Présidentielle contestée au Venezuela : le candidat de l’opposition convoqué pour une enquête pénale

Le candidat de l'opposition vénézuélienne à la présidentielle, Edmundo Gonzalez, lors d'un événement de campagne avant les élections à Caracas - 13/06/2024.
Les rejets des résultats proclamés suite à l’élection présidentielle au Venezuela affluent de plusieurs pays. Qu’à cela ne tienne, le président contesté Nicolas Maduro et les autorités locales dénoncent des "ingérences". Dans le même temps, le candidat de l’opposition, qui revendique la victoire, fait l’objet d’une enquête ; Edmundo Gonzalez Urrutia est tenu pour responsable des violences post-électorales et est accusé d’"usurpation de fonctions" et de "diffusion de fausses informations" notamment.

Alors que la communauté internationale met en doute la victoire de Nicolas Maduro, à la présidentielle du 28 juillet dernier, la vie politique suit son cours au Venezuela, avec ce vainqueur contesté aux commandes du pays.

Le Parquet général et la Cour suprême poursuivent le candidat de l’opposition, qui affirme être celui qui a remporté le scrutin ; il est rendu responsable, par les autorités locales, des exactions qui ont suivi l’élection.

Des poursuites à l’encontre d’Edmundo Gonzalez Urrutia

Le candidat de l'opposition vénézuélienne Edmundo Gonzalez Urrutia, qui revendique la victoire à la présidentielle du 28 juillet, va être convoqué par le Parquet pour une enquête pénale, a affirmé vendredi à la presse le procureur général Tarek William Saab. "Dans les prochaines heures, le citoyen Edmundo Gonzalez Urrutia sera convoqué par ce ministère public", a déclaré M. Saab, expliquant que le site internet sur lequel l'opposition a publié ses résultats de la présidentielle "usurpait" le pouvoir du Conseil national électoral (CNE). "Il doit se rendre à cette convocation pour parler (...) de sa responsabilité avant le 28 juillet, pendant le 28 juillet et après le 28 juillet pour sa récalcitrance, sa désobéissance aux autorités légitimement constituées", a ajouté le magistrat. "Il devra assumer" a-t-il souligné.

Le procureur accuse notamment l'opposition des violences post-électorales. L'annonce de la réélection de Nicolas Maduro a provoqué des manifestations spontanées, brutalement réprimées. Elles ont fait 27 morts, 192 personnes ont été blessées et 2.400 arrêtées, de source officielle.

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Le Parquet avait ouvert, le 6 août dernier, des enquêtes pour notamment "usurpation de fonctions, diffusion de fausses informations, incitation à la désobéissance aux lois, incitation à l'insurrection, association de malfaiteurs" contre Edmundo Gonzalez Urrutia et la cheffe de l'opposition Maria Corina Machado. Tarek William Saab considère que tous deux "annoncent un faux vainqueur de l'élection présidentielle (...) incitent ouvertement les fonctionnaires de police et les militaires à désobéir", selon le communiqué produit début août.

Les deux dirigeants de l'opposition vivent dans une semi-clandestinité depuis le début du mois. M. Gonzalez Urrutia n'a pas été vu en public depuis près de trois semaines.

La Cour suprême a validé, jeudi (22 août 2024) la réélection de Nicolas Maduro pour un troisième mandat de 6 ans, assurant transmettre au Parquet le dossier de Edmundo Gonzalez Urrutia, qui ne s'était pas présenté aux convocations de la haute cour.

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Un résultat contesté

Nicolas Maduro, 61 ans, a été proclamé vainqueur avec 52% des voix par le Conseil national électoral (CNE), qui n'a cependant pas rendu publics les procès-verbaux des bureaux de vote, se disant victime d'un piratage informatique.
Une telle attaque est jugée peu crédible par l'opposition et de nombreux observateurs, qui y voient une manœuvre du pouvoir pour éviter de divulguer le décompte exact.

Selon l'opposition, qui a rendu publics les procès-verbaux obtenus grâce à ses scrutateurs, Edmundo Gonzalez Urrutia a remporté le scrutin avec plus de 60% des voix.

Sans les montrer, la Cour suprême a assuré avoir vérifié les procès-verbaux remis par le pouvoir, ainsi que la réalité de l'attaque informatique contre le CNE.

Depuis, les réactions internationales pleuvent.
Dans un rapport daté du 13 août, des experts de l’Organisation des nations unies (ONU) estiment que le CNE n’a pas respecté les "mesures élémentaires de transparence et d’intégrité" nécessaires à des élections "crédibles".
Hier (vendredi 23 août), l’Espagne et l’Union européenne ont déclaré ne pas pouvoir reconnaître la victoire de Nicolas Maduro.
Le point de vue est le même du côté de Washington. Les Etats-Unis ont dénoncé, vendredi, la décision par la Cour suprême du Venezuela de valider la réélection du président sortant, réitérant que tout indiquait que le candidat de l'opposition Edmundo Gonzalez Urrutia avait remporté le scrutin. "Cette décision manque totalement de crédibilité, au vu des preuves accablantes que Gonzalez a reçu le plus de voix le 28 juillet", a déclaré dans un communiqué Vedant Patel, un porte-parole du département d'Etat américain, ajoutant que "la volonté du peuple vénézuélien (devait) être respectée".
Même son de cloche de la part de 10 pays d’Amérique Latine : l'Argentine, le Costa Rica, le Chili, l'Équateur, le Guatemala, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République dominicaine et l'Uruguay rejettent "catégoriquement l'annonce du Tribunal suprême de justice (TSJ) du Venezuela qui indique avoir conclu une prétendue vérification des résultats du processus électoral", dans une déclaration commune publiée à Quito, également signée par les USA.

Réaction offusquée du pouvoir vénézuélien, qui qualifie d'"acte d'ingérence inacceptable" ces prises de position. Le Venezuela "rejette avec la plus grande fermeté le communiqué grossier et insolent" précité, a affirmé, lors d'une déclaration télévisée, le ministre des Affaires étrangères Yvan Gil.