Alors que les quotas de crabes des neiges ont été atteints par les pêcheurs de Saint-Pierre et Miquelon en avance, les étals de poissons frais restent peu fournis dans l'archipel. Un manque d'engouement pour la morue et le flétan qui s'explique, entre autres, par des raisons économiques.
"Vente de crabes des neiges ce matin" "Rendez-vous au bateau pour acheter du crabe" Sur Facebook, les pêcheurs artisanaux de Saint-Pierre et Miquelon préviennent des nouveaux arrivages. Photos et illustrations accompagnent parfois les publications. Sur les images, très peu de poissons, mais de nombreux crustacés orange, avec de longues pattes arquées.
Cette année, les marins ont majoritairement capturé du crabe des neiges, un produit qu'ils privilégient au cabillaud ou au flétan. Les quotas 2020, fixés à 180 tonnes, ont ainsi été atteints fin juin, avant même la fin de la saison. Celle-ci avait pourtant débuté le 20 avril avec près de trois semaines de retard, en raison du confinement liée à la pandémie de Covid-19.
"La saison a été courte et il y avait du crabe en quantité" explique Joël Jossaume, le capitaine du "Cap à Joël". Lui-même a choisi de pêcher en priorité ce produit, plus rentable selon lui, que d'autres espèces. "Le prix de la morue est trop bas pour en vivre." Le tarif du crabe à Terre-Neuve, lui, est réévalué chaque semaine en fonction des marchés. Il était fixé fin mai à 3,5 dollars la livre, soit environ 2,30 euros pour moins d'un kilo.
À lire aussi > Crabe des neiges : reprise des livraisons à Terre-Neuve sous conditions pour les pêcheurs de Saint-Pierre et Miquelon
Le flétan, autre poisson phare des eaux de Saint-Pierre et Miquelon, ne séduit plus non plus les marins de l'archipel. "L'été, on ne peut le vendre qu'à l'usine de Miquelon, car les usines de Terre-Neuve n’ouvrent qu’à l’automne", assure Gilles Poirier, pêcheur artisan à bord du "Cap percé". "Et leurs tarifs ne sont pas intéressants." Il met aussi en avant les problèmes logistiques des pêches qui durent plus de trois jours. "Il n'y a pas de machine à glace à Saint-Pierre", affirme le Saint-Pierrais. "On doit aller à Miquelon pour s'en procurer et conserver le poisson. Cela nous fait une journée de trajet, et donc une journée de perdue."
Le phénomène n'est pas nouveau. "On ne pêche plus autant que dans les années 2000", déclare le marin du "Cap Percé". Les quotas de cabillauds, plus bas, sont ainsi rarement atteints par les artisans pêcheurs. Pour l'année 2019, ils avaient le droit à 933 tonnes de ce poisson à chair blanche. Ils n'en ont capturé que 119 tonnes, selon les chiffres du service des affaires maritimes de la Direction des territoires, de l'alimentation et de la mer (DTAM).
Résultat : on trouve beaucoup plus de fruits de mer sur les étals de l'archipel, que de poissons pêchés localement. "En ce moment, on a du homard de Saint-Pierre et Miquelon, mais c'est tout", confirme Benjamin Hélène, de la poissonnerie Paturel, à Saint-Pierre. "C'est une période creuse pour la morue et le flétan. L'été, les pêcheurs artisanaux se consacrent plutôt au crabe des neiges, au concombre de mer et à la coquille Saint-Jacques." Le poissonnier devrait avoir de nouveau du flétan dans une dizaine de jours. Mais il devra attendre pour cela le retour du seul bateau de pêche industrielle actuellement en service, le "Cap Jean", parti en mer pour plusieurs semaines.
Benjamin Hélène n’y voit pas d’inconvénient. Il s’adapte. Pendant la période estivale, certains pêcheurs lui fournissent du poisson de temps à autre. "Mais ce sont vraiment des 'à côté', ils font ça pour me rendre service." Le reste du temps, il fait venir du saumon de métropole, qui est ensuite fumé sur place. Il anticipe aussi avec des stocks de produits congelés, "pour diversifier les produits" mis en vente dans sa boutique.
Les habitants de l’archipel peuvent aussi se fournir directement auprès des pêcheurs artisanaux, lorsqu'ils ont quelques prises. Mais les ventes au bateau de cabillauds, de flétans ou de rougets restent ponctuelles. "Ce n’est pas l’essentiel de notre activité", concède Gilles Poirier, qui pointe du doigt l’étroitesse du marché local. Joël Jossaume approuve : "après les premières ventes, il y a rapidement moins de demandes." La population ne dépasse pas les 6000 habitants, et beaucoup de plaisanciers capturent eux-mêmes leurs poissons, ce qui réduit encore le nombre de clients potentiels.
"On pourrait pêcher plus", reprend Gilles Poirier. "Mais on ne veut pas gâcher. Ça ne sert à rien de ramener beaucoup de poissons, si c'est pour qu'ils restent des jours et jours dans nos cales sans personne pour les acheter."
À lire aussi > Des quotas en baisse pour la pêche aux concombres de mer à Saint-Pierre et Miquelon
D’autant que la période estivale n’est pas la saison idéale pour le cabillaud, selon Benjamin Hélène. "La morue est moins grasse, moins goûtue. Bref, elle est moins sexy en été", assure-t-il. "À partir d'octobre-novembre, elle commence à reprendre forme. Et alors là, attention aux papilles !" Les brandades et les accras attendront donc l'automne, et le retour de la pêche au cabillaud.
Cette année, les marins ont majoritairement capturé du crabe des neiges, un produit qu'ils privilégient au cabillaud ou au flétan. Les quotas 2020, fixés à 180 tonnes, ont ainsi été atteints fin juin, avant même la fin de la saison. Celle-ci avait pourtant débuté le 20 avril avec près de trois semaines de retard, en raison du confinement liée à la pandémie de Covid-19.
"La saison a été courte et il y avait du crabe en quantité" explique Joël Jossaume, le capitaine du "Cap à Joël". Lui-même a choisi de pêcher en priorité ce produit, plus rentable selon lui, que d'autres espèces. "Le prix de la morue est trop bas pour en vivre." Le tarif du crabe à Terre-Neuve, lui, est réévalué chaque semaine en fonction des marchés. Il était fixé fin mai à 3,5 dollars la livre, soit environ 2,30 euros pour moins d'un kilo.
À lire aussi > Crabe des neiges : reprise des livraisons à Terre-Neuve sous conditions pour les pêcheurs de Saint-Pierre et Miquelon
Le flétan, autre poisson phare des eaux de Saint-Pierre et Miquelon, ne séduit plus non plus les marins de l'archipel. "L'été, on ne peut le vendre qu'à l'usine de Miquelon, car les usines de Terre-Neuve n’ouvrent qu’à l’automne", assure Gilles Poirier, pêcheur artisan à bord du "Cap percé". "Et leurs tarifs ne sont pas intéressants." Il met aussi en avant les problèmes logistiques des pêches qui durent plus de trois jours. "Il n'y a pas de machine à glace à Saint-Pierre", affirme le Saint-Pierrais. "On doit aller à Miquelon pour s'en procurer et conserver le poisson. Cela nous fait une journée de trajet, et donc une journée de perdue."
"Morues, bulots, homards... Je n'ai pas de préférence pour une pêche plutôt qu'une autre. Du moment qu'on gagne notre vie..." - Gilles Poirier, artisan pêcheur
Le phénomène n'est pas nouveau. "On ne pêche plus autant que dans les années 2000", déclare le marin du "Cap Percé". Les quotas de cabillauds, plus bas, sont ainsi rarement atteints par les artisans pêcheurs. Pour l'année 2019, ils avaient le droit à 933 tonnes de ce poisson à chair blanche. Ils n'en ont capturé que 119 tonnes, selon les chiffres du service des affaires maritimes de la Direction des territoires, de l'alimentation et de la mer (DTAM).
Moins de poissons sur les étals
Résultat : on trouve beaucoup plus de fruits de mer sur les étals de l'archipel, que de poissons pêchés localement. "En ce moment, on a du homard de Saint-Pierre et Miquelon, mais c'est tout", confirme Benjamin Hélène, de la poissonnerie Paturel, à Saint-Pierre. "C'est une période creuse pour la morue et le flétan. L'été, les pêcheurs artisanaux se consacrent plutôt au crabe des neiges, au concombre de mer et à la coquille Saint-Jacques." Le poissonnier devrait avoir de nouveau du flétan dans une dizaine de jours. Mais il devra attendre pour cela le retour du seul bateau de pêche industrielle actuellement en service, le "Cap Jean", parti en mer pour plusieurs semaines.
Benjamin Hélène n’y voit pas d’inconvénient. Il s’adapte. Pendant la période estivale, certains pêcheurs lui fournissent du poisson de temps à autre. "Mais ce sont vraiment des 'à côté', ils font ça pour me rendre service." Le reste du temps, il fait venir du saumon de métropole, qui est ensuite fumé sur place. Il anticipe aussi avec des stocks de produits congelés, "pour diversifier les produits" mis en vente dans sa boutique.
La morue, "moins sexy en été"
Les habitants de l’archipel peuvent aussi se fournir directement auprès des pêcheurs artisanaux, lorsqu'ils ont quelques prises. Mais les ventes au bateau de cabillauds, de flétans ou de rougets restent ponctuelles. "Ce n’est pas l’essentiel de notre activité", concède Gilles Poirier, qui pointe du doigt l’étroitesse du marché local. Joël Jossaume approuve : "après les premières ventes, il y a rapidement moins de demandes." La population ne dépasse pas les 6000 habitants, et beaucoup de plaisanciers capturent eux-mêmes leurs poissons, ce qui réduit encore le nombre de clients potentiels.
"À Saint-Pierre et Miquelon, il y a beaucoup de particuliers qui pêchent eux-mêmes leur poisson l'été." - Benjamin Hélène, poissonnier
"On pourrait pêcher plus", reprend Gilles Poirier. "Mais on ne veut pas gâcher. Ça ne sert à rien de ramener beaucoup de poissons, si c'est pour qu'ils restent des jours et jours dans nos cales sans personne pour les acheter."
À lire aussi > Des quotas en baisse pour la pêche aux concombres de mer à Saint-Pierre et Miquelon
D’autant que la période estivale n’est pas la saison idéale pour le cabillaud, selon Benjamin Hélène. "La morue est moins grasse, moins goûtue. Bref, elle est moins sexy en été", assure-t-il. "À partir d'octobre-novembre, elle commence à reprendre forme. Et alors là, attention aux papilles !" Les brandades et les accras attendront donc l'automne, et le retour de la pêche au cabillaud.