On ne veut pas de ça. Laiss' nout' savane tranquille !
Johnny Lebon, écrivain, conférencier et membre du collectif "Protège nout savane"
Une chaîne humaine au cœur de la savane
Une chaîne humaine s'est formée autour de la savane pour la défendre et pour la préserver.
"Pour moi, c'est un engagement. Nou doit empêche le béton monte partout à La Réunion. Nou lé là pour les générations qui vient. Écologiquement c'est un désastre. Nou dit non à ce band' bétonnage komsa, nou tienbo nou largue pa. Nou va rest' la minm pou empêche ça", lance Roselyne, en brandissant sa pancarte "Non au béton".
Elie Payet réclame plus de soutien et de visibilité. "La dernière mobilisation, c'était plus une sensibilisation. On voulait lever le voile sur ce que c'était ce chantier. Aujourd'hui, on conteste vraiment. On est contre la bétonnisation de la savane !", s'exclame-t-il.
Le collectif assure que d'autres mobilisations seront prochainement prévues.