Début janvier 2023 déjà, la province Sud et celle des Iles avaient déposé un texte sur le bureau du Congrès pour un transfert de ce budget à la Nouvelle-Calédonie. Un texte jusqu'ici laissé sans suite.
1- L'aide médicale gratuite est portée par les provinces depuis 2000
C'est un dispositif qui concerne plus de 55 000 Calédoniens sur tout le territoire aujourd'hui. L'aide médicale permet aux familles les plus défavorisées d'avoir un accès aux soins facilité, gratuit ou partiellement gratuit.
Cette compétence de la Nouvelle-Calédonie avait été laissée aux provinces en 2000. Conséquences : les conditions et les formalités diffèrent. "La Nouvelle-Calédonie a fixé le cadre général minimum, laissant le soin à chacune des provinces, dans le cadre de la délégation de compétence prévue par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, d’adapter les régimes de prestations sociales en fonction des besoins de la collectivité", détaille les services du gouvernement.
2- Quelle est la répartition des bénéficiaires ?
Sans surprise, le dispositif pèse de manière inégale sur les provinces.
Sud : Les chiffres de 2023 font état de près de 25 000 bénéficiaires en province Sud, pour un budget total de 5,4 milliards de francs (sur près de 203 000 habitants selon les chiffres du dernier recensement de 2019).
Nord : En 2023, en province Nord, on dénombrait 18 080 bénéficiaires, dont 12 961 cartes A (prise en charge totale) et 5 111 carte B (prise en charge partielle), soit un budget de 3,6 milliards de francs, en baisse de 8% (sur près de 50 000 habitants selon les chiffres du dernier recensement de 2019).
Iles : En 2022, la province des Iles comptait 11 417 bénéficiaires, 7 964 cartes A et 3 453 carte B (sur un peu plus de 18 000 habitants selon les chiffres du dernier recensement de 2019).
3- Un projet de transfert en 2023
Une enveloppe qui pèse dans le budget des provinces, selon elles, si bien que le Sud comme les Iles souhaitaient la voir revenir à la Nouvelle-Calédonie.
En janvier 2023, le sujet était même arrivé sur le bureau du Congrès, ses membres étant appelés à se prononcer sur une proposition de loi du pays déposée par Sonia Backès, la présidente de la province Sud, et Jacques Lalié, le président de la province des Iles.
Une proposition de transfert qui avait fait réagir Calédonie ensemble à l'époque expliquant que la Nouvelle-Calédonie était déjà surendettée et que c’était "creuser la tombe de la Nouvelle-Calédonie".
De leur côté, les instances consultatives (Cése, comité des finances locales et même le conseil d’Etat) avaient émis des avis réservés.
Le texte n'a finalement pas été examiné, après son retrait le 10 janvier 2023 de l'ordre du jour.
4- Pour qui ?
Ce dispositif d'accompagnement vise les foyers à faible revenus, pour qui les coûts des frais de santé sont difficiles à porter. Une aide qui n'est valable qu'en Nouvelle-Calédonie ou dans le cadre d'une évacuation sanitaire hors du Caillou.
Pour en bénéficier, il faut respecter trois critères principaux :
- résider dans la province depuis plus de 6 mois.
- avoir le centre de leurs intérêts moraux et matériels dans la province concernée.
- avoir des ressources inférieures au salaire minimum agricole garanti, soit 140 280 francs CFP depuis le 15 février 2023 (plafond augmenté de 20 % par personne supplémentaire à charge en province Sud).
5- Quelles conséquences en cas de suppression ?
À cause de la crise de grande ampleur que traverse la Nouvelle-Calédonie depuis le 13 mai dernier, les coupes budgétaires se font plus pressantes. Une inquiétude pèse sur l'aide médicale en province Sud, la réunion attendue en fin de journée ce jeudi 11 juillet devrait apporter des réponses.
Pour le vice-président du conseil de l'ordre des médecins, une suppression serait contre-productive. "Honnêtement, je vois mal un politique calédonien actuel dire que c'est fini. Ce serait une preuve de courage, mais aussi une preuve de manque d'empathie. C'est juste inimaginable", considère le docteur Paul Bejan. "En Métropole et même aux Etats-Unis, il y a quand même un minimum qui est pris en charge."
Parmi les craintes de ce professionnel, que certains patients s'éloignent des structures de soin. "Soit ils ne viennent pas, soit ils ne peuvent pas payer. S'ils ne viennent pas, c'est un risque de se retrouver avec quelqu'un qui a une grosse pathologie qui coûtera plus cher."
La perspective d'une éventuelle suppression du dispositif fait réagir les médecins et les Calédoniens.
Le reportage de Natacha Lassauce-Cognard et Mirna Kilama :
6- Différents niveaux de prise en charge
Aujourd'hui, les Calédoniens qui bénéficient de l'aide médicale, ont droit à différents niveaux de prise en charge des frais médicaux, partielle ou totale, selon les cas. La durée de validité est variable selon le type de carte.
- Carte A : pour les personnes qui n'ont pas d’autre couverture sociale. Elle donne accès aux soins dans le secteur public (hôpitaux, dispensaires et centres Cafat) et le secteur public agréé ou autorisé à recevoir les bénéficiaires de l’aide médicale.
- Carte B : Pour les personnes qui ont une autre couverture sociale (Cafat, mutuelles conventionnées, assurances). Elle donne accès à tous les secteurs (public et libéral).
- Carte M : elle concerne les femmes enceintes qui n’ont pas de prise en charge et ne remplissent pas les conditions pour bénéficier d’une autre carte (A ou B).
- Carte C : elle s'adresse aux anciens combattants, aux volontaires FFL et aux veuves de guerre. La carte C donne uniquement accès aux soins dans le cadre d’une hospitalisation en secteur public.
7- Pour quels types de prestations ?
Les soins pris en charge par l’aide médicale sont :
- les honoraires des médecins, des dentistes et des auxiliaires médicaux ou tout professionnel de santé agréé AMN.
- les médicaments.
- les frais d'hospitalisation, de transport en ambulance ou encore d’analyses.
- les frais d'évacuation sanitaire.
À noter qu’en province Sud, les titulaires de l’aide médicale doivent payer 10 % des actes, par le ticket modérateur, ce qui n’est pas le cas dans les provinces Nord et Iles.